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08/01/2021 | FRANCE | N°19NT03626

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 08 janvier 2021, 19NT03626


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2016 par lequel le préfet de la Manche a décidé la mise en oeuvre d'une procédure de consignation pour un montant de 38 950 euros correspondant au coût des travaux de remise en état du site d'une installation classée pour la protection de l'environnement prévus par l'arrêté de mise en demeure du 23 novembre 2015.

Par un jugement n° 1700234 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa d

emande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2016 par lequel le préfet de la Manche a décidé la mise en oeuvre d'une procédure de consignation pour un montant de 38 950 euros correspondant au coût des travaux de remise en état du site d'une installation classée pour la protection de l'environnement prévus par l'arrêté de mise en demeure du 23 novembre 2015.

Par un jugement n° 1700234 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 septembre 2019 et le 5 octobre 2020, M. D... C..., représenté par la SCP Adjudicia, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

­ l'arrêté contesté, qui constitue une créance de l'administration, a été pris en méconnaissance des dispositions du 2ème alinéa de l'article 24 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 en l'absence d'indication des bases de la liquidation ;

­ eu égard aux travaux à réaliser, le montant de la consignation est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation pour être excessif et disproportionné ;

­ l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des changements de circonstances de fait intervenus depuis son édiction dès lors qu'il a remis en état le site.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, le ministre de la Transition écologique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 est inopérant et que les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ le code de l'environnement ;

­ le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A...'hirondel,

­ et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C... exploite, sur la parcelle cadastrée section E1 n° 716 située 3 rue du Bocage à Cérences (Manche), une activité de tri et de stockage des métaux qui n'a pas fait l'objet d'une autorisation administrative ou d'une déclaration au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Il relève appel du jugement du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2019 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 décembre 2016 par lequel le préfet de la Manche a décidé, sur le fondement des dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, de mettre en oeuvre une procédure de consignation pour un montant de 38 950 euros correspondant au coût des travaux prévus par l'arrêté de mise en demeure du 23 novembre 2015 destinés à la remise en état du site.

2. En premier lieu, Mme Cécile Dindar, secrétaire générale de la préfecture de la Manche et signataire de l'arrêté contesté, a reçu, par un arrêté n° 16-161 du 21 octobre 2016 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Manche du 25 octobre 2016, délégation de signature du préfet de la Manche à l'effet de signer, notamment, tous arrêtés et décisions se rattachant à l'administration de l'État dans le département, à l'exception de certains actes dont ne font pas partie les arrêtés de consignation de sommes en application des dispositions du code de l'environnement. Eu égard aux exceptions qu'elle comprend, cet arrêté de délégation de signature n'est ni générale ni absolue. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " Dans les conditions prévues pour chaque catégorie d'entre elles, les recettes sont liquidées avant d'être recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. Les recettes sont liquidées pour leur montant intégral, sans contraction avec les dépenses. / Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation (...) ".

4. L'arrêté en litige, qui ne revêt pas la qualité d'un titre de recette au sens des articles 112 et suivants du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, n'est pas soumis aux obligations prévues par les dispositions citées au point précédent. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du deuxième alinéa de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 ne peut être qu'écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 171-8 du code de l'environnement dans sa rédaction applicable : " I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. En cas d'urgence, elle fixe les mesures nécessaires pour prévenir les dangers graves et imminents pour la santé, la sécurité publique ou l'environnement. / II. - Lorsque la mise en demeure désigne des travaux ou opérations à réaliser et qu'à l'expiration du délai imparti l'intéressé n'a pas obtempéré à cette injonction, l'autorité administrative compétente peut : / 1° L'obliger à consigner entre les mains d'un comptable public avant une date qu'elle détermine une somme correspondant au montant des travaux ou opérations à réaliser. La somme consignée est restituée au fur et à mesure de l'exécution des travaux ou opérations. / Cette somme bénéficie d'un privilège de même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts. Il est procédé à son recouvrement comme en matière de créances de l'Etat étrangères à l'impôt et au domaine. Le comptable peut engager la procédure d'avis à tiers détenteur prévue par l'article L. 263 du livre des procédures fiscales. / L'opposition à l'état exécutoire pris en application d'une mesure de consignation ordonnée par l'autorité administrative devant le juge administratif n'a pas de caractère suspensif ; / (...) Les mesures prévues aux 1°, 2° 3° et 4° ci-dessus sont prises après avoir informé l'intéressé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé. ". Les décisions administratives à caractère de sanction prises en application de l'article L. 171-8 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction en vertu de l'article L. 171-11 du même code.

