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26/11/2020 | FRANCE | N°18NT04392

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 novembre 2020, 18NT04392


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 à 2012, mises en recouvrement le 30 avril 2014, à raison de la remise en cause de l'amortissement " Robien " et de l'imputation de déficits fonciers sur son revenu global.

Par un jugement n° 1606309 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 décembre 2018 et 8 juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 à 2012, mises en recouvrement le 30 avril 2014, à raison de la remise en cause de l'amortissement " Robien " et de l'imputation de déficits fonciers sur son revenu global.

Par un jugement n° 1606309 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 décembre 2018 et 8 juillet 2019, Mme E... B..., représentée par Me C... et Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge et de condamner l'administration à restituer les sommes déjà perçues ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en subordonnant l'absence de remise en cause de l'avantage fiscal " Robien recentré " à la circonstance que les difficultés financières soient consécutives à son licenciement, le service a ajouté une condition non prévue par la loi ;

- en tout état de cause, il est démontré que ses difficultés financières sont consécutives à son licenciement ;

- en vertu du 3° du I de l'article 156 du code général des impôts, la condition de maintien de l'affectation de l'immeuble à la location ne s'applique pas en cas de licenciement ; il en résulte qu'en procédant à la reprise des déficits fonciers, le service a méconnu ces dispositions.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Un mémoire, enregistré le 17 juin 2020 et présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a acquis le 7 septembre 2007 un terrain à bâtir sur le territoire de la commune de Chaillé-sous-les-Ormeaux (Vendée) afin d'y édifier un immeuble. A l'achèvement des travaux de construction d'un pavillon le 3 avril 2008, elle s'est engagée à le donner à bail dans le cadre du dispositif de défiscalisation dit " Robien recentré " pendant neuf années et en a retiré des revenus fonciers dès cette date. Toutefois, le 31 décembre 2010, afin d'organiser sa mise en vente, Mme B... a cessé de donner ce bien immobilier à la location. En conséquence, l'administration fiscale a remis en cause, d'une part, la déduction des amortissements opérée en application du dispositif au cours des années 2008 à 2010, et, d'autre part, l'imputation des déficits fonciers sur le revenu global. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui en ont résulté au titre des années 2008 à 2012. Par un jugement du 31 octobre 2018, le tribunal a rejeté sa demande. Mme B... fait appel de ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : (...) h) Pour les logements situés en France, acquis neufs ou en l'état futur d'achèvement à compter du 3 avril 2003, et à la demande du contribuable, une déduction au titre de l'amortissement (...). / Le bénéfice de la déduction est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l'année d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l'engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d'habitation principale à une personne autre qu'un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement de l'immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. (...) / Le revenu net foncier de l'année au cours de laquelle l'un des engagements définis au présent h n'est pas respecté est majoré du montant des amortissements déduits. (...). En cas (...) de licenciement (...), cette majoration ne s'applique pas. ".

3. Il est constant que Mme B... a été licenciée le 21 janvier 2010 et a cessé d'offrir son bien immobilier à la location à la fin de l'année 2010, afin d'organiser sa mise en vente, soit avant le terme prévu dans le cadre du dispositif de défiscalisation dit " Robien recentré " de neuf années, jusqu'au 3 avril 2017. Elle a vendu le bien immobilier à son fils le 10 février 2011.

4. Si les dispositions du h) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts n'exigent pas que le contribuable ait subi une perte de revenu ou soit en situation de chômage, il appartient au contribuable d'établir que son licenciement constitue la cause déterminante l'ayant conduit à rompre cet engagement de mise en location. Dès lors, c'est sans commettre d'erreur de droit que l'administration fiscale a pu examiner si des difficultés financières étaient consécutives au licenciement subi par Mme B..., alors même qu'il n'est intervenu que quelques mois avant la fin de la mise en location du bien, l'intéressée ayant au demeurant retrouvé un emploi salarié en septembre 2010, en contrat à durée déterminée.

5. Mme B... avait comparu, dans le cadre d'une procédure pénale, à une première audience le 20 septembre 2010 devant le tribunal correctionnel de La Roche-sur-Yon, même si l'affaire a ensuite été renvoyée à une audience du 24 janvier 2011 à laquelle elle n'a d'ailleurs pas comparu, bien que représentée par son avocat. En outre, il ressort de la proposition de rectification du 15 mars 2011 que Mme B... avait reconnu auprès de l'administration fiscale, dès le 22 décembre 2010, qu'elle avait indûment encaissé sur ses comptes bancaires personnels des sommes provenant de son ancien employeur. Dès lors, au vu du stade d'avancement de la procédure et avant même le jugement du tribunal correctionnel, elle ne pouvait ignorer qu'elle allait être condamnée à indemniser son ancien employeur de sommes conséquentes. Ainsi, la procédure pénale dirigée à son encontre pour détournement de fonds et abus de confiance et sa condamnation à venir constituent la cause déterminante l'ayant conduite à rompre son engagement de mise en location, et non pas son licenciement. Par suite, la requérante n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées du h) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts.

6. En second lieu, en vertu de l'article 28 du code général des impôts, le revenu foncier imposable à l'impôt sur le revenu est égal, chaque année, à la différence entre le montant des recettes encaissées et le total des frais et des charges acquittés. Aux termes de l'article 156 du même code : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction: / I. - Du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus; si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes jusqu'à la sixième année inclusivement. / Toutefois, n'est pas autorisée l'imputation: (...) 3o des déficits fonciers, lesquels s'imputent exclusivement sur les revenus fonciers des dix années suivantes. / L'imputation exclusive sur les revenus fonciers n'est pas non plus applicable aux déficits fonciers résultant de dépenses autres que les intérêts d'emprunt. L'imputation est limitée à 10 700 euros. La fraction du déficit supérieure à 10 700 euros et la fraction du déficit non imputable résultant des intérêts d'emprunt sont déduites dans les conditions prévues au premier alinéa. / (...) Lorsque le propriétaire cesse de louer un immeuble ou lorsque le propriétaire de titres d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés les vend, le revenu foncier et le revenu global des trois années qui précèdent celle au cours de laquelle intervient cet événement sont, nonobstant toute disposition contraire, reconstitués selon les modalités prévues au premier alinéa du présent 3o. Cette disposition ne s'applique pas en cas (...) de licenciement. ".

7. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 5, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause l'imputation des déficits fonciers sur le revenu global de Mme B... au titre des années en litige.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Brasnu, premier conseiller,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 novembre 2020.

Le rapporteur,

P. D...Le président,

J-E. Geffray

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18NT04392

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04392
Date de la décision : 26/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CABINET LAURANT ET MICHAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-26;18nt04392 ?
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