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26/02/2021 | FRANCE | N°20NT01608

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 26 février 2021, 20NT01608


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

­ le code de l'urbanisme ;

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant la SAS Investir immobilier Normandie et de Me H..., représentant la commune de Caen.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Investir immobilier Nor

mandie et la SAS Safaur ont déposé une demande de permis de construire en vue de l'édification, après démolition, d'un ...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

­ le code de l'urbanisme ;

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant la SAS Investir immobilier Normandie et de Me H..., représentant la commune de Caen.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Investir immobilier Normandie et la SAS Safaur ont déposé une demande de permis de construire en vue de l'édification, après démolition, d'un ensemble immobilier comprenant 167 logements et 196 places de stationnement, répartis en quatre lots (A, B, C et D) d'une hauteur maximale R+4, pour une surface de plancher de 10 532 m², sur des parcelles situées, à Caen, aux n°s 4 et 6 de la rue Saint-Nicolas, à l'angle que celle-ci forme avec la rue Saint-Gabriel. M. et Mme F... et M. et Mme E... ont demandé, ensemble, au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 17 avril 2020, le tribunal administratif après avoir rejeté la demande pour irrecevabilité en tant qu'elle était présentée par M. et Mme E..., a fait ensuite droit à cette demande en tant qu'elle était présentée par M. et Mme F... en annulant le permis de construire en litige. La SAS Safaur, la SAS Investir Immobilier Normandie et la commune de Caen relèvent appel de ce jugement.

2. Les requêtes n°s20NT01608, 20NT01644 et 20NT01652, présentées respectivement pour la SAS Safaur, la SAS Investir Immobilier Normandie et la commune de Caen sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la recevabilité de la demande de première instance présentée par M. et Mme F... :

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

5. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. et Mme F... ont produit un acte notarié dont il résulte qu'ils sont propriétaires de la parcelle cadastrée section IL n°532, située au n°3 de la rue Saint-Gabriel. Cette parcelle jouxtant le terrain d'assiette du projet, ils se présentent ainsi, comme voisins immédiats. Pour nier tout intérêt à agir aux requérants, la SAS Safaur et la commune de Caen allèguent qu'ils ne subiront aucune perte de vue dès lors que les constructions projetées auront une hauteur inférieure à celle des bâtiments qui seront détruits et que les plantations prévues au droit de leur propriété ainsi que le caractère arboré de leur jardin permettront de masquer les constructions. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande de permis de construire, que l'assiette du projet était occupée par des bâtiments à usage de bureaux et des constructions annexes, ainsi qu'un parc de stationnement à usage privatif qui seront démolis. Le projet en litige va accroître l'urbanisation du secteur par la création d'un ensemble immobilier comportant 167 logements et 196 places de stationnement dont une voie de desserte est prévue sur la rue Saint-Gabriel, non loin de la propriété de M. et Mme F.... Ces derniers faisaient notamment valoir que la réalisation d'un tel projet aura pour effet d'augmenter les conditions de circulation dans le secteur qui vont être profondément perturbées et qu'ils subiront, de ce fait, des nuisances sonores et visuelles. M. et Mme F... ont ainsi établi que le projet, par sa nature, son importance et sa localisation, était susceptible de porter atteinte aux conditions dans lesquelles ils occupent leur bien. Par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a reconnu l'intérêt à agir de M. et Mme F....

Sur les conclusions à fin d'annulation :

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans contenus dans la demande de permis de construire, que le terrain d'assiette du projet est situé pour l'essentiel en zone UA, secteur b (UAb), du plan local d'urbanisme et, pour le reste, en zone UB s'agissant des deux parties du terrain en décroché extérieur au nord-ouest qui correspondent aux lots A et D 5.

