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23/03/2021 | FRANCE | N°19NT03364

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 23 mars 2021, 19NT03364


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2019 du préfet du Finistère refusant de l'admettre au séjour, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de réexaminer sa situation, enfin de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1901264 du 17 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa deman

de.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2019 du préfet du Finistère refusant de l'admettre au séjour, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de réexaminer sa situation, enfin de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1901264 du 17 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 16 août 2019 et 11 juin 2020, M. B... représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) de lui allouer le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 17 juin 2019 ;

3°) d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2019 du préfet du Finistère ;

4°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa situation administrative ;

5°) de mettre à la charge de l'État, le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué, qui est insuffisamment motivé, est entaché d'irrégularité ;

- l'arrêté du 14 janvier 2019 du préfet du Finistère est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'application des dispositions de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les conditions tenant au fait que la demande soit faite dans les trois mois qui suivent son arrivée en France et qu'il justifie de ressources suffisantes n'étaient pas remplies ;

- l'arrêté du 14 janvier 2019 a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 mai 2020, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle (25 %) par une décision du 16 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant burkinabé, titulaire d'un titre de séjour de longue durée délivré par les autorités italiennes en 2008, est entré irrégulièrement en France en 2013 selon ses déclarations. Il a sollicité, en mai 2016, la délivrance d'un titre de séjour salarié, sur le fondement du 5° de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 janvier 2019, le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer le titre demandé et a ordonné sa remise aux autorités italiennes.

2. M. B... a, le 13 mars 2019, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Il relève appel du jugement du 17 juin 2019 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle (25 %) par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 16 septembre 2019. Par suite, ses conclusions tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet. Il n'y a ainsi pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger titulaire de la carte de résident de longue durée-UE définie par les dispositions communautaires applicables en cette matière et accordée dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins et, le cas échéant, à ceux de sa famille ainsi que d'une assurance maladie obtient, sous réserve qu'il en fasse la demande dans les trois mois qui suivent son entrée en France et sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée : (...) / 5° Une carte de séjour temporaire portant la mention de l'activité professionnelle pour laquelle il a obtenu l'autorisation préalable requise, dans les conditions définies, selon le cas, aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 313-10. (...) ". Aux termes de l'article L.531-1 du même code : " I. - Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1 et L. 311-1 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne, en vigueur au 13 janvier 2009. (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui reconnaît lui-même être entré en France en 2013, notamment en produisant à l'appui de sa demande, des bulletins de salaire à compter du mois de juillet 2013, n'a présenté une demande de titre de séjour qu'en 2016. Si le requérant indique être retourné entre temps au Burkina Faso et être entré pour la dernière fois en France le 29 février 2016, il ressort des pièces du dossier qu'il y était présent en 2013, 2014 et 2015 et y travaillait de manière habituelle. Dans ces conditions, la seule circonstance qu'il ait rejoint son pays pour un court séjour de moins de deux mois, entre la fin du mois de décembre 2015 et le mois de février 2016, n'est pas de nature à établir qu'il doit être regardé comme étant, au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, entré en France en 2016 et qu'il aurait ainsi présenté sa demande de titre de séjour dans les trois mois qui suivent son entrée sur le territoire français. Il ne peut ainsi utilement se réclamer de son retour en France le 29 février ou le 3 mars 2016, comme il l'avance, au regard du dépôt le 29 février 2016 de sa demande de titre de séjour auprès des services préfectoraux. C'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont estimé que le préfet du Finistère n'avait pas méconnu sur ce point les dispositions de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ce motif tiré de la présentation tardive de la demande de titre de séjour par M. B... était suffisant pour fonder le refus qui lui a été opposé par l'arrêté préfectoral contesté. La circonstance qu'il justifierait en appel, par la production de ses bulletins de salaire pour l'année 2018, éléments postérieurs à sa demande de titre du 26 mai 2016 et qui ne sont, au demeurant, accompagnés d'aucune autorisation de travail, de ressources stables et suffisantes demeure sans incidence sur la légalité la décision contestée, intervenue le 14 janvier 2019.

6. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui est né le 1er janvier 1966 au Burkina Faso, est entré irrégulièrement en France en 2013 à l'âge de 47 ans où il s'est maintenu irrégulièrement jusqu'à sa demande de titre de séjour le 26 mai 2016. S'il présente à la Cour un contrat de travail à temps partiel à durée indéterminée et des bulletins de salaire pour certains mois des années 2014, 2015 et 2016, il ne justifie pas cependant avoir exercé une activité professionnelle en France de façon régulière faute de produire un contrat de travail relatif à ses activités passées et une autorisation de travail. M. B... est célibataire, sans charge de famille en France et n'établit pas y avoir d'attaches particulières en dehors de son travail, même s'il donne satisfaction à son employeur et s'investit notamment dans une association de soutien d'un village burkinabé. Les éléments versés au débat sont insuffisants pour établir l'intensité de son intégration dans la société française. Il ne démontre pas, par ailleurs, être dépourvu d'attaches familiales à l'étranger où il a vécu une cinquantaine d'années. Dans ces conditions, le préfet du Finistère qui n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a pris la décision contestée n'a, ainsi, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'admission provisoire de M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président,

- M. A..., président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 23 mars 2021.

Le rapporteur

O. A... Le président

O. GASPON

Le greffier

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19NT03364 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03364
Date de la décision : 23/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : TREMOUILLES

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-03-23;19nt03364 ?
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