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26/11/2020 | FRANCE | N°20NT00341

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 novembre 2020, 20NT00341


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré et, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision du 14 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français jusqu'au jour de la lecture en audience publique d

e la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Par un jugement n° 1909683...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré et, à titre subsidiaire, de suspendre l'exécution de la décision du 14 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français jusqu'au jour de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile.

Par un jugement n° 1909683 du 21 janvier 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a suspendu l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français (article 1er), a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au bénéfice de Me C... (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 29 janvier 2020 et 1er avril 2020, le préfet de la Vendée demande à la cour d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement.

Il soutient que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes n'a pas pris en compte le fait qu'à la date de l'audience, la Cour nationale du droit d'asile avait déjà statué sur la demande de M. A... et que, par conséquent, la suspension de la mesure d'éloignement ne pouvait pas être prononcée.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 mars 2020, M. E... A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler, par la voie de l'appel incident, l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Vendée de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir qu'il maintient l'ensemble des moyens soulevés en première instance et insiste notamment sur le fait que la mesure d'éloignement méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une décision du 27 février 2020, M. E... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant albanais né le 26 février 1982, déclare être entré irrégulièrement en France le 25 mai 2019. Il a formé auprès du préfet de la Vendée une demande d'asile, qui a fait l'objet d'une décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 juillet 2019. Par un arrêté du 14 août 2019, le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, en application du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler cet arrêté et, à titre subsidiaire, d'en suspendre l'exécution. Par un jugement du 21 janvier 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a suspendu l'exécution de la décision portant obligation de quitter le territoire français (article 1er), mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 (article 2) et rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 3). Le préfet de la Vendée relève appel des articles 1er et 2 de ce jugement. M. A..., par la voie de l'appel incident, relève appel de l'article 3 de ce jugement.

Sur les conclusions d'appel principal :

2. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. / Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la Cour nationale du droit d'asile a, par une ordonnance du 30 octobre 2019, notifiée le 7 novembre 2019, déclaré irrecevable la demande de M. A... en l'absence d'éléments sérieux. Par suite, les conditions fixées par l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour suspendre la mesure d'éloignement n'étaient plus remplies à la date à laquelle le magistrat désigné a statué. Le préfet de la Vendée est donc fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a suspendu la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Sur les conclusions d'appel incident :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions contestées :

4. M. A... reprend en appel les moyens invoqués en première instance et tirés de ce que l'arrêté du 14 août 2019 est entaché d'incompétence et est insuffisamment motivé. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. M. A... reprend en appel les moyens, qu'il avait invoqués en première instance et tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale, a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

6. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la situation de M. A... a fait l'objet d'un examen particulier des circonstances le concernant.

8. En troisième lieu, M. A... fait valoir qu'il appartient à la communauté rom et qu'il a fait l'objet de graves persécutions l'ayant conduit à fuir son pays et cite des rapports internationaux faisant état de ces persécutions. Ces éléments sont toutefois insuffisants pour permettre d'établir que M. A... serait exposé, en cas de retour en Albanie, à des traitements inhumains ou dégradants, l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ayant au demeurant rejeté sa demande d'asile. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, le préfet de Vendée est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Nantes a suspendu sa décision du 14 août 2019 portant obligation de quitter le territoire français et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au bénéfice de Me C... et, d'autre part, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a rejeté le surplus de sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 1909683 du 21 janvier 2020 du tribunal administratif de Nantes sont annulés.

Article 2 : L'appel incident de M. A..., les conclusions à fin d'injonction et les conclusions présentées en appel au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... A... et à Me C....

Copie sera adressée, pour information, au préfet de la Vendée.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. B..., premier conseiller,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2020.

Le rapporteur,

H. B...Le président,

J.-E. Geffray

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00341
Date de la décision : 26/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SELARL R et P AVOCATS OLIVIER RENARD ET CINDIE PAPINEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-26;20nt00341 ?
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