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18/12/2020 | FRANCE | N°20NT02784

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 18 décembre 2020, 20NT02784


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler les arrêtés du 18 juin 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert en Italie et l'a assignée à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de 45 jours, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans les mêmes c

onditions de délai et d'astreinte.

Par un jugement n° 2007480 du 26 août 2020...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler les arrêtés du 18 juin 2020 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert en Italie et l'a assignée à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de 45 jours, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte.

Par un jugement n° 2007480 du 26 août 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 septembre 2020, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes en date du 26 août 2020 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 18 juin 2020 du préfet de Maine-et-Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer une attestation de demande d'asile dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de transfert est insuffisamment motivée ; elle viole l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dès lors que seules les pages de garde des brochures d'information lui ont été remises ; l'article 5 du même règlement a été violé dès lors que l'entretien prévu par cet article n'a pas eu lieu et qu'à supposer qu'il ait eu lieu, il n'a pas été mené avec un interprète, de manière confidentielle et n'a pas donné lieu à un compte-rendu ; l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que sa fille majeure est présente en France depuis 2006 et y séjourne sous couvert d'une carte de résident en qualité de réfugiée et que, pour sa part, elle souffre d'une maladie du foie qui nécessite un suivi médical ; sa situation personnelle n'a pas été examinée ;

- la décision portant assignation à résidence est insuffisamment motivée ; elle repose sur une décision de transfert illégale ; sa situation n'a pas été examinée ; une erreur manifeste d'appréciation a été commise dès lors que la mesure d'assignation à résidence n'est pas proportionnée.

Par un mémoire, enregistré le 24 septembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante russe née le 19 août 1955, a présenté le 5 février 2020 une demande de reconnaissance de la qualité de réfugiée auprès des services de la préfecture de Maine-et-Loire. Estimant que les autorités italiennes devaient la prendre en charge, le préfet de Maine-et-Loire leur a adressé une demande en ce sens. Celle-ci a été implicitement acceptée. Par deux arrêtés du 18 juin 2020, le préfet de Maine-et-Loire a décidé le transfert de l'intéressée vers l'Italie et l'a assignée à résidence pour une durée de 45 jours. Par un jugement du 26 août 2020, dont il est relevé appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme D... tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur l'arrêté de transfert :

2. En premier lieu, la requérante reprend en appel les moyens invoqués en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté de transfert, de la violation de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de la méconnaissance de l'article 5 du même règlement. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge, respectivement aux points 3, 5 et 7 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la requérante, veuve, est entrée en France en février 2020. Sa présence sur le territoire était donc particulièrement récente à la date de l'arrêté de transfert. En outre, si sa fille majeure séjourne régulièrement sur le territoire sous couvert d'une carte de résident de même que ses petits-enfants, nés en France, cette circonstance est, à elle-seule, insuffisante. Enfin, si elle souffre d'une hépatomégalie, il n'est établi ni qu'elle ne puisse recevoir les soins adaptés à son état de santé en Italie ni que ce dernier s'oppose à un voyage vers l'Italie. Dans de telles conditions, en décidant de la transférer en Italie en vue de l'examen de sa demande d'asile, le préfet n'a pas porté à son droit à une vie privée et familiale une atteinte excessive au regard des buts poursuivis par cette décision de transfert.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".

5. Eu égard à ce qui a été dit au point 3 ci-dessus, et en l'absence d'éléments, autres que ceux spécifiquement invoqués par la requérante, justifiant que les autorités françaises examinent, dans les conditions dérogatoires prévues par l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, sa demande de protection internationale, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, notamment au regard de ces dispositions, en la transférant en Italie.

6. En cinquième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté contesté lui-même, que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée.

Sur la décision d'assignation à résidence :

7. En premier lieu, l'exception d'illégalité de l'arrêté de transfert doit, compte tenu de ce qui vient d'être dit, être écartée.

8. En second lieu, la requérante reprend en appel les moyens invoqués en première instance et tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté d'assignation à résidence, du défaut d'examen de sa situation et d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par les mêmes motifs que ceux retenus à bon droit par le premier juge, respectivement aux points 13, 15 et 16 du jugement attaqué.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 décembre 2020.

Le rapporteur,

T. A...Le président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT02784

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02784
Date de la décision : 18/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : KADDOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-18;20nt02784 ?
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