Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2010.
Par un jugement n° 1605080 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2018, M. A... B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales mises à sa charge au titre de l'année 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué n'a pas été notifié à la bonne adresse ;
- il n'était pas résident en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts ;
- il a un foyer permanent d'habitation en Algérie ;
- il a le centre de ses intérêts économiques et de ses intérêts vitaux en Algérie.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Constitution, notamment son article 55 ;
- la convention signée le 17 octobre 1999 entre la France et l'Algérie en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu, d'impôts sur les successions, de droit d'enregistrement et de timbre ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., qui est de nationalité algérienne et qui a déposé au titre des années 2009 et 2010 des déclarations de revenus en France, a réalisé le 15 janvier 2010 une plus-value à l'occasion de la cession de parts sociales de la société anonyme (SA) SICAME, société de droit français. L'administration ayant constaté, à l'occasion d'un contrôle sur pièces, que le contribuable n'avait pas porté à sa connaissance cette plus-value, lui a adressé, le 29 octobre 2013, une mise en demeure de déposer une déclaration de plus-value, qu'il n'a pas retirée. L'administration lui a donc fait parvenir, le 4 décembre 2013, une proposition de rectification l'informant de son intention de soumettre d'office cette plus-value à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales. En réponse à cette proposition de rectification, M. B... a présenté des observations, le 26 décembre 2013, dans lesquelles il contestait être résident fiscal français et, par voie de conséquence, l'imposition en France de cette plus-value. Les impositions notifiées ont toutefois été mises en recouvrement et l'administration a rejeté, le 19 avril 2016, les deux réclamations préalables présentées par M. B.... Le contribuable a présenté, devant le tribunal administratif de Rennes, une demande en décharge. Par un jugement du 3 octobre 2018, le tribunal a rejeté sa demande. Il fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La seule circonstance que le jugement attaqué a été notifié à une adresse erronée est sans influence sur sa régularité et ne suffit pas à établir que les premiers juges n'auraient pas pris connaissance du contenu de la demande de première instance de M. B.... Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement ne peut qu'être écarté.
Sur le principe de l'imposition en France :
3. Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. Par suite, il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale.
En ce qui concerne l'application du droit interne :
4. L'article 4 A du code général des impôts dispose que : " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. (...) ". L'article 4 B du même code dispose que : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. (...) ".
5. M. B... a indiqué, dans sa déclaration de revenus pour l'année 2010, une adresse en France, à Saint-Malo et a mentionné son épouse et un enfant à charge. Au vu de l'acte d'acquisition du 16 avril 2006 de la maison située à Saint-Malo, M. B... et son épouse vivaient déjà dans cette commune à cette date. En outre, la demande de regroupement familial déposée par M. B... au profit de son épouse et de leurs deux enfants a été acceptée le 7 mars 2007. Si M. B... soutient que la maison située à Saint-Malo, dont il est propriétaire, était louée à des tiers, il ne l'établit pas. Enfin, la seule circonstance que l'intéressé ait produit un état des salaires de son épouse pour l'année 2010, émanant d'une société algérienne dont M. B... est le gérant et dont le siège est identique à l'adresse algérienne de Mme B..., mentionnée dans cet état des salaires, et qui ne porte pas, au demeurant, sur les mois de janvier à avril 2010, ne suffit pas à établir que le foyer de M. B... n'était pas en France. Dès lors, il devait être regardé, en 2010, comme ayant son domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A du code général des impôts.
En ce qui concerne l'application de la convention signée le 17 octobre 1999 entre la France et l'Algérie :
6. Aux termes de l'article 4 de la convention signée le 17 octobre 1999 entre la France et l'Algérie : " 1. Au sens de la présente Convention, l'expression " résident d'un Etat contractant " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction, ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus de sources situées dans cet Etat ou pour la fortune qui y est située. / 2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats contractants, sa situation est réglée de la manière suivante : / a) Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; / b) Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat où elle séjourne de façon habituelle ; / c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat dont elle possède la nationalité ; / d) Si les critères qui précèdent ne permettent pas de déterminer l'Etat dont la personne est un résident, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord. / 3. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne autre qu'une personne physique est un résident des deux Etats contractants, elle est considérée comme un résident de l'Etat où son siège de direction effective est situé. / 4. L'expression " résident d'un Etat contractant " comprend, lorsque cet Etat est la France, les sociétés de personnes et les autres groupements de personnes soumis à un régime fiscal analogue, qui ont leur siège de direction effective en France et dont les actionnaires, associés ou autres membres y sont personnellement soumis à l'impôt pour leur part des bénéfices en application de la législation interne française. ".
7. La plus-value de cession de parts sociales en litige n'entrant dans les prévisions ni du 1, ni du 2, ni du 3 de l'article 13 de la convention précitée, il y a lieu de faire application des stipulations du 4 de cet article prévoyant que de tels gains ne sont imposables que dans l'Etat contractant dont le cédant est un résident, conformément à l'article 4.
8. Le certificat indiquant que M. B... est résident fiscal algérien ne mentionne pas l'adresse de l'intéressé en Algérie. L'attestation d'un de ses employeurs, la société Seifel, mentionnant une adresse du requérant en Algérie, est datée de 2014, alors d'ailleurs que les revenus provenant de l'activité au sein de cette société ont été déclarés en France par M. B.... L'attestation d'affiliation à la sécurité sociale algérienne date de 2015 et ne saurait donc établir l'adresse du requérant à la date des impositions litigieuses. Il en est de même du registre du commerce daté de 2014, qui mentionne au demeurant uniquement la commune dans laquelle habite M. B... et non pas l'intégralité de son adresse. Par conséquent, M. B... n'établit pas qu'il a un foyer d'habitation permanent en Algérie et, sans qu'il soit besoin d'examiner s'il a le centre de ses intérêts vitaux en Algérie, c'est à bon droit que l'administration a imposé la plus-value en litige en France au titre de l'année 2010.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.
Le rapporteur,
P. C...Le président,
F. Bataille
Le greffier,
P. Chaveroux
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT04135
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