Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
le code de l'urbanisme ;
le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. A...'hirondel,
les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
et les observations de Me C..., représentant la SCI SAD.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI SAD est propriétaire, sur le territoire de la commune de Donges, des parcelles cadastrées section BD n°s 402 et 403 et YD n°s 379, 380 et 381 situées " Le petit Rembrun " en bordure de la route départementale (RD) n°10 et sur lesquelles est édifié un ensemble immobilier d'une surface de 244 m² situé à proximité d'une raffinerie et de ses dépôts de stockage. Par un acte authentique du 23 mars 2012, la SCI SAD a conclu un compromis de vente de ces parcelles au prix de 530 000 euros. En réponse à la déclaration d'intention d'aliéner qui lui avait été adressée, la maire de Donges a informé le notaire en charge de la vente, par une correspondance du 28 juin 2012, de la renonciation de la commune à exercer le droit de préemption sur la vente et en attirant son attention sur le prix de la cession qu'elle regardait comme exagéré et sur la situation des terrains au regard de différents aléas. Estimant que ce courrier avait entraîné l'échec de la vente du bien en cause et le départ des locataires, la société requérante a recherché l'engagement de la responsabilité pour faute de la commune de Donges. Par une demande du 22 décembre 2016, la SCI SAD a demandé à la commune de l'indemniser du préjudice qu'elle a ainsi subi. En l'absence de toute réponse à cette demande, une décision implicite de rejet est née. La SCI SAD a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cette décision implicite de rejet et de condamner la commune de Donges à l'indemniser de ses préjudices à hauteur de la somme totale de 350 000 euros. Par un jugement du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. La SCI SAD relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 213-21 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Le titulaire du droit de préemption doit recueillir l'avis du service des domaines sur le prix de l'immeuble dont il envisage de faire l'acquisition dès lors que le prix ou l'estimation figurant dans la déclaration d'intention d'aliéner ou que le prix que le titulaire envisage de proposer excède le montant fixé par l'arrêté du ministre chargé du domaine prévu à l'article R. 1211-2 du code général de la propriété des personnes publiques. ". Aux termes de l'article R. 213-8 du même code : " Lorsque l'aliénation est envisagée sous forme de vente de gré à gré ne faisant pas l'objet d'une contrepartie en nature, le titulaire du droit de préemption notifie au propriétaire : / a) Soit sa décision de renoncer à l'exercice du droit de préemption ; / b) Soit sa décision d'acquérir aux prix et conditions proposés, y compris dans le cas de versement d'une rente viagère ; / c) Soit son offre d'acquérir à un prix proposé par lui et, à défaut d'acceptation de cette offre, son intention de faire fixer le prix du bien par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que, par le courrier précité du 28 juin 2012, la maire de Donges a informé le notaire chargé de la vente de la renonciation de la commune à exercer le droit de préemption sur la vente et a ajouté que le prix de la cession proposé lui paraissait exagéré au regard de l'avis émis par France Domaine qui avait évalué la valeur de ce bien à la somme de 152 000 euros. Elle précisait également la situation du bien à vendre au regard des risques industriels, du projet de plan de prévention des risques technologiques (PPRT) et, enfin, du projet de déviation de la voie ferrée. S'agissant du risque industriel, elle indiquait que le bien se situait en zone d'effets graves et significatifs sur la vie humaine où sauf exception, toute construction nouvelle est interdite et où le principe est de ne pas augmenter le nombre de personnes exposées au risque. Au regard du PPRT, elle précisait que le terrain était classé en zone rouge "r" dans laquelle la règle est le principe d'interdiction stricte et où les usages sont limités du fait d'un aléa thermique fort. Concernant le projet de déviation de la voie ferrée, elle mentionnait que le terrain se situait dans le fuseau d'étude du projet de dévoiement ferroviaire, ce qui rendait une acquisition quasi inévitable. Elle indiquait, enfin, que si la vente était destinée à la réouverture d'une activité commerciale de nature à exposer de nombreuses personnes à des risques importants, elle était susceptible d'exercer le pouvoir de police qu'elle détient.
