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16/03/2021 | FRANCE | N°20NT02467

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 16 mars 2021, 20NT02467


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet du Loiret a ordonné son transfert aux autorités italiennes et l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel il l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours dans le département d'Indre-et-Loire.

Par un jugement n° 2002186 du 8 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :>
Par une requête, enregistrée le 10 août 2020, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet du Loiret a ordonné son transfert aux autorités italiennes et l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel il l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours dans le département d'Indre-et-Loire.

Par un jugement n° 2002186 du 8 juillet 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 août 2020, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) à titre subsidiaire, de fixer à deux fois par semaine la période de présentation au commissariat de Tours de M. D....

Il soutient que :

- le préfet a méconnu l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il rencontre des difficultés de santé qui nécessitent un suivi régulier et qu'il réside sur le territoire français avec son épouse ainsi que sa fille et sa petite fille qui disposent d'un titre de séjour ;

- la mesure d'assignation à résidence doit être annulée dès lors qu'il justifie d'une adresse ce qui constitue une garantie ; à titre subsidiaire, la présentation à raison de quatre fois par semaine est disproportionnée au regard de ses problèmes de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2020, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et précise que le délai de transfert est prolongé jusqu'au 8 janvier 2021.

Par un courrier du 15 janvier 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête à fin d'annulation de la décision de transfert en raison de l'expiration du délai de six mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n°604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire, enregistré le 18 janvier 2021, le préfet du Loiret conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert.

Il fait valoir que l'arrêté décidant du transfert de M. D... aux autorités italiennes n'a pas été exécuté dans le délai de six mois et que les autorités françaises sont devenues responsables de l'examen de sa demande d'asile.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ressortissant russe, né le 3 novembre 1956, relève appel du jugement du 8 juillet 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet du Loiret a décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du 26 juin 2020 l'assignant à résidence.

Sur l'arrêté de transfert aux autorités italiennes :

2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".

3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet du Loiret pour procéder à l'exécution du transfert de M. D... vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration du jugement du 8 juillet 2020 rendu par ce dernier. Il ressort des pièces du dossier que cet arrêté n'a pas reçu exécution pendant la période de validité du délai prolongée jusqu'au 8 janvier 2021, ainsi que l'indique le préfet. Par suite, la décision de transfert litigieuse est devenue caduque sans avoir reçu de commencement d'exécution à la date du présent arrêt et la France est devenue responsable de la demande d'asile sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n°604-2013 rappelées ci-dessus. Par suite, les conclusions de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert et du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre cet arrêté sont devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur la décision d'assignation à résidence :

5. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (...) Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis./ L'article L. 551-1 est applicable lorsqu'un étranger assigné à résidence en application du présent article : a) Ne présente plus de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 ; b) Présente un risque non négligeable de fuite, tel que défini aux 1° à 12° du II de l'article L. 551-1, dans le cas d'un étranger faisant l'objet d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 précité, ou d'une décision de transfert notifiée conformément à l'article L. 742-3 (...) ".

6. Par arrêté du 26 juin 2020, le préfet du Loiret a assigné M. D... à résidence dans le département d'Indre-et-Loire pour une durée de 45 jours et l'a astreint à se présenter du lundi au jeudi à 14h30 au commissariat de Tours. La circonstance que le requérant dispose d'un logement constitutif d'une garantie de représentation n'est pas de nature à établir que cet arrêté, qui adopte une mesure plus favorable qu'une mesure de rétention administrative, est entaché d'illégalité.

7. Par ailleurs, dès lors que les difficultés de santé évoquées par le requérant ne sont pas établies, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision l'obligeant à se rendre au commissariat de Tours quatre fois par semaine serait disproportionnée au regard de son état de santé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision d'assignation à résidence.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. D... aux fins d'annulation en tant qu'elles se rapportent à l'arrêté de transfert.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée pour information au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 19 février 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2021.

Le rapporteur, Le président,

F. C... O. GASPON

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20NT024672

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02467
Date de la décision : 16/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : CARROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-03-16;20nt02467 ?
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