7. Selon le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la ville de Caen, le titre I de ce document regroupe les " définitions de termes employés dans le règlement de chaque zone. Ces définitions, à valeur réglementaire, s'appliquent sur l'intégralité du territoire couvert par le PLU " et précise que, compte tenu de leur valeur réglementaire " il n'y a pas lieu de [les] reproduire dans le règlement de chaque zone ". S'agissant de la bande dite de constructibilité principale, elles sont " applicables le long des voies, telles qu'elles sont définies dans le présent titre, et dès lors : / qu'elles ont une largeur supérieure à 3,50 mètres pour les voies existantes et nouvelles (...) / et, en outre, pour les voies nouvelles qu'elles participent au maillage viaire général de la ville, ce qui exclut les voies en impasse. / (...) La profondeur de la bande de constructibilité principale, qui est fixée dans le règlement de zone, est mesurée perpendiculairement par rapport : / - soit à l'alignement, tel qu'il est défini dans le présent titre ; - soit au recul imposé par les dispositions écrites du règlement de zone ou graphiques. / Sur chaque terrain, s'appliquent uniquement les bandes de constructibilité principale des voies sur lesquelles aboutissent les limites séparatives latérales du terrain d'assiette de la construction ". Selon ce même règlement, un terrain est " une unité foncière d'un seul tenant, composé d'une ou plusieurs parcelles cadastrales, délimité par les voies et autres propriétés qui le cernent " et sont considérés comme des voies " les espaces publics ou privés, existants, à modifier ou à créer qui peuvent assurer la desserte automobile, cyclable ou piétonne du terrain d'assiette de la construction, d'un alignement à l'autre de la voie. ". L'alignement y est défini, par ailleurs, comme " Selon le cas : / - la limite entre la propriété privée et le domaine public ; /- la limite d'une future voie ou place (...) prévus dans le cadre d'un projet de construction et destinées à être ouverte en permanence au public ;/ - la limite d'emprise d'une voie privée (...) " et la limite séparative latérale comme la " limite entre deux terrains aboutissant à l'alignement ".

8. Par ailleurs, les articles 7 du règlement du plan local d'urbanisme applicables aux zones UA et UB prévoient notamment que, conformément à l'alinéa 3 de l'article R.151-21 du code de l'urbanisme, dans le cadre de la construction, sur une unité foncière ou sur plusieurs unités foncières contiguës, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, les règles d'implantation seront appliquées lot par lot. Ils fixent, par ailleurs, en secteur UAb et sur toute la zone UB, à treize mètres la profondeur de la bande de constructibilité principale.

9. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles formant l'assiette du projet sont exclusivement bordées par la rue Saint-Nicolas et la rue Saint-Gabriel, situées en zone UAb, lesquelles déterminent les limites séparatives latérales à prendre en compte afin d'apprécier la profondeur de treize mètres de la bande de constructibilité dont bénéficie le projet. Selon les plans joints à la demande de permis de construire, et par application des principes définis au titre I du PLU de la ville de Caen tels que rappelés au point 7, le terrain d'assiette comporte deux limites séparatives latérales extérieures : l'une, rectiligne, perpendiculaire à la rue Saint-Nicolas, l'autre qui comprend deux décrochés destinés à l'implantation des immeubles A et D 5, perpendiculaire à la rue Saint-Gabriel. Conformément à l'article 7 du règlement applicable à la zone UAb, la bande de constructibilité principale court le long de ces deux voies sur une largeur de treize mètres, celle donnant sur la rue Saint-Gabriel étant, par ailleurs, interrompue par les propriétés jumelles de M. et Mme F... et de M. et Mme E....

