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02/02/2021 | FRANCE | N°18NT04421

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 02 février 2021, 18NT04421


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2016 par lequel le maire de la commune de Châteaudun a prononcé son licenciement ainsi que la décision du 12 mai 2016 portant rejet de son recours gracieux et d'ordonner sa réintégration et la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'autre part, de co

ndamner cette commune à lui verser une somme de 33,71 euros par jour à compte...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'une part, d'annuler l'arrêté du 9 mars 2016 par lequel le maire de la commune de Châteaudun a prononcé son licenciement ainsi que la décision du 12 mai 2016 portant rejet de son recours gracieux et d'ordonner sa réintégration et la reconstitution de sa carrière et de ses droits à pension dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'autre part, de condamner cette commune à lui verser une somme de 33,71 euros par jour à compter du 24 mai 2016 jusqu'à sa réintégration au sein de la collectivité, une somme de 392,05 euros au titre des congés non pris, une somme de 53 euros au titre des frais exposés pour le suivi psychologique, une indemnité de 15 000 euros au titre de son préjudice moral, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1602217 du 16 octobre 2018, le tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, annulé l'arrêté du 9 mars 2016 et la décision du 12 mai 2016 et enjoint à la commune de Châteaudun de réintégrer M. C... et de reconstituer sa carrière à compter du 16 avril 2016 et ce dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, d'autre part, ordonné un supplément d'instruction avant de statuer sur les préjudices tenant aux pertes de revenus et au préjudice moral subis par celui-ci, enfin rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de l'intéressé.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire, enregistrée le 17 décembre 2018, et des mémoires, présentés les 18 décembre 2018 et 21 janvier 2019, la commune de Châteaudun, représentée par la SCP Thouvenin, Coudray et Grevy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 16 octobre 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif d'Orléans par M. C... ;

3°) de mettre à la charge de M. C... le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué qui méconnait l'article R.741-7 du code de justice administrative est irrégulier faute d'avoir été signé par les magistrats qui l'ont rendu ;

- sur le fond, le licenciement de M. C... est justifié compte tenu des carences relevées dans l'organisation des tâches de son service, des manquements constatés notamment dans le suivi du fleurissement de la commune - rapports incomplets et remis tardivement - de la mauvaise préparation du dossier de consultation des entreprises et du mauvais suivi des travaux réalisés par des entreprises extérieures, de l'utilisation des produits phytosanitaires, de l'organisation de son service sur les espaces verts relevant de l'office public de l'habitat, difficultés qui ont été confirmées par ses notations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2019, M. C..., représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 500 euros soit mise à la charge de la commune de Châteaudun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le décret n°2006-1690 du 22 décembre 2006 ;

- le décret n° 2010-1357 du 9 novembre 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... a été recruté par la commune de Châteaudun par voie de mutation, en qualité de contrôleur de travaux, à compter du 9 janvier 2007. Nommé technicien territorial principal de 2ème classe depuis le 1er juillet 2013, il occupait le poste de responsable du service des espaces verts de cette collectivité. Par un courrier du 11 août 2015, le maire de la commune de Châteaudun, estimant que cet agent n'accomplissait pas de manière satisfaisante ses fonctions, l'a informé de son intention de procéder à son licenciement pour insuffisance professionnelle. Après un avis défavorable au licenciement envisagé, rendu par la commission administrative paritaire, le maire de la commune a, par un arrêté du 9 mars 2016, prononcé le licenciement de M. C... pour insuffisance professionnelle. Le recours gracieux présenté par l'intéressé a été rejeté par une décision du 12 mai 2016. M. C... a, le 8 juillet 2016, saisi le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant à l'annulation de ces deux décisions et à la condamnation de la commune à lui verser différentes sommes et indemnités.