6. D'une part, le juge de plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement se prononce sur l'étendue des obligations mises à la charge des exploitants par l'autorité compétente au regard des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle il statue. Par suite, la circonstance que le préfet de la Manche n'ait justifié le montant de la consignation qu'à l'occasion du litige porté par le requérant devant le tribunal administratif est sans incidence sur son bien-fondé.

7. D'autre part, le montant de la consignation en cause de 38 950 euros est justifié par la nécessité de procéder au transport et au traitement des matériaux ainsi qu'à une étude de pollution du site. Pour estimer le coût du transport et du traitement des matériaux, le préfet de la Manche s'est référé à deux devis qui évaluent avec précision le coût des diverses prescriptions à réaliser et qui s'élèvent, l'un, à 28 056 euros, l'autre, à 30 840 euros. Par suite, le coût de ces travaux, qui a été fixé à 28 050 euros, n'apparaît pas excessif. Pour l'étude de pollution du site, le préfet a retenu une somme de 10 900 euros comprenant un montant forfaitaire de 10 000 euros et un montant calculé au prorata de la surface du terrain de 900 euros. Pour estimer le coût de cette étude, le préfet s'est fondé sur la circulaire du ministre en charge de l'écologie du 20 novembre 2013 relative aux garanties financières auxquelles sont soumises les installations classées pour la protection de l'environnement relevant du 5° de l'article R. 516-1 du code de l'environnement qui prévoit, pour les terrains d'une superficie inférieure ou égale à 10 hectares, un coût forfaitaire de 10 000 euros auquel s'ajoute un coût de 5 000 euros TTC par hectare. M. C... ne conteste pas la somme forfaitaire de 10 000 euros. Il ne résulte pas, par ailleurs, de l'instruction que le surplus de 900 euros présente, compte tenu de la surface du terrain de 1 830 m², telle qu'elle apparaît sur le plan produit par le préfet, lequel n'est pas sérieusement contesté par le requérant, et du montant retenu, un caractère disproportionné.

8. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction, en particulier du procès-verbal de l'huissier du 24 janvier 2017 qui constate la présence de déchets sur le site, ni du compte-rendu du procès-verbal de la procédure contradictoire du 17 juillet 2018 aux termes duquel " il subsiste une accumulation de ferrailles encore trop importante ", que, contrairement à ce qu'allègue M. C..., ce dernier ait remis en état le site après la notification de l'arrêté contesté. En tout état de cause, s'il fait valoir avoir engagé les travaux en vue de la remise en état du site, il peut seulement, en application des dispositions de l'article L. 171-8 du code de l'environnement précité aux termes duquel " la somme consignée est restituée au fur et à mesure de l'exécution des travaux ou opérations ", prétendre à la réduction du montant de la consignation. Toutefois, cette demande constitue, le cas échéant, un litige distinct, supposant que le requérant établisse qu'il a saisi le préfet de la Manche du montant des sommes restant consignées après la réalisation de tels travaux.

9. Il suit de là que le moyen tiré du caractère excessif de la somme consignée de 38 950 euros doit être écarté en toutes ses branches.

10. Il résulte de ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de la Transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée pour son information au préfet de la Manche.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

­ M. Pérez, président,

­ Mme B..., présidente-assesseur ;

­ M. A...'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2021.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°19NT03626


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03626
Date de la décision : 08/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP ADJUDICIA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-01-08;19nt03626 ?
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