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24/11/2020 | FRANCE | N°19NT03569

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 24 novembre 2020, 19NT03569


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet des Côtes-d'Armor le mettant en demeure de prendre diverses mesures au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement.

Par un jugement n° 1803451 du 22 juillet 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 septembre 2019 et 28 février 2020, M. G..

. E..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 juillet ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet des Côtes-d'Armor le mettant en demeure de prendre diverses mesures au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement.

Par un jugement n° 1803451 du 22 juillet 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 septembre 2019 et 28 février 2020, M. G... E..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 22 juillet 2019 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet des Côtes-d'Armor ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en ce que le principe du contradictoire n'a pas été respecté ;

- en application de l'article L. 512-7-6 du code de l'environnement, seul l'exploitant du site est tenu de le mettre en sécurité, lorsqu'aucun usage futur du site a été déterminé ; or, il n'est pas l'exploitant du site ;

- le dernier exploitant du site n'est pas la SCEA Jean-Luc E... ; M. F... a été autorisé à installer des porcs sur le site, ce qu'il a fait au mois de novembre 2013, et doit être qualifié de " dernier exploitant du site " ;

- en tout état de cause, la SCEA Jean-Luc E... est dotée de la personnalité morale et doit se distinguer de son gérant, personne physique ; seul Me A..., liquidateur judiciaire de la SCEA Jean Luc E..., disposait de la capacité de mettre en oeuvre les mesures nécessaires à la sécurisation du site et à la gestion des déchets ;

- il n'est pas propriétaire des parcelles litigieuses.

Par un mémoire enregistré le 12 février 2020, Me A... soutient qu'il n'a plus qualité pour représenter la SCEA Jean-Luc E... depuis le jugement du 15 septembre 2017 du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc.

Une mise en demeure a été adressée le 20 décembre 2019 au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour M. E....

Considérant ce qui suit :

1. La société civile d'exploitation agricole (SCEA) Jean-Luc E..., ayant pour associé-gérant M. G... E..., a exploité jusqu'en novembre 2011 un élevage porcin de 3 573 places situé à Pordic. Cette installation classée pour la protection de l'environnement a été autorisée par arrêté préfectoral du 7 octobre 1996. Par jugement du 15 juin 2010 du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de cette société. Par jugement du 1er juillet 2011, ce tribunal a converti cette procédure en liquidation judiciaire, puis, par jugement du 15 septembre 2017, a prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs de la SCEA. Par un arrêté du 29 mai 2018, le préfet des Côtes-d'Armor a mis en demeure M. E... de sécuriser le site et d'en évacuer les déchets. Par un jugement n° 1803451 du 22 juillet 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. E... tendant à l'annulation de cet arrêté. M. E... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 171-8 du code de l'environnement : " I. - Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, en cas d'inobservation des prescriptions applicables en vertu du présent code aux installations, ouvrages, travaux, aménagements, opérations, objets, dispositifs et activités, l'autorité administrative compétente met en demeure la personne à laquelle incombe l'obligation d'y satisfaire dans un délai qu'elle détermine. (...) ". Aux termes dc l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement (...) ". Aux termes de l'article L. 512-7-6 du code de l'environnement : " Lorsque l'installation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1 et qu'il permette un usage futur du site déterminé conjointement avec le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme et, s'il ne s'agit pas de l'exploitant, le propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation./ A défaut d'accord entre les personnes mentionnées au premier alinéa, lorsque l'installation est mise à l'arrêt définitif, son exploitant place son site dans un état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et, le cas échéant, à l'article L. 211-1 et qu'il permette un usage futur du site comparable à celui de la dernière période d'exploitation de l'installation mise à l'arrêt. (...) ".

3. L'obligation de remise en état du site, prévue par les dispositions précitées du code de l'environnement, pèse sur l'ancien exploitant ou, si celui-ci a disparu, sur son ayant-droit. Lorsque l'exploitant ou son ayant-droit a cédé le site à un tiers, cette cession ne l'exonère de ses obligations que si le cessionnaire s'est substitué à lui en qualité d'exploitant. Il incombe ainsi à l'exploitant d'une installation classée, à son ayant-droit ou à celui qui s'est substitué à lui, de mettre en oeuvre les mesures permettant la remise en état du site qui a été le siège de l'exploitation dans l'intérêt, notamment, de la santé ou de la sécurité publique et de la protection de l'environnement. L'autorité administrative peut contraindre les personnes en cause à prendre ces mesures et, en cas de défaillance de celles-ci, y faire procéder d'office et à leurs frais.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment des énonciations de la décision contestée, que pour mettre en demeure M. E... de sécuriser le site, le préfet des Côtes-d'Armor s'est fondé sur ce que l'intéressé est le propriétaire des parcelles sur lesquelles est située l'installation et l'exploitant de cette exploitation. Toutefois, les dispositions précitées du code de l'environnement ne font pas peser l'obligation de remise en état sur le propriétaire du site. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que M. E... n'est pas davantage l'exploitant de l'installation. A supposer même que la mise en demeure contestée aurait été adressée à

M. E... en qualité d'associé gérant de la société civile d'exploitation agricole " Jean-Luc E... ", ancienne exploitante de l'installation et propriétaire des terrains, il résulte de l'instruction qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, cette société a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, ouverte par jugement du 1er juillet 2011 du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc et clôturée par jugement du 15 septembre 2017 pour insuffisance d'actifs. Par suite, en mettant en demeure, par l'arrêté contesté, pris sur le fondement de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, M. E... de sécuriser le site d'élevage porcin, de limiter son accès, et d'en évacuer les déchets au motif qu'il est propriétaire des parcelles sur lesquels est située l'installation et qu'il en est l'exploitant, le préfet des Côtes-d'Armor a commis une erreur de droit. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête et la régularité du jugement attaqué, M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 du préfet des Côtes-d'Armor.

5. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, le versement à M. E... de la somme que ce dernier demande au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 22 juillet 2019 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 29 mai 2018 du préfet des Côtes-d'Armor mettant M. E... en demeure de prendre diverses mesures au titre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement est annulé.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... E... et au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 6 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme D..., présidente,

- M. B..., premier conseiller,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 novembre 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

C. D...

Le greffier,

C. POPSE

La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03569


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03569
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL VALADOU JOSSELIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-24;19nt03569 ?
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