10. Les requérantes soutiennent qu'il convient également de prendre en compte, pour fixer la largeur de la bande de constructibilité principale, la voie de desserte qu'il est prévu de créer à l'intérieur de l'ensemble immobilier projeté, laquelle est identifiée dans le plan de zonage du plan local d'urbanisme. Toutefois, la légalité d'un permis de construire doit s'apprécier au regard de la situation de fait existant à la date à laquelle il est délivré, quand bien même peuvent être pris en compte les projets dont la réalisation est suffisamment certaine. Les intéressées ne sauraient utilement se prévaloir de la voie identifiée dans le plan de zonage comme " voie à créer ", dont il résulte au demeurant du rapport de présentation que celles qui y sont identifiées ont pour objet de renforcer les liaisons interquartiers, dès lors que celle inscrite dans le plan de zonage est destinée à relier la rue Saint-Gabriel à la rue Alphonse et Léonard Gille permettant ainsi d'étendre, pour tous les usagers de la voie publique, le réseau viaire jusqu'à la rue d'Hastings alors que celle prévue dans le cadre du permis de construire est une simple voie créée au sein de l'ensemble immobilier afin d'assurer la desserte de ses futurs habitants. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation de la voie prévue dans le cadre du permis de construire en litige était déjà suffisamment certaine pour être autorisée. Les requérantes ne sauraient, par suite, se prévaloir des droits à construire qui résulteraient de la voie à créer pour la mise en oeuvre du permis de construire accordé. Pour le même motif, elles ne sont également pas fondées à se prévaloir de ce que le règlement du plan local d'urbanisme prévoit une application des règles d'implantation lot par lot dès lors que la mise en oeuvre de cette règle nécessite de prendre en compte la voie à créer. Au surplus, cette voie privée n'ayant que pour seul objet d'assurer la desserte des futurs habitants de l'ensemble immobilier, elle ne saurait être regardée, pour l'application et au sens des règles définies dans le règlement du plan local d'urbanisme et rappelées au point 7, comme une voie nouvelle participant au maillage viaire général de la ville et de nature à pouvoir générer une bande de constructibilité principale.

11. Par suite, la SAS Safaur et la commune de Caen ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, pour l'application et au sens du règlement du plan local d'urbanisme, le tribunal administratif a retenu que le terrain d'assiette ne comporte que deux bandes de constructibilité principale d'une largeur de treize mètres situées le long des rues Saint-Nicolas et Saint-Gabriel.

12. D'une part, aux termes du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone UB : " 7.2.2 Règle générale / Les constructions ou parties de construction situées au-delà de la bande de constructibilité principale doivent être implantées en retrait des limites séparatives. / (...) 7.2.3 Règles de retrait / Le retrait de la construction ou partie de construction implantée au-delà de la bande de constructibilité principale, doit être au moins égal à la hauteur de la façade ou partie de façade de la construction (R = H) ".

13. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la demande de permis de construire, que le bâtiment A, situé en zone UB, est implanté en dehors de toute bande de constructibilité principale. Il résulte des dispositions précitées que le retrait par rapport aux limites séparatives doit correspondre à une distance au moins égale à la hauteur de sa façade ou partie de façade, soit, en l'espèce, 12,40 mètres minimum. Il est constant, ainsi qu'il résulte des plans contenus dans la demande de permis de construire, notamment du plan de conformité A02, que, pour ce bâtiment, le recul maximal par rapport à la plus lointaine des limites séparatives est inférieur à 9 mètres, ce qui méconnaît les règles d'implantation prévues par les dispositions de l'article UB 7.

14. D'autre part, aux termes de l'article 9 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone UA concernant l'emprise au sol des constructions : " 9.1 Règle générale / 9.1.1 Dans la zone UA et les secteurs UAb, UAc et UAd et le sous-secteur UAat / Le coefficient, maximal, d'emprise au sol maximal des constructions est différent pour les terrains ou parties de terrain situés dans la bande de constructibilité principale ou au-delà de celle-ci. / Dans la bande de constructibilité principale / Le coefficient d'emprise au sol maximal des constructions est de 100%. Au-delà de la bande de constructibilité principale / (...) Dans les secteurs UAb et UAd, le coefficient d'emprise au sol des constructions est limité à 30%. (...) ". Aux termes de l'article 9 du règlement du plan local d'urbanisme applicable à la zone UB concernant l'emprise au sol des constructions : " Le coefficient, maximal, d'emprise au sol des constructions est différent pour les terrains ou parties de terrain situés dans la bande de constructibilité principale ou au-delà de celle-ci. / Dans la bande de constructibilité principale / Le coefficient d'emprise au sol maximal des constructions est de 100%. / Au-delà de la bande de constructibilité principale Dans la zone UB, le coefficient d'emprise au sol des constructions est limité à 30% (...) ".