2. Par un jugement du 16 octobre 2018, cette juridiction a, d'une part, annulé l'arrêté du 9 mars 2016 et la décision du 12 mai 2016 et enjoint au maire de la commune de Châteaudun de réintégrer M. C... et de reconstituer sa carrière à compter du 16 avril 2016 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, d'autre part, ordonné un supplément d'instruction avant de statuer sur les préjudices tenant aux pertes de revenus et au préjudice moral subis par celui-ci, enfin rejeté le surplus des conclusions indemnitaires de l'intéressé. La commune relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article R 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué en date du 16 octobre 2018 comporte les signatures exigées par ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce que ce jugement serait entaché d'irrégularité au regard de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 mars 2016 :

4. Aux termes de l'article 2 du décret du 9 novembre 2010 visé ci-dessus : " I. _ Les membres du cadre d'emplois des techniciens territoriaux sont chargés, sous l'autorité d'un supérieur hiérarchique, de la conduite des chantiers. Ils assurent l'encadrement des équipes et contrôlent les travaux confiés aux entreprises. Ils participent à la mise en oeuvre de la comptabilité analytique et du contrôle de gestion. Ils peuvent instruire des affaires touchant l'urbanisme, l'aménagement, l'entretien et la conservation du domaine de la collectivité. Ils participent également à la mise en oeuvre des actions liées à la préservation de l'environnement. Ils assurent le contrôle de l'entretien et du fonctionnement des ouvrages ainsi que la surveillance des travaux d'équipements, de réparation et d'entretien des installations mécaniques, électriques, électroniques ou hydrauliques. Ils peuvent aussi assurer la surveillance du domaine public. A cet effet, ils peuvent être assermentés pour constater les contraventions. Ils peuvent participer à des missions d'enseignement et de formation professionnelle. II. - Les titulaires des grades de technicien principal de 2e et de 1re classe ont vocation à occuper des emplois qui, relevant des domaines d'activité mentionnés au I, correspondent à un niveau d'expertise acquis par la formation initiale, l'expérience professionnelle ou par la formation professionnelle tout au long de la vie. Ils peuvent assurer la direction des travaux sur le terrain, le contrôle des chantiers, la gestion des matériels et participer à l'élaboration de projets de travaux neufs ou d'entretien. Ils peuvent procéder à des enquêtes, contrôles et mesures techniques ou scientifiques. Ils peuvent également exercer des missions d'études et de projets et être associés à des travaux de programmation. Ils peuvent être investis de fonctions d'encadrement de personnels ou de gestion de service ou d'une partie de services dont l'importance, le niveau d'expertise et de responsabilité ne justifient pas la présence d'un ingénieur. ".

5. Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent ni qu'elle ait persisté après qu'il a été invité à remédier aux insuffisances constatées.

6. Il ressort des pièces du dossier que pour prononcer, par l'arrêté du 9 mars 2016, le licenciement pour inaptitude professionnelle de M. C..., technicien territorial principal de 2ème classe, le maire de la commune de Châteaudun a retenu que cet agent aurait fait preuve de graves manquements dans l'exécution des tâches qui lui ont été confiées attestant d'une incapacité de sa part à remplir ses fonctions de manière satisfaisante. Ont ainsi été expressément évoquées, dans les motifs de l'arrêté portant licenciement, des carences de cet agent dans l'organisation des tâches de son service et en particulier de l'entretien des espaces verts, dans l'encadrement et l'organisation de l'équipe dont il avait la charge, dans la conception, la réalisation et le suivi du fleurissement de la ville, dans la préparation des dossiers de consultation d'entreprises et le suivi des interventions de celles-ci, dans l'utilisation de produits phytosanitaires et dans l'organisation de l'intervention de son service sur les espaces appartenant à l'OPH.

S'agissant de l'organisation de l'entretien des espaces verts et de l'encadrement de l'équipe placée sous l'autorité de M. C... :

