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17/05/2021 | FRANCE | N°19NT04814

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 mai 2021, 19NT04814


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Foncière du pays de Caen a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 pour un montant en droits et pénalités de 460 404 euros.

Par un jugement n° 1800399 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les

13 décembre 2019 et 7 janvier 2021, la SCI Foncière du pays de Caen, représentée par Me B..., dem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) Foncière du pays de Caen a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 pour un montant en droits et pénalités de 460 404 euros.

Par un jugement n° 1800399 du 16 octobre 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 décembre 2019 et 7 janvier 2021, la SCI Foncière du pays de Caen, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée mise en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- dans la mesure où la date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée est intervenue le 17 mars 2010, la procédure d'imposition est irrégulière puisque la proposition de rectification du 15 mai 2013 interrompant la prescription visait uniquement un rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de mai 2012 et que la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge, qui concerne l'année 2010, n'est pas visée par l'avis de mise en recouvrement ;

- en l'absence de rectification sur l'année 2010, l'administration n'est pas fondée à compenser des droits sur une année sans litige.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête.

Il fait valoir à titre principal, que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés et à titre subsidiaire, il entend faire valoir son droit de compensation prévu à l'article L. 203 du livre des procédures fiscales.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) Foncière du pays de Caen a acquis, auprès de la société Normandie Aménagement, un immeuble le 23 décembre 2004 et a obtenu, le 16 septembre 2005, le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée déduite sur l'acquisition. Le tribunal de grande instance de Caen a, par un jugement du 17 mars 2010, prononcé la résolution de la vente et a ordonné l'exécution provisoire. Par un arrêt du 10 mai 2012, la cour d'appel de Caen a confirmé la résolution de la vente. La SCI Foncière du pays de Caen a ensuite fait l'objet d'une vérification de comptabilité en matière de taxes sur le chiffre d'affaires sur la période allant du 1er janvier 2010 au 28 février 2013. Estimant que la société devait procéder à la régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée antérieurement déduite au titre de cette acquisition, l'administration fiscale lui a notifié, par une proposition de rectification du 15 mai 2013, un rappel de taxe sur la valeur ajoutée. La société requérante a demandé au tribunal administratif de Caen la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge. Par un jugement du 16 octobre 2019, le tribunal a rejeté sa demande. Elle fait appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. / (...) ". Aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) 2. La taxe est exigible : a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 et pour les opérations mentionnées aux b, c, d et e du 1, lors de la réalisation du fait générateur ; (...). ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, notamment son arrêt du 8 février 1990, Safe Rekencentrum BV (C-320/88) qu'est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. Aux termes de l'article 272 du code général des impôts : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a été perçue à l'occasion de ventes ou de services est imputée ou remboursée dans les conditions prévues à l'article 271 lorsque ces ventes ou services sont par la suite résiliés ou annulés ou lorsque les créances correspondantes sont devenues définitivement irrécouvrables. / (...) L'imputation ou la restitution est subordonnée à la justification, auprès de l'administration, de la rectification préalable de la facture initiale ". Et l'article 271 du même code précise que : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...) II. (...) 3. Lorsque ces factures ou ces documents font l'objet d'une rectification, les redevables doivent apporter les rectifications correspondantes dans leurs déductions et les mentionner sur la déclaration qu'ils souscrivent au titre du mois au cours duquel ils ont eu connaissance de cette rectification. (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que s'agissant de la remise en cause de la taxe sur la valeur ajoutée déduite par une entreprise à la suite de l'annulation d'une vente, l'administration dispose d'un délai de reprise courant à compter de l'année de l'émission de factures rectificatives.

3. Il est constant que le tribunal de grande instance de Caen, par un jugement du 17 mars 2010, d'une part, a prononcé la résolution de la vente, portant sur un bâtiment industriel, qui avait été conclue en 2004 entre la société Normandie Aménagement et la société requérante et qui avait ouvert à cette dernière un droit à déduction de taxe sur la valeur ajoutée, d'autre part, a jugé que la société Normandie Aménagement était à nouveau propriétaire de l'immeuble en cause à compter du jugement et a enfin ordonné l'exécution provisoire de ce jugement. Cependant, ce jugement n'était pas définitif et un arrêt de la cour d'appel de Caen a été rendu le 10 mai 2012, confirmant la résolution de la vente. En outre, la société Normandie Aménagement n'a adressé que le 4 décembre 2012 à la SCI Foncière du pays de Caen un avoir constatant l'annulation de la vente et rectifiant la facture initiale. Enfin, la société Normandie Aménagement n'avait pas demandé à l'administration, avant fin 2012, une régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait acquittée au moment de la vente. Dans ces conditions, le point de départ du délai de reprise prévu à l'article L. 176 du livre des procédures fiscales ne pouvait être, pour le rappel du remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont a bénéficié la société requérante, correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée déduite sur l'acquisition, antérieur à la rectification du 4 décembre 2012 de la facture initiale par la société Normandie Aménagement. Ainsi, la SCI Foncière du pays de Caen n'est pas fondée à soutenir que l'exigibilité du rappel de taxe sur la valeur ajoutée en cause était la date du 17 mars 2010, date du jugement. Dès lors, le droit de reprise de l'administration, qui a émis une proposition de rectification le 15 mai 2013, puis un avis de mise en recouvrement le 16 septembre 2013, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée due pour 2012, n'était pas prescrit.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Foncière du pays de Caen n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au paiement des frais liés au litige doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Foncière du pays de Caen est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Foncière du pays de Caen et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2021.

La rapporteure,

P. A...Le président,

F. Bataille

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19NT04814

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04814
Date de la décision : 17/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : LE SERGENT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-05-17;19nt04814 ?
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