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09/04/2021 | FRANCE | N°20NT01995

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 09 avril 2021, 20NT01995


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2018 du préfet du Loiret lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1804010 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 juillet 2020 Mme A..., représentée par<

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Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 19...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 juillet 2018 du préfet du Loiret lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1804010 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 juillet 2020 Mme A..., représentée par

Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 19 novembre 2019 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 25 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Loiret, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise au vu d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) incomplet et, par suite entaché d'irrégularité au regard des dispositions de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de l'impossibilité de bénéficier des soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, cette décision est entachée d'un vice de procédure ;

- l'illégalité de cette décision prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 décembre 2020, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 31322, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante de la Côte-d'Ivoire née en 1955, est entrée en France en 2006 sous couvert d'un visa de court séjour. Après avoir fait l'objet de refus de titre de séjour assortis d'obligation de quitter le territoire français en 2007 et 2009, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales le 7 décembre 2010 et s'est vu délivrer une autorisation provisoire de séjour renouvelée jusqu'au 20 mars 2012, puis une carte de séjour temporaire valable un an, jusqu'au 31 mai 2013. Un nouvel arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français a été pris à son encontre en 2013, avant qu'elle n'obtienne une carte de séjour temporaire valable du 16 décembre 2014 au 15 décembre 2015. Après avoir fait à nouveau l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français en 2016, une carte de séjour temporaire lui a été délivrée, valable du 17 septembre 2016 au 16 septembre 2017. Par un arrêté du 25 juillet 2018, le préfet du Loiret a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 19 novembre 2019 du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ".

3. L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. (...) ".

4. Pour refuser le renouvellement du titre de séjour pour raisons médicales sollicité par Mme A..., le préfet du Loiret s'est fondé sur l'avis émis le 30 juin 2018 par le collège de médecins de l'OFII, indiquant que l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle pouvait bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'un traitement approprié et qu'elle pouvait voyager sans risque vers ce pays.

5. La requérante soutient que cet avis ne précise pas si les éléments de procédure que constituent la convocation pour examen au stade de l'élaboration de l'avis et les demandes d'examens complémentaires et de justification d'identité ont été réalisés ou non. Toutefois, aucune des dispositions applicables ne fait obligation au collège de mentionner dans son avis des convocations, demandes ou examens complémentaires qu'il n'a pas effectués. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titre de séjour aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., a subi en 2010 une mastectomie partielle, assortie d'un curage axillaire, d'une chimiothérapie et d'une hormonothérapie ainsi que d'une reconstruction mammaire. Si l'intéressée soutient que la radiothérapie, la chimiothérapie et l'administration de morphine par voie orale ne sont généralement pas disponibles en Côte-d'Ivoire, les certificats médicaux qu'elle produit ne font état, au titre des suites de son cancer du sein, que de la nécessité de la poursuite des soins, sans autre précision, et d'un suivi régulier et se bornent à évoquer une future opération liée à la reconstruction mammaire et une mammographie. Alors que le préfet justifie de l'existence de services d'imagerie médicale en Côte-d'Ivoire, auxquels la requérante ne démontre pas être dans l'impossibilité d'accéder, les documents qu'elle produit, notamment le certificat médical établi en 2013 par un médecin de ce pays et faisant état d'une absence de prise en charge de la reconstruction mammaire en Côte-d'Ivoire et la fiche de l'Organisation mondiale de la santé datée de 2014 aux termes desquels la mammographie y est " généralement indisponible au niveau des soins de santé primaires publics " au titre du dépistage du cancer, ne permettent pas de remettre en cause la teneur de l'avis précité du collège de médecins de l'OFII. Si Mme A... soutient également, en se prévalant de certificats médicaux établis postérieurement à l'arrêté contesté, qu'elle souffre d'arthrose ainsi que d'hypertension artérielle et de dyspnée d'effort nécessitant un bilan cardiologique complet, elle n'allègue ni n'établit être dans l'impossibilité de pouvoir bénéficier d'une prise en charge effective à ce titre en Côte-d'Ivoire. Par suite, en refusant de lui délivrer le titre de séjour qu'elle avait sollicité pour raisons médicale, le préfet du Loiret n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Mme A... se prévaut de sa présence en France depuis 2006, de celle d'un frère et de deux de ses enfants, de nationalité française et de ses liens avec les petits-enfants qu'elle côtoie chez sa fille qui l'héberge. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée n'est pas dépourvue de toute attache familiale hors du territoire français, ayant deux autres enfants résidant ou ayant résidé en Côte-d'Ivoire et dont elle déclare désormais qu'ils se trouveraient actuellement au Cameroun. En outre, la requérante est entrée en France à l'âge de cinquante-et-un ans, n'y a résidé régulièrement que de façon intermittente pour raisons médicales et sur une durée cumulée de quatre années, a fait l'objet de quatre précédentes mesures d'éloignement auxquelles elle n'a pas déféré et ne justifie pas d'une particulière intégration. Si Mme A... invoque également son état de santé, elle ne justifie pas, ainsi qu'il a été dit au point 6, de la nécessité de son maintien en France pour motifs médicaux. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions de séjour en France de l'intéressée, la décision contestée portant refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Loiret n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante.

8. Le moyen tiré de ce que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

9. Compte tenu de ce qui précède, Mme A... n'est pas fondée à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

10 Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- Mme B..., président-assesseur,

- Mme Le Barbier premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2021.

Le rapporteur

C. B...

Le président

I. Perrot

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20NT019952


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01995
Date de la décision : 09/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : DUPLANTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-04-09;20nt01995 ?
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