7. Pour retenir ce premier grief à l'encontre de M. C..., la commune se réfère tout d'abord à des courriels datant de mai 2009, juillet et octobre 2010 qui font état de plaintes reçues au mois de juillet 2010 relatives au mauvais entretien des espaces verts de la ville et des cimetières trouvant sa cause dans la mauvaise organisation du service, en particulier dans la planification des congés des chefs de secteur. Or il est constant que cette situation a donné lieu à un avertissement infligé à cet agent le 14 octobre 2010 et qu'aucune autre critique n'a par la suite été adressée à M. C... par son supérieur ou l'équipe municipale, dont le renouvellement a eu lieu après le scrutin de mars 2014 débouchant sur l'élection d'un nouveau maire. M. C... produit à cet égard des témoignages établis en septembre et octobre 2015 émanant de l'ancien maire, de son 1er adjoint pendant six ans, du directeur de la communication et des relations publiques, du directeur des services techniques de juin 2012 à septembre 2013, relevant l'organisation complexe des services et la grande quantité de travaux divers et variés à accomplir et soulignant, au-delà des qualités humaines de l'intéressé, son professionnalisme, sa force de proposition, le fait qu'il avait su adapter les techniques de gestion et le mode de travail des équipes permettant d'obtenir la distinction dite de " Troisième fleur " pour la ville. Ensuite, à l'appui de ce premier grief, la commune verse aux débats un courriel du mois de juin 2014 relatif à l'environnement non entretenu autour de la Mosquée turque, deux courriels des mois d'avril et mai 2015 relevant le retard pris dans l'entretien des espaces verts et deux plaintes d'habitants déplorant, pour l'une d'entre elle, l'absence d'entretien du talus situé à côté de la maison de son auteur, et, pour l'autre, l'absence d'entretien de " l'espace vert " situé juste à côté de l'entrée de son auteur. Si ces problèmes ponctuels d'inégale importance sont réels, il y a lieu de constater que pour optimiser la gestion des espaces verts de la commune, la précédente municipalité avait demandé à M. C... qu'il organise les équipes du service des espaces verts en fonction du type d'activité. L'intéressé avait alors proposé la désignation d'un agent de maîtrise principal encadrant l'ensemble des équipes et organisé le service autour de six équipes, d'un agent s'occupant de l'entretien des cimetières et un autre s'occupant du fauchage. Toutefois, en septembre 2014, la nouvelle municipalité a souhaité, quant à elle, dans le cadre du projet de sectorisation, la mise en oeuvre d'une organisation différente. Cependant, et alors, comme l'ont justement estimé les premiers juges et contrairement à ce que persiste à soutenir la commune devant la Cour, que cette mission de conception d'un programme d'intervention des services affectés aux espaces verts à l'année ne fait pas partie des missions qui peuvent être confiées à un membre du corps des techniciens territoriaux en vertu des dispositions de l'article 2 précitées du décret du 9 novembre 2010, M. C... a présenté le 11 décembre 2014 une nouvelle organisation précise et détaillée, jugée " inacceptable " par l'autorité municipale. Prenant acte de ce désaccord, cet agent a, dès le 19 décembre 2014, remis une nouvelle proposition à l'autorité municipale jugée cette fois non satisfaisante en l'absence d'une liste détaillée des tâches à réaliser - détail des surfaces de pelouse à tondre, de massifs d'arbustes à tailler, de massifs fleuris à entretenir, d'arbres à tailler, de linéaires de haies à tailler ou de trottoirs à désherber, surfaces devant être traitées avec des produits phytopharmaceutiques - permettant d'apprécier la répartition du personnel ou l'affectation du matériel. Or, il ressort des éléments du dossier que le recueil de l'ensemble de ces informations nécessitait un travail extrêmement chronophage de relevé et de métré impliquant le recours au bureau de dessin de la ville, et de ses deux agents, seuls formés au logiciel " Autocad ", mais dont les nouvelles responsabilités avait réduit la disponibilité. Si M. C..., qui avait conscience que la demande en question portant sur des informations et relevés très précis nécessitant l'utilisation de logiciels spécifiques excédait ses attributions, a lors de son évaluation du 17 décembre 2015 demandé à être formé à un logiciel spécifique pour espace vert " Jardicad ", cette situation a provoqué des tensions avec sa hiérarchie. En désaccord d'ailleurs avec les observations du compte-rendu d'entretien professionnel du 17 décembre 2015, il a saisi d'une demande de révision la commission administrative paritaire laquelle, à l'unanimité, y a répondu favorablement en soulignant " l'absence d'argumentaire de la part de l'évaluateur aux appréciations portées sur le compte-rendu ". Enfin, si la commune fait état " de plaintes émanant des agents de son service " concernant l'organisation et la gestion des matériels, cette critique n'est, au vu des pièces du dossier, étayée que par un seul témoignage d'un agent évoquant un manque d'outillage pour l'entretien des trottoirs mais ensuite informé que ce matériel se trouvait à sa disposition au centre technique municipal. En définitive, l'ensemble des éléments qui viennent d'être rappelés ne saurait démontrer, eu égard notamment aux missions incombant à un technicien principal, l'insuffisance reprochée à M. C... en matière d'organisation du travail du service des espaces verts.