4. Il résulte du courrier de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) des Pays de la Loire du 31 mai 2016 adressé à Mme B..., représente légale de la société requérante, que " du fait de sa proximité immédiate avec la raffinerie, l'ancienne station-service que vous possédez en bordure de la RD 100 est située en zone r2 du règlement du PPRT, caractérisée par un aléa thermique de niveau fort plus (F+), un aléa de surpression de niveau moyen plus (M+) et un aléa toxique de niveau moyen (M), qui s'appliquent de manière combinée. Au regard de ces risques jugés importants pour les personnes présentes dans les bâtiments, cette zone a été inscrite dans le PPRT en zone de délaissement. Votre bien peut ainsi, si vous en faites la demande dans les délais prévus, être racheté par l'Etat, les collectivités locales et les industriels à l'origine du risque, sur la base d'une estimation faite par France Domaine ". Ce même courrier précise que " si vous ne souhaitez pas faire valoir ce droit de délaissement, votre bien n'étant pas dédié à un usage d'habitation, vous avez la possibilité, suite à des modifications réglementaires intervenues fin 2015 (ordonnance n°2015-1324 du 22 octobre 2015), de définir et de proposer des mesures alternatives au délaissement apportant une amélioration substantielle de la sécurité de votre bien, et de solliciter pour ces travaux de protection un financement tripartite, par l'Etat, l'industriel Seveso et les collectivités locales (...). Ces travaux doivent garantir une protection efficace des occupants, et leur coût doit être inférieur au coût estimé du délaissement du bien ". De même, si le courriel du chef d'unité de la direction départementale des territoires et de la mer de Loire-Atlantique du 29 septembre 2014 indique la possibilité de louer les locaux existants à des fins d'activité économique, c'est sous réserve de réaliser les travaux de protection des occupants du bâti dans des conditions et dans les délais fixés par le PPRT.
5. Dans ces conditions, si la lettre de la maire de Donges fait état d'informations relatives au prix proposé et à des projets qui avaient été rendus publics, il ne résulte pas de l'instruction que ces informations auraient été erronées. L'information donnée par la maire en cas de réouverture d'une activité commerciale n'invoque, par ailleurs, que la possibilité d'exercer ses pouvoirs de police en cas de risque important pour de nombreuses personnes mais sans pour autant interdire cette activité économique. Enfin, aucune pièce du dossier ne permet d'établir une quelconque manoeuvre ou pression de la maire destinée à décourager les acquéreurs du bien appartenant à la SCI SAD. Il suit de là que cette lettre n'a pas constitué un agissement fautif de nature à engager la responsabilité de la commune envers la société requérante.
6. En tout état de cause, il est constant que le bien, objet de la vente, était situé dans le périmètre d'un PPRT prescrit. Selon l'article L. 125-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable à la date d'intervention de cette lettre : " I. - Les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques (...) sont informés par le vendeur ou le bailleur de l'existence des risques visés par ce plan (...) ". Il suit de là que la SCI SAD était elle-même tenue d'informer les acquéreurs éventuels des risques visés par le PPRT prescrit, en particulier que le terrain était situé dans une zone caractérisée par un aléa thermique de niveau fort plus (F+), un aléa de surpression de niveau moyen plus (M+) et un aléa toxique de niveau moyen (M), qui s'appliquent de manière combinée. En outre, et ainsi qu'il a été dit, la possibilité de louer des locaux existants à des fins d'activité économique était subordonnée, par le PPRT, à la réalisation de travaux de protection des occupants du bâti. Compte tenu de ces risques importants pour la sécurité des personnes et des contraintes auxquelles l'acquéreur potentiel était soumis s'il souhaitait louer son bien et sur lesquels il devait être informé par le vendeur, il ne résulte pas de l'instruction que la faute alléguée par la SCI SAD à l'encontre de la commune de Donges du fait des énonciations de la lettre de sa maire du 28 juin 2012 présente un lien de causalité direct et certain avec la renonciation des acheteurs. De même, si la société requérante soutient qu'elle n'a pas pu vendre ou louer son bien du fait de cette lettre, il résulte du courrier de l'agence immobilière du 10 mars 2020 que les tentatives de mise en location ou à la vente du bien à compter de janvier 2014 n'ont pas abouti, non pas du fait de cette lettre, mais en raison des contraintes réglementaires fortes rappelées par le service économique de la Communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'estuaire (CARENE). Par ailleurs, la lettre de la maire de Donges, qui est intervenue dans le cadre d'une procédure de préemption, est sans lien avec le préjudice allégué résultant d'une perte de loyers, ce courrier n'étant pas destiné à l'information du bailleur dans ses relations avec le locataire. La société requérante ne produit enfin comme seul justificatif de location avant l'intervention de ce courrier qu'un bail commercial de courte durée conclu entre le 1er février 2009 et le 30 avril 2009, soit trois ans avant les faits reprochés à la commune. Il suit de là que le lien de causalité entre la faute alléguée de la commune et le préjudice dont la SCI SAD demande réparation, qui n'est pas suffisamment justifié, ne peut être regardé comme présentant un caractère direct et certain.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI SAD n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Donges, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCI SAD demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SCI SAD une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Donges et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI SAD est rejetée.
Article 2 : La SCI SAD versera à la commune de Donges la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI SAD et à la commune de Donges.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président,
- Mme Douet, président-assesseur,
- M. A...'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 avril 2021.
Le rapporteur,
M. D...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°20NT01432