Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le maire de la commune de Dammarie a prononcé sa révocation.
Par un jugement n° 1903026 du 19 mai 2020, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Dammarie de la réintégrer dans ses fonctions dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune de Dammarie à lui payer l'intégralité des traitements dont elle a été privée jusqu'à sa réintégration ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté portant révocation du 20 juin 2019 est insuffisamment motivé dès lors que les faits énoncés ne sont ni datés ni détaillés, que l'avis du conseil de discipline n'était ni joint ni annexé ni mentionné dans l'arrêté et qu'il ne comporte qu'une formule stéréotypée ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la matérialité des faits qui lui étaient reprochés était établie et n'ont pas effectué la recherche sur la proportionnalité de la sanction au regard des fautes reprochées ; les faits datant de 2014 et de 2015 sont prescrits ; les violences reprochées ne sont pas établies ; il convient de prendre en compte son ancienneté, son absence de passé disciplinaire, la qualité de son travail reconnue au travers de la médaille d'honneur ainsi que son état de santé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 janvier 2021, la commune de Dammarie, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Dammarie.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., qui était employée par la commune de Dammarie en qualité d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles et affectée à l'école maternelle Les Tilleuls, relève appel du jugement du 19 mai 2020 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le maire de cette commune a prononcé à son encontre la sanction de révocation.
2. Il ressort de l'arrêté du 20 juin 2019 en litige que le maire de Dammarie a prononcé la révocation de Mme A... aux motifs qu'il lui " est reproché d'avoir eu des gestes violents (agrippements par le col ou les pieds, claques, fessées) et des paroles dénigrantes et humiliantes envers certains enfants de la petite section de maternelle dont elle a la charge, d'avoir proféré des paroles injurieuses, irrespectueuses, déloyales et dévalorisantes envers ses collègues, sa hiérarchie, les élus et certains parents d'élèves ", que l'avis motivé émis par le conseil de discipline le 28 mai 2018 propose la révocation et que " la sanction proposée par le conseil de discipline sanctionne comme il convient les faits reprochés à Mme A... ".
3. En premier lieu, en vertu de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983, la décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée. Aux termes du 2° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ". Ces dispositions imposent à l'autorité qui prononce une sanction disciplinaire de préciser elle-même, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent concerné, de telle sorte que ce dernier puisse, à la seule lecture de cette décision, connaître les motifs de la sanction qui le frappe.
4. Eu égard aux seuls motifs rappelés au point 2, l'arrêté en litige, auquel le maire de Dammarie n'avait pas l'obligation d'annexer l'avis du conseil de discipline qui avait été antérieurement notifié à l'intéressée dès lors qu'il ne s'y référait pas pour sa motivation, n'est, contrairement à ce que soutient Mme A..., pas stéréotypé. Il expose les griefs retenus à l'encontre de Mme A... de manière suffisamment circonstanciée pour la mettre à même de déterminer les faits que l'autorité disciplinaire entend lui reprocher. Il est ainsi suffisamment motivé alors même qu'il ne mentionne pas la date précise ou l'ensemble des détails de tous les incidents, dont la récurrence est à l'origine des manquements reprochés à Mme A..., en paroles et en actes vis-à-vis des enfants de la petite section de maternelle ou des adultes avec lesquels l'intéressée est en relation professionnelle.
5. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 en vigueur, dans sa rédaction issue de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires : " Aucune procédure disciplinaire ne peut être engagée au-delà d'un délai de trois ans à compter du jour où l'administration a eu une connaissance effective de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits passibles de sanction.(...) / Passé ce délai et hormis le cas où une autre procédure disciplinaire a été engagée à l'encontre de l'agent avant l'expiration de ce délai, les faits en cause ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d'une procédure disciplinaire ". Lorsqu'une loi nouvelle institue ainsi, sans comporter de disposition spécifique relative à son entrée en vigueur, un délai de prescription d'une action disciplinaire dont l'exercice n'était précédemment enfermé dans aucun délai, le nouveau délai de prescription est applicable aux faits antérieurs à la date de son entrée en vigueur mais ne peut, sauf à revêtir un caractère rétroactif, courir qu'à compter de cette date. Il suit de là que le délai institué par les dispositions précitées a couru, en ce qui concerne les faits antérieurs au 22 avril 2016, date d'entrée en vigueur de la loi du 20 avril 2016, à compter de cette date.
