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01/12/2020 | FRANCE | N°20NT01074-20NT01075

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 01 décembre 2020, 20NT01074-20NT01075


Vu, sous le n°20NT01074, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 par lequel le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2000588-2000590 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a, après avoir accordé l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er), rejeté sa dema

nde ainsi que celle de son épouse (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une r...

Vu, sous le n°20NT01074, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 par lequel le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2000588-2000590 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a, après avoir accordé l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er), rejeté sa demande ainsi que celle de son épouse (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2020, M. E..., représenté par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ou, à défaut, de réexaminer son dossier dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de signature de la minute du jugement par le magistrat statuant seul et le greffier d'audience ;

- la décision de refus de séjour est illégale dès lors que l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine ne peut être affirmée dans un cas comme le sien où les problèmes de santé physiques et psychiques ne sont pas identifiés et sont en cours d'aggravation ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'ils n'ont plus aucune famille dans leur pays d'origine et qu'ils craignent de subir des persécutions en cas de renvoi en Arménie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2020, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 11 juin 2020.

II. Vu, sous le n°20NT01075, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... épouse E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 par lequel le préfet du Finistère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2000588-2000590 du 25 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a, après avoir accordé l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er), rejeté sa demande ainsi que celle de son époux (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2020, Mme E..., représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ou, à défaut, de réexaminer son dossier dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en l'absence de signature de la minute du jugement par le magistrat statuant seul et le greffier d'audience ;

- la décision de refus de séjour de son époux est illégale dès lors que l'existence d'un traitement approprié dans le pays d'origine ne peut être affirmée dans un cas comme le sien où les problèmes de santé physiques et psychiques ne sont pas identifiés et sont en cours d'aggravation ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi méconnaissent les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors qu'ils n'ont plus aucune famille dans leur pays d'origine et qu'ils craignent de subir des persécutions en cas de renvoi en Arménie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2020, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 11 juin 2020.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les observations de Me F..., représentant M. et Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme E..., ressortissants arméniens, respectivement nés les 10 octobre 1981 et 9 juin 1983, relèvent appel du jugement du 25 février 2020 du tribunal administratif de Rennes par lequel ce tribunal a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés du 23 janvier 2020 par lesquels le préfet du Finistère a refusé un droit au séjour à M. et Mme E..., leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

2. Les requêtes n°20NT01074 et 20NT01075 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé par le président-rapporteur et le greffier, conformément aux prescriptions de l'article R 741-7 du code de justice administrative. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait irrégulier faute de comporter l'ensemble des signatures requises.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...). ".

5. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, la circonstance que la pathologie dont souffre un étranger sollicitant un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est évolutive et requiert des examens complémentaires pour être mieux identifiée ne fait pas, en elle-même, obstacle à ce que le préfet prenne position sur le point de savoir s'il pourra bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine dès lors que cet examen porte, au besoin, sur les possibilités de suivi médical dans ce pays, incluant nécessairement celles portant sur les investigations nécessaires au diagnostic. Par suite, le préfet du Finistère n'a pas, en dépit de la dégradation de l'état de santé dont M. E... se prévaut, commis d'erreur de droit en appréciant s'il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Arménie.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

7. M. et Mme E... sont entrés en France en octobre 2017 avec leurs deux enfants mineurs ainsi que la mère et le frère de M. E.... Ils vivent au centre d'hébergement de Landivisiau avec leurs deux enfants ainsi qu'un troisième enfant né le 2 février 2019. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 28 décembre 2018 puis par la Cour nationale du droit d'asile par décision du 19 juillet 2019. L'état de santé de M. E... ne rend pas, par ailleurs, sa présence en France indispensable. Si M. et Mme E... se prévalent de la présence en France de la mère et du frère du requérant, rien n'établit que ceux-ci sont en situation régulière et ont donc vocation à y demeurer. Les requérants ne justifient par ailleurs d'aucune intégration sociale ou professionnelle particulière en France. Ils ne justifient pas davantage être dépourvus de toute attache dans leur pays d'origine, où leur cellule familiale peut se reconstituer. Par suite, l'arrêté n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

9. M. et Mme E... soutiennent qu'ils encourent des risques de persécutions en cas de renvoi en Arménie. Toutefois ils n'apportent, à l'appui de leurs dires, aucun élément justifiant du bien-fondé et de l'actualité de leurs craintes, que ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ni la Cour nationale du droit d'asile n'ont au demeurant tenues pour établies. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne peut être utilement invoqué qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, doit être écarté.

10. En dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

11. En l'absence de tout élément probant justifiant du risque de violences pesant sur leurs enfants en cas de retour en Arménie, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés violent l'intérêt supérieur de leurs enfants, en méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par suite, leurs requêtes, y compris leurs conclusions relatives aux frais liés à l'instance, doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes n°20NT01074 et n°20NT01075 de M. et Mme E... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., Mme B... C... épouse E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2020.

Le rapporteur,

F. D...Le président,

O. GASPON

Le greffier,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°20NT01074 - 20NT01075

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01074-20NT01075
Date de la décision : 01/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : JEANNETEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-01;20nt01074.20nt01075 ?
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