S'agissant de la conception, de la réalisation et du suivi du fleurissement de la commune :

8. Il ressort des pièces du dossier que le projet de fleurissement pour l'année 2014 a été arrêté par la précédente municipalité mais qu'à la suite de l'élection de la nouvelle équipe municipale au printemps 2014, il a été décidé, le 23 mai 2015, de modifier l'implantation de décors préparés durant l'hiver précédent. A l'appui du deuxième grief avancé à l'encontre de M. C..., si la commune de Châteaudun a soutenu que les nouveaux lieux d'implantation des décors n'avaient pas été respectés par cet agent, elle ne justifie toutefois pas plus en appel qu'en première instance de la réalité et de la matérialité du manquement reproché, qu'elle a pourtant décidé de retenir dans l'arrêté litigieux du 9 mars 2016. C'est ainsi à tort que la commune estime devant la cour " qu'en l'absence de contestation utile de M. C... il n'y avait pas lieu ", selon ses propres termes, " de remettre en cause les allégations de la collectivité ". Il est ensuite reproché à M. C... un retard dans l'exécution du projet de fleurissement pour l'année 2015. Il ressort cependant des pièces du dossier que M. C... a remis le 4 mai 2015 un premier rapport d'analyses des offres en vue de la création d'un jardin place du 18-octobre mais que, en raison de son caractère incomplet, un second rapport a été transmis le 12 mai 2015 par cet agent à sa hiérarchie conduisant à la validation de l'offre le 29 mai 2015, à la signature du devis le 3 juin 2015, lequel sera modifié le 10 juin 2015. Comme l'ont estimé les premiers juges, aucun élément ne permet ainsi de considérer qu'un quelconque retard dans l'exécution de la prestation en cause serait imputable à M. C.... Et devant la cour, la commune de Châteaudun n'entend pas davantage étayer par la production d'éléments objectifs " son affirmation " - qui aurait permis d'accréditer le retard de M. C... à établir le rapport d'analyse des offres - selon laquelle " le projet de fleurissement avait été validé depuis trois mois à la date de finalisation de la commande ". La carence reprochée à M. C... dans la conception, la réalisation et le suivi du fleurissement de la ville qui n'est pas établie ne saurait ainsi retenue à son encontre pour caractériser son insuffisance professionnelle.

S'agissant de la mauvaise préparation des dossiers de consultation d'entreprises et du mauvais suivi des travaux avec les entreprises :

9. Si la commune de Châteaudun a, tout d'abord, fait valoir en première instance, à l'appui du reproche retenu à l'encontre de M. C..., que les dossiers de consultations des entreprises étaient systématiquement déposés en retard par cet agent, elle n'a pas justifié et ne justifie pas davantage devant la cour de la réalité de ce grief énoncé dans l'arrêté litigieux du 9 mars 2016. Il en va de même du retard qu'elle impute à l'intéressé s'agissant de la composition florale devant être réalisée en vue d'une manifestation prévue le 13 juin 2014. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces versées au dossier, s'agissant de l'exécution du marché portant sur la tonte des pelouses de la ville confiée à un prestataire extérieur, qu'eu égard, d'une part, à la date à laquelle M. C... a été informé de la décision d'externaliser cette prestation et, d'autre part, des démarches qu'il a effectivement engagées, qu'un retard d'exécution puisse lui être reproché. S'il est également fait grief à cet agent d'avoir, s'agissant de l'élagage d'arbres dans l'enceinte d'une école, fait intervenir une entreprise prestataire pendant le temps scolaire au mépris de la sécurité des enfants, les éléments versés au dossier permettent d'établir que la date d'intervention de l'entreprise prestataire avait été décalée à l'initiative du directeur des services techniques et non de M. C.... Enfin, aucune insuffisance particulière ne ressort des pièces du dossier s'agissant de la mission qui lui avait été confiée de faire intervenir une association chargée de nettoyer les abords d'un immeuble - " le logement Dunois " - propriété de l'OPH.

