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23/04/2021 | FRANCE | N°19NT03264

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 23 avril 2021, 19NT03264


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 8 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier universitaire de Caen a refusé de lui verser la prime de précarité à laquelle elle estimait avoir droit.

Par un jugement n° 1800801 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 août 2019 et les 2 avril et 6 mai 2020 Mme A... E..., représ

entée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2019 ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 8 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier universitaire de Caen a refusé de lui verser la prime de précarité à laquelle elle estimait avoir droit.

Par un jugement n° 1800801 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 août 2019 et les 2 avril et 6 mai 2020 Mme A... E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2019 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen la somme de

2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les articles L. 1243-8 du code du travail et R. 6152-418 du code de la santé publique ont été méconnus ;

- l'article R. 6452-403 du code de la santé publique ne lui est pas applicable ;

- le fait qu'un contrat à durée déterminée ne se poursuive pas par un contrat à durée indéterminée ouvre droit à la perception de l'indemnité de précarité ;

- en l'espèce aucun poste n'était vacant sur lequel elle aurait pu postuler ;

- une indemnité de précarité d'un montant de 8 952,62 euros lui est due.

Par des mémoires enregistrés les 5 mars, 7 avril et 11 juin 2020 (ce dernier non communiqué) le centre hospitalier universitaire de Caen, représenté par la Selarl Minier-Maugendre et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme E... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par Mme E... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant le CHU de Caen.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... E..., titulaire d'un diplôme de docteur en médecine dans la spécialité ophtalmologie, a été recrutée par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen en qualité de praticienne hospitalière contractuelle, sous contrat à durée déterminée, pour la période du

1er novembre 2016 au 30 avril 2017. Après qu'elle eut été admise, le 8 mars 2017, aux épreuves du concours national de praticien hospitalier, dans la spécialité ophtalmologie, son contrat a été prolongé par un avenant n°1 jusqu'au 31 octobre 2017. Le 16 août 2017, l'intéressée a informé le centre hospitalier universitaire de son intention de ne pas accepter le renouvellement de son contrat à cette échéance et a sollicité le versement de l'indemnité de fin de contrat à laquelle elle estimait avoir droit sur le fondement de l'article L.1243-8 du code du travail. Le 9 novembre 2017, le CHU de Caen refusait explicitement de lui verser l'indemnité de fin de contrat. Mme E... a renouvelé sa demande par une lettre du 24 novembre 2017 puis, le 11 janvier 2018, par l'intermédiaire de son assureur. Par une lettre reçue le 8 mars 2018, le centre hospitalier universitaire réitérait son refus. Mme E... relève appel du jugement du 29 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce refus.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 6152-418 du code de la santé publique : " Les dispositions du code du travail sont applicables aux praticiens contractuels en tant qu'elles sont relatives à l'indemnité prévue à l'article L. 1243-8 du code du travail et aux allocations d'assurance prévues à l'article L. 5424-1 du code du travail ". Aux termes de l'article L. 1243-8 du code du travail : " Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié. Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant ". Aux termes de l'article L. 1243-10 du même code : " L'indemnité de fin de contrat n'est pas due : (...) / 3° Lorsque le salarié refuse d'accepter la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente / 4° En cas de rupture anticipée du contrat due à l'initiative du salarié, à sa faute grave ou à un cas de force majeure ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsque, au terme d'un contrat de travail à durée déterminée, la relation de travail n'est pas poursuivie par un contrat à durée indéterminée, le praticien contractuel a droit, à titre de complément de rémunération, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation égale à 10 % de la rémunération brute totale sauf à se trouver dans l'un des cas énoncés à l'article L.1243-10 du code du travail.

4. Mme E... a été employée en qualité de praticien contractuel au centre hospitalier universitaire de Caen par un contrat conclu, sur le fondement du 4° de l'article R. 6152-402 du code de la santé publique, pour la période du 14 novembre 2016 au 30 avril 2017 et qui a été prorogé par un avenant n°1 jusqu'au 31 octobre 2017. L'intéressée, en portant à la connaissance du centre hospitalier universitaire, par un courriel du 16 août 2017, qu'elle ne souhaitait pas, à ce terme, accepter le renouvellement de contrat de travail à durée déterminée qui lui avait été proposé, ne peut être regardée comme ayant rompu, au sens du 4° de l'article L.1243-10 du code du travail, de manière anticipée son dernier contrat qui a été exécuté jusqu'à son terme du 31 octobre 2017.

5. Par ailleurs, si le directeur général du centre hospitalier universitaire de Caen et le directeur de la commission médicale d'établissement de cet établissement ont, le 3 mai 2017, porté à la connaissance du chef du service ophtalmologie leur accord de principe pour transformer le poste de contractuel occupé par Mme E..., qui venait d'être admise au concours de praticien hospitalier, en poste de praticien hospitalier et si le centre hospitalier universitaire a effectivement adressé à l'agence régionale de santé la liste des postes à pourvoir, au titre du tour de recrutement du printemps 2018, par des praticiens hospitaliers ayant pour spécialité l'ophtalmologie, ces circonstances ne sauraient être assimilées à une offre de contrat à durée indéterminée au sens des dispositions rappelées au point 2 et ne permettent pas davantage de constater qu'à la date à laquelle a été prise la décision contestée un poste de praticien hospitalier relevant de la spécialité ophtalmologie était objectivement vacant au sein du centre hospitalier universitaire de Caen. Par suite, Mme E... ne peut davantage être regardée comme ayant refusé une offre de contrat à durée indéterminée au sens du 3° de l'article L. 1243-10 du code du travail.

6. Par suite, et en vertu des motifs énoncés aux point 4 et 5 et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, Mme E... était en droit de bénéficier de l'indemnité de précarité prévue à l'article L.1243-8 du code du travail.

7. Il résulte de ce qui précède que la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen le versement à Mme E... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, les dispositions de l'article

L 761-1 du code de justice administrative ne permettent pas d'en faire bénéficier la partie perdante ou tenue aux dépens. Les conclusions présentées sur ce fondement par le centre hospitalier universitaire de Caen ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800801 du tribunal administratif de Caen du 29 mai 2019 et la décision du 8 mars 2018 de refus de verser à Mme E... l'indemnité de précarité sont annulés.

Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Caen versera à Mme E... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Caen au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et au centre hospitalier universitaire de Caen.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Perrot président de chambre,

Mme C..., président-assesseur,

M. Berthon, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2021.

Le rapporteur

C. C...

Le président

I. Perrot

Le greffier

A. Martin

La République mande et ordonne au ministre de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03264
Date de la décision : 23/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : BOURREL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-04-23;19nt03264 ?
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