Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2020 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé son transfert[CO1] aux autorités portugaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 2000149 du 14 janvier 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 juillet 2020, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 janvier 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2020 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé son transfert aux autorités portugaises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence ;
3°) d'enjoindre à la préfète d'Ille-et-Vilaine de l'admettre au séjour au titre de l'asile à compter de la date de notification de l'arrêt, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision de transfert :
- elle est insuffisamment motivée et le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle subira les manquements des autorités portugaises dans la prise en charge de sa demande d'asile et dans ses conditions matérielles d'accueil ; elle encourt des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine et sera soumise à des peines et traitements contraires aux dispositions de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a méconnu l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 car il aurait dû prendre en compte son parcours individuel en ce qui concerne son accès effectif à des traitements appropriés au Portugal dans le cadre des soins conseillés pour ses problèmes de santé.
En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :
- elle ne représente pas une menace grave à l'ordre public et, à ce titre, une décision d'assignation à résidence présente une atteinte grave à sa liberté d'aller et de venir et à sa liberté individuelle.
Vu la lettre du 28 juillet 2020 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert en raison de l'expiration du délai de 6 mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2020, la préfète d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.
Elle informe la cour de la prolongation du délai de transfert de Mme B... en raison de la fuite de l'intéressée et soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu le jugement attaqué.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juin 2020.
Vu la lettre du 10 novembre 2020, par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions nouvelles en appel dirigées contre l'arrêté du 9 janvier 2020 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé l'assignation à résidence de Mme B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante angolaise, entrée en France selon ses déclarations le 8 août 2019, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 13 août 2019. La consultation du fichier " Visabio " a révélé que l'intéressée était en possession d'un visa périmé depuis moins de 6 mois délivré par les autorités angolaises pour le Portugal. Les autorités portugaises ont été saisies, le 21 octobre 2019, d'une demande de prise en charge sur le fondement de l'article 12.4 du règlement UE n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013. Elles ont fait connaître leur accord le 18 décembre 2019. Par un arrêté du 9 janvier 2020, la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé de transférer l'intéressée aux autorités portugaises. Mme B... relève appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Il a été statué sur la demande d'aide juridictionnelle de Mme B... par une décision du 4 juin 2020. Par suite, les conclusions de la requérante tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions dirigées contre la décision de transfert :
3. En premier lieu, l'arrêté en litige portant transfert de Mme B... aux autorités portugaises comporte l'énoncé des motifs de fait et considérations de droit sur lesquelles il se fonde. Il est, par suite, suffisamment motivé. Contrairement à ce que soutient la requérante, la décision contestée fait état de la situation personnelle de Mme B... et la préfète d'Ille-et-Vilaine a procédé à un examen sérieux et complet de sa situation, en relevant notamment qu'il n'était pas établi à la lecture des éléments médicaux produits, que l'intéressée souffrirait d'une pathologie l'empêchant d'exécuter son transfert au Portugal, ni même que des soins ne puissent pas lui être apportés dans ce pays en cas de nécessité.
4. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales selon lesquelles : " Nul ne peut être soumis à la torture ni a des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
5. Si la requérante soutient qu'elle encourt des risques graves de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, la décision de transfert contestée n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner l'intéressée vers l'Angola. Par ailleurs, aucun élément ne permet d'affirmer que la demande d'asile de Mme B... serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités portugaises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de transfert en litige serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précitées.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 visé : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. "
7. La préfète d'Ille-et-Vilaine, qui a visé les dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013, a indiqué que la situation de Mme B... ne relevait pas des dérogations prévues par cet article du règlement et qu'elle n'établissait pas l'existence de risques personnels constituant une atteinte grave au droit d'asile en cas de remise aux autorités portugaises. Il ressort des pièces du dossier que les problèmes médicaux de l'intéressée, en l'occurrence une lombosciatique et un diabète de type 2 attestés par un certificat médical du 5 septembre 2019, ne sont pas, en eux-mêmes, de nature à faire obstacle à son transfert vers le Portugal, dès lors qu'il n'est pas établi que l'intéressée ne pourrait pas recevoir des soins appropriés à son état dans ce pays. Dans ces conditions, la préfète d'Ille-et-Vilaine, en s'abstenant de mettre en oeuvre la possibilité que la France examine sa demande d'asile, n'a pas entaché son arrêté au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Sur les conclusions dirigées contre la décision d'assignation à résidence :
8. Les conclusions de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 janvier 2020 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé son assignation à résidence pour une durée de 45 jours, présentées directement devant la cour sont nouvelles en appel et comme telles irrecevables. Elles ne peuvent qu'être rejetées.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par la requérante ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 19 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gelard, premier conseiller,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2021.
Le rapporteur,
F. A... Le président,
O. COIFFET
La greffière,
P. CHAVEROUX La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
[CO1]Le terme remise est à bannir selon OCC il renvoie à un autre article du règlement européen !!!
N° 20NT02090 2