S'agissant de la gestion des stocks de produits phytosanitaires et de la livraison du terreau :

10. La commune de Châteaudun a reproché à M. C... en première instance - ce que l'arrêté litigieux du 9 mars 2016 retenait - de ne faire l'acquisition de ces produits que très tardivement par rapport aux besoins du service, rendant impossible leur utilisation à bonne date. Toutefois, la commune ne justifie pas plus qu'en première instance de la réalité de ces retards pourtant qualifiés de systématiques. M. C... a soutenu de son côté, ce qu'aucun élément du dossier ne permet d'infirmer, que la commune disposait d'un stock permettant de satisfaire les besoins. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier comme l'ont relevé les premiers juges, que M. C... aurait pris des dispositions à la suite du contrôle effectué par les services de la Direction régionale de l'alimentation de l'agriculture et de la forêt qui avaient constaté de mauvaises conditions d'application, d'utilisation et d'étiquetage et de stockage des produits phytopharmaceutiques donnant lieu à un avertissement et à une mise en demeure de conformité adressés à la commune. Ce seul grief doit être regardé comme établi.

S'agissant de l'organisation de l'intervention sur les espaces verts relevant de l'office public de l'habitat " le logement Dunois " :

11. Il ressort des pièces du dossier qu'afin de permettre à la ville de Châteaudun de facturer à l'OPH l'entretien des espaces verts, le directeur général des services a demandé par courriel le samedi 4 avril 2015 à M. C... de lui fournir pour le 7 avril suivant les superficies d'espaces verts de l'OPH entretenues par la commune. Si M. C... a répondu à cette demande le 7 avril en retenant les surfaces cadastrales en l'absence de plan topographique fourni par l'OPH, ce document a été considéré comme insuffisamment précis pour permettre son utilisation. Cependant, eu égard l'urgence de la demande, au délai mis par l'agent pour y répondre et compte tenu des informations dont il était dépositaire, cette situation ne saurait caractériser une insuffisance professionnelle à remplir la tâche qui lui était demandée. Si la commune soutient en appel pour la première fois que la demande du 4 avril 2015 n'était en réalité qu'une relance, la demande initiale ayant été faite à l'agent dès le mois de mars 2015, elle n'apporte au soutien de cette affirmation aucun élément permettant de l'étayer.

S'agissant des autres griefs avancés par la commune de Châteaudun :

12. Si la commune de Châteaudun reproche à M. C... de ne pas avoir réagi à des incidents consistant en des chutes de pierre chez des habitants à l'occasion de travaux de recepage accomplis par une entreprise prestataire, l'insuffisance professionnelle alléguée n'est pas imputable à cet agent, qui n'est pas en charge des services techniques et de la sécurisation des éléments du domaine de la commune. Enfin, et contrairement à ce que soutient la commune, les insuffisances qu'elle retient à l'encontre de M. C... ne ressortent pas des fiches d'évaluation établies entre 2010 et 2014.

13. Il résulte de ce qui a été dit que la commune de Châteaudun, n'établit pas, ainsi d'ailleurs que l'avait estimé d'ailleurs la commission administrative paritaire dans son avis du 2 décembre 2015, l'insuffisance professionnelle de M. C... en qualité de technicien territorial principal. Par suite, comme l'ont estimé les premiers juges, l'arrêté du 9 mars 2016 prononçant son licenciement pour insuffisance professionnelle et la décision du 12 mai 2016 rejetant son recours gracieux sont entachés d'illégalité.

Sur les conclusions en injonction et indemnitaires :

14. D'une part, eu égard au motif d'annulation retenu, c'est à bon droit que les premiers juges ont enjoint à la commune de Châteaudun de réintégrer M. C... et de reconstituer sa carrière à compter du 16 avril 2016 et ce, dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement attaqué. D'autre part, aucune des parties à l'instance ne formule d'observations sur le jugement attaqué en tant qu'il s'est prononcé sur les conclusions indemnitaires présentées par M. C....

15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Châteaudun n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté du 9 mars 2016 prononçant le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. C... ainsi que la décision du 12 mai 2016 rejetant son recours gracieux et lui a enjoint de réintégrer l'intéressé dans ses effectifs et de reconstituer sa carrière à compter du 16 avril 2016 dans un délai de deux mois.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. C..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de Châteaudun de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Châteaudun le versement à M. C... d'une somme de 2 000 euros au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Châteaudun est rejetée.

Article 2 : La commune de Châteaudun versera à M. C... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Châteaudun et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. A..., président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 février 2021.

Le rapporteur,

O.A...Le président,

O. GASPON

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18NT04421 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04421
Date de la décision : 02/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SCP G. THOUVENIN, O. COUDRAY ET M. GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-02-02;18nt04421 ?
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