15. Il résulte de ces dispositions que le coefficient maximal d'emprise au sol est, dans le secteur UAb comme dans la zone UB, de 100 % à l'intérieur des bandes de constructibilité principale et limité à 30 % au-delà. Il ressort des plans du dossier que les surfaces au sol des bâtiments A, B1, C1 et D4, situés en dehors des bandes de constructibilité principale, excèdent cette limite de 30 %. Il suit de là que les articles UA 9 et UB 9 du règlement du plan local d'urbanisme ont été méconnus.

Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :

16. D'une part, aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. "

17. Lorsque les éléments d'un projet de construction ou d'aménagement auraient pu faire l'objet d'autorisations distinctes, le juge de l'excès de pouvoir peut prononcer l'annulation partielle de l'arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux. Les dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme lui permettent en outre de procéder à l'annulation partielle d'une autorisation d'urbanisme qui n'aurait pas cette caractéristique, dans le cas où l'illégalité affectant une partie identifiable d'un projet de construction ou d'aménagement est susceptible d'être régularisée par un permis modificatif. Il en résulte que, si l'application de ces dispositions n'est pas subordonnée à la condition que la partie du projet affectée par ce vice soit matériellement détachable du reste de ce projet, elle n'est possible que si la régularisation porte sur des éléments du projet pouvant faire l'objet d'un permis modificatif. Un tel permis ne peut être délivré que si, d'une part, les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés - sans que la partie intéressée ait à établir devant le juge l'absence d'achèvement de la construction ou que celui-ci soit tenu de procéder à une mesure d'instruction en ce sens - et si, d'autre part, les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne peuvent être regardées, par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale. A ce titre, la seule circonstance que ces modifications portent sur des éléments tels que son implantation, ses dimensions ou son apparence ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce qu'elles fassent l'objet d'un permis modificatif.

18. D'autre part, aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

19. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée, sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation. Il invite au préalable les parties à présenter leurs observations sur la possibilité de régulariser le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme. Le juge n'est toutefois pas tenu de surseoir à statuer, d'une part, si les conditions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme sont réunies et qu'il fait le choix d'y recourir, d'autre part, si le bénéficiaire de l'autorisation lui a indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.

20. En l'espèce, compte tenu des motifs d'annulation retenus et de l'impossibilité de prendre en compte la voie à créer pour générer une nouvelle bande de constructibilité principale, et ainsi que l'a au demeurant jugé le tribunal administratif dans le jugement attaqué sans que la SAS Investir Immobilier Normandie n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait été fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce, il ne pourrait être remédié aux vices tirés de la méconnaissance des articles UA 9, UB 7 et UB 9 du plan local d'urbanisme sans apporter au projet, eu égard à la nature et l'ampleur des modifications à mettre en oeuvre, un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même et remettrait en cause sa conception générale. L'arrêté contesté ne peut donner lieu, par suite, ni à une annulation partielle, ni à un sursis à statuer dans l'attente de sa régularisation. Il suit de là que les conclusions de la SAS Investir Immobilier Normandie tendant à l'application des dispositions des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne peuvent être que rejetées.

21. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé le permis de construire du maire de Caen du 10 août 2018.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme F..., qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, les sommes que la SAS Safaur, la SAS Investir Immobilier Normandie et la commune de Caen demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la SAS Safaur, de la SAS Investir Immobilier Normandie et de la commune de Caen sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la SAS Safaur, de la SAS Investir Immobilier Normandie et de la commune de Caen tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Safaur, à la SAS Investir Immobilier Normandie, à la commune de Caen et à M. et Mme F....

Copie en sera adressée pour leur information au préfet du Calvados et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Caen.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme B..., présidente assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 février 2021.

Le rapporteur,

M. G...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

2

N°s 20NT01608, 20NT01644, 20NT01652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01608
Date de la décision : 26/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL SALMON BAUGE ALEXANDRE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-02-26;20nt01608 ?
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