La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/01/2021 | FRANCE | N°18NT04435

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 08 janvier 2021, 18NT04435


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Bouvron à lui verser la somme de 34 808,33 euros, majorée des intérêts au taux légal et de la capitalisation, en réparation du préjudice financier et moral qu'elle estime avoir subi du fait de son maintien en disponibilité.

Par un jugement n° 1509594 du 14 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décemb

re 2018, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Bouvron à lui verser la somme de 34 808,33 euros, majorée des intérêts au taux légal et de la capitalisation, en réparation du préjudice financier et moral qu'elle estime avoir subi du fait de son maintien en disponibilité.

Par un jugement n° 1509594 du 14 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2018, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la commune de Bouvron à lui verser la somme de 45 486,33 euros, somme majorée des intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2015 et de la capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bouvron une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif de Nantes a commis une erreur de droit en inversant la charge de la preuve de l'existence d'un emploi vacant et une erreur de fait en estimant que la commune de Bouvron apportait la preuve de l'absence de poste vacant à compter du 1er avril 2010 ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la commune de Bouvron avait accompli toutes les diligences requises par l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- la responsabilité de la commune de Bouvron est engagée pour l'avoir maintenue en disponibilité pendant plus de cinq ans, soit au-delà d'un délai raisonnable ;

- elle subit un préjudice économique de perte de traitement de 550 euros par mois, soit, après déduction des revenus perçus de 22 307,67 euros, une somme de 33 242,33 euros ;

- elle subit un préjudice économique lié au paiement des cotisations à l'URSSAF afin de maintenir ses droits auprès de la caisse primaire d'assurance maladie d'un montant de 244 euros ;

- elle subit un préjudice lié à l'absence de prise en compte de ses droits à pension évalué à la somme de 5 000 euros ;

- elle subit un préjudice prévisible de minoration de retraite lié au retard de promotion du fait de son maintien en disponibilité évalué à la somme de 5 000 euros ; à titre subsidiaire, le préjudice doit être réparé au titre de la perte de chance sérieuse d'obtenir une retraite évaluée en fonction du grade d'avancement dont elle aurait dû bénéficier si sa réintégration avait été prononcée en temps utile ;

- la faute commise lui a causé des troubles dans les conditions d'existence dont l'indemnisation est évaluée à la somme de 1 000 euros ;

- la faute commise a porté atteinte à son honneur et à sa réputation et lui a causé un préjudice moral, dont l'indemnisation est évaluée à la somme de 1 000 euros.

Par un mémoire, enregistré le 6 décembre 2019, la commune de Bouvron, représentée par Me G..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme E... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

-les moyens relatifs aux erreurs commises par le tribunal ne sont pas fondés ;

- elle n'a commis aucune faute ;

- si la cour retenait qu'elle a commis une faute, sa responsabilité ne saurait être engagée dès lors que le comportement de Mme E... a contribué à la réalisation de son préjudice en s'abstenant de toute démarche ;

- si la cour retenait qu'elle a commis une faute, les préjudices doivent être évalués en prenant en compte le fait qu'une telle faute ne pourrait être établie qu'à compter du 1er juillet 2013, à l'issue d'un délai raisonnable de trois ans ;

- le préjudice relatif au remboursement des cotisations versées à l'URSSAF n'est établi qu'à hauteur de 113,80 euros ;

- le préjudice lié à une minoration de la pension de retraite n'est qu'éventuel ;

- le préjudice lié à l'atteinte à l'honneur et à la réputation n'est pas établi ;

- le préjudice moral est imputable au comportement de Mme E....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu la décision du 16 novembre 2020 par laquelle le président de la cour a, en application des dispositions des articles R 222-24 et R.222-32 du code de justice administrative, désigné M. A... pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public à l'audience du 11 décembre 2020 de la 6ème chambre.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les conclusions de M. A..., rapporteur public,

- et les observations de Me D..., substituant Me B..., représentant Mme E..., et les observations de Me H..., représentant la commune de Bouvron.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., adjoint administratif titulaire, recrutée par la commune de Bouvron à compter du 1er septembre 2001, a été placée en disponibilité pour élever un enfant du 1er mars 2003 au 31 août 2004 puis en disponibilité pour convenances personnelles à compter du 1er septembre 2004. Le 1er avril 2010, elle a demandé à être réintégrée à compter du 1er juillet 2010. Cette demande a été rejetée par la commune de Bouvron qui l'a, par arrêté du 25 mai 2010, placée en disponibilité d'office, position dans laquelle elle a été renouvelée depuis. Le 2 juillet 2015, Mme E... a demandé à la commune de Bouvron de l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subi du fait de son absence de réintégration. Cette demande préalable ayant été implicitement rejetée, elle a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes la condamnation de la commune de Bouvron à réparer les préjudices résultant de son maintien en disponibilité. Elle relève appel du jugement du 14 novembre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