6. La procédure disciplinaire ayant conduit à la révocation de Mme A... ayant été engagée le 18 avril 2019, soit moins de trois ans après le 22 avril 2016, la commune de Dammarie pouvait, sans méconnaître la prescription de trois ans prévue par les dispositions du deuxième alinéa de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983, invoquer des faits antérieurs au 22 avril 2016. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'une partie des faits qui lui sont reprochés, ceux datant des années 2014 ou 2015, sont prescrits.
7. En troisième lieu, il incombe à la commune de Dammarie d'établir la matérialité des faits sur lesquels elle s'est fondée pour infliger une sanction disciplinaire et qui font l'objet d'une contestation. En l'espèce, si Mme A... ne conteste pas avoir tenu des propos particulièrement injurieux à l'encontre de la directrice de l'école le 7 mars 2019, elle soutient que les faits de violences qui lui sont reprochés ne sont pas établis. Toutefois, s'agissant des violences physiques ou verbales commises sur les enfants de petite section dont elle avait la charge, la commune de Dammarie se prévaut des témoignages des cinq autres agents territoriaux spécialisés d'école maternelle employés à l'école Les Tilleuls ainsi que de ceux des trois enseignants de cette école. Ces témoignages sont concordants et suffisamment circonstanciés pour établir que Mme A... était coutumière, envers les enfants, de propos déplacés, agressifs et insultants et de gestes inappropriés ou brutaux, allant jusqu'à punir un enfant en le maintenant dans le noir dans le dortoir, agripper un enfant par le col, infliger des fessées ou coups de pieds, s'enfermer dans les sanitaires des adultes avec un enfant ou traîner un enfant par les pieds sur toute la longueur du couloir pour l'amener au dortoir. Si Mme A... se prévaut de témoignages en sa faveur de parents d'enfants dont elle avait la charge dans le cadre de ses fonctions, ceux-ci n'étaient pas présents dans le service au moment des faits qui lui sont imputés. Par ailleurs, si les dérapages verbaux à l'égard des parents d'élèves ou des élus ne sont pas étayés, les mêmes témoignages, ainsi que le compte rendu établi par la supérieure hiérarchique de Mme A... le 9 avril 2019, confirment que l'intéressée a tenu des propos irrespectueux et dévalorisants envers ses collègues et sa hiérarchie. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la sanction serait fondée sur des faits matériellement inexacts.
8. En dernier lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Les faits évoqués au point 7 constituent de graves manquements dans l'exécution des missions d'agent territorial spécialisé des écoles maternelles et des violations des obligations de réserve et de conscience professionnelle auxquels sont tenus les fonctionnaires. Ils sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire. Si Mme A... fait état de son état de santé, le certificat médical qu'elle produit ne justifie pas que cet état de santé était de nature à altérer son discernement lorsque les faits ont été commis. Compte tenu de la nature et de la gravité des faits de violences physiques et verbales commis par Mme A... non seulement vis-à-vis de ses collègues et supérieur hiérarchique mais aussi et surtout vis-à-vis des enfants de la petite section de maternelle dont elle avait la charge, et alors même qu'elle n'avait pas d'antécédent disciplinaire, la commune de Dammarie n'a pas pris une sanction disproportionnée en infligeant à Mme A... la sanction de révocation.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... le versement d'une somme à la commune de Dammarie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Dammarie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de la justice sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au maire de la commune de Dammarie.
Délibéré après l'audience du 30 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président assesseur,
- Mme E..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021.
Le rapporteur,
F. E...Le président,
O. GASPON
Le greffier,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02101 2
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