2. Aux termes du second alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. (...) ". Aux termes de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf dans le cas où la période de mise en disponibilité n'excède pas trois mois, le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité. (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu'à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée (...) ". Aux termes du I de l'article 97 dans sa rédaction alors applicable : " I.-Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique (...). Si la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade dans son cadre d'emplois ou, avec son accord, dans un autre cadre d'emplois, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Pendant cette période, tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ; la collectivité ou l'établissement, la délégation régionale ou interdépartementale du Centre national de la fonction publique territoriale et le centre de gestion examinent, chacun pour ce qui le concerne, les possibilités de reclassement. Est également étudiée la possibilité de détachement ou d'intégration directe du fonctionnaire sur un emploi équivalent d'un autre cadre d'emplois au sein de la même collectivité ou de l'établissement. Sont également examinées les possibilités d'activité dans une autre collectivité ou un autre établissement que celle ou celui d'origine sur un emploi correspondant à son grade ou un emploi équivalent. Au terme de ce délai, le fonctionnaire est pris en charge par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l'établissement, ou par le Centre national de la fonction publique territoriale s'il relève d'un cadre d'emplois mentionné à l'article 45 ou du grade d'ingénieur en chef du cadre d'emplois des ingénieurs territoriaux. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire mis en disponibilité pour convenance personnelle a le droit, sous réserve de la vacance d'un emploi correspondant à son grade, d'obtenir sa réintégration à l'issue d'une période de disponibilité. Si ces textes n'imposent pas à l'autorité dont relève le fonctionnaire de délai pour procéder à cette réintégration, celle-ci doit intervenir, en fonction des vacances d'emplois qui se produisent, dans un délai raisonnable. Dans le cas où la collectivité dont relève l'agent qui a demandé sa réintégration ne peut lui proposer un emploi correspondant à son grade, elle doit saisir le centre national de la fonction publique territoriale ou le centre de gestion local afin qu'il lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade.

4. En premier lieu, par la production des délibérations du conseil municipal du 4 mai 2009 et 25 janvier 2010, de l'arrêté de nomination d'un adjoint administratif de première classe stagiaire au 1er mars 2010 et de l'état du personnel au titre de l'année 2010 comportant la liste nominative des agents employés, la commune de Bouvron apporte la preuve qui lui incombe de l'absence de poste vacant correspondant au grade de Mme E... à la date à laquelle celle-ci a demandé à être réintégrée. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de réintégration est entachée d'illégalité fautive lui ouvrant un droit à réparation.

5. En deuxième lieu, le maire de Bouvron a adressé, le 26 avril 2010, un courrier au centre départemental de gestion de la fonction publique territoriale par lequel il attire l'attention de celui-ci sur la situation de Mme E... et lui demande de prendre en compte sa demande réintégration dans le cadre de ses missions relatives à la bourse d'emploi. Ce faisant, il s'est acquitté de la totalité des obligations lui incombant en application du I de l'article 97 cité au point 2, qui n'impliquait pas, contrairement à ce que soutient la requérante, qu'il accomplisse des diligences pour examiner les possibilités de reclassement dans une autre collectivité. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la commune de Bouvron a commis une faute du fait de l'inexacte application de ces dispositions.

6. En troisième lieu, la commune de Bouvron établit, par la production de l'état détaillé de la liste des personnes ayant occupé les postes d'adjoint administratif de première classe puis, à compter de 2015, l'unique poste inscrit au budget de la commune, qu'aucune vacance d'emploi correspondant au grade de Mme E... n'a été déclarée depuis l'année 2010. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la commune a commis une faute en la maintenant en disponibilité d'office en méconnaissance de son droit à être réintégrée dans un délai raisonnable.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... la somme sollicitée par la commune de Bouvron sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Bouvron sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et à la commune de Bouvron.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme F..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2021.

Le rapporteur,

F. F...Le président,

O. Gaspon

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 18NT04435 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04435
Date de la décision : 08/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : SELARL CORNET VINCENT SEGUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-01-08;18nt04435 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award