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20/11/2020 | FRANCE | N°20NT00717

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 20 novembre 2020, 20NT00717


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler d'une part, l'arrêté du 29 janvier 2020 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et d'autre part, l'arrêté du même jour ordonnant son assignation à résidence.

Par un jugement n° 2000507 du 4 février 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a annulé le premier de ces arrêtés en tant qu'il refusait un délai de départ volontai

re, a mis fin à l'assignation à résidence et a rejeté le surplus de la demande de M. A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler d'une part, l'arrêté du 29 janvier 2020 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et d'autre part, l'arrêté du même jour ordonnant son assignation à résidence.

Par un jugement n° 2000507 du 4 février 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a annulé le premier de ces arrêtés en tant qu'il refusait un délai de départ volontaire, a mis fin à l'assignation à résidence et a rejeté le surplus de la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 février 2020 le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 4 février 2020 en ce qu'il a annulé l'arrêté du 29 février 2020 du préfet d'Ille-et-Vilaine en tant qu'il refuse d'accorder à M. A... un délai pour quitter volontairement le territoire français et en tant qu'il a mis fin à son assignation à résidence ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par M. A....

Il soutient que la décision portant refus d'accorder un délai de départ volontaire n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire enregistré le 1er avril 2020 M. A..., représenté par Me H..., demande à la cour :

1°) de rejeter cette requête ;

2°) par la voie de l'appel incident :

- d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;

- d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre de subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il fait valoir que :

- le moyen invoqué par le préfet d'Ille-et-Vilaine, relatif au motif d'annulation, n'est pas fondé ;

- la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations des articles 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- cette décision est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par deux arrêtés du 29 janvier 2020 le préfet d'Ille-et-Vilaine a d'une part obligé M. A... à quitter le territoire français sans délai et fixé le pays de destination et, d'autre part, ordonné son assignation à résidence. Le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel du jugement du

4 février 2020 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a annulé son premier arrêté en tant qu'il refusait d'accorder à M. A... un délai de départ volontaire et a mis fin à son assignation à résidence. Par la voie de l'appel incident, M. A... demande l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne le refus de départ volontaire :

S'agissant du moyen d'annulation retenu par le magistrat désigné du tribunal administratif :

2. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en sa rédaction alors applicable : " (...) l'autorité administrative peut (...) décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa (...) sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour (...) / f).Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter de documents d'identité ou de voyages en cours de validité (...), qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente (...) ".

3. Pour refuser d'assortir la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français d'un délai de départ volontaire, le préfet d'Ille-et-Vilaine s'est fondé sur la circonstance que, l'intéressé s'étant maintenu irrégulièrement sur le territoire français à compter de l'expiration de son visa, le 30 septembre 2018, sans entreprendre de démarche en vue de sa régularisation, il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées du b) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Si, devant le premier juge, l'intéressé s'est prévalu de la possession d'un passeport, qu'il a remis aux services de police lors de son audition et de ce que l'administration connaissait tant l'adresse du domicile de sa future épouse, avec laquelle il résidait depuis quelques mois, que celle de la structure dans laquelle il travaillait bénévolement, ces éléments, relatifs aux garanties de représentation évoquées par les dispositions du f) du même article, ne peuvent, eu égard au motif de la décision en litige, permettre de regarder M. A... comme justifiant de circonstances particulières faisant obstacle à ce que le préfet lui refuse l'octroi d'un délai de départ volontaire en application du b) du 3° du II de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Par suite, le préfet d'Ille-et-Vilaine est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision portant refus de délai de départ volontaire au motif qu'elle était entachée d'erreur d'appréciation et a mis fin, par voie de conséquence, à l'assignation à résidence de l'intéressé.

6. Il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de l'ensemble du litige relatif à la décision portant refus de délai de départ volontaire et à l'arrêté portant assignation à résidence, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif et devant la cour.

S'agissant des autres moyens invoqués par M. A... à l'encontre du refus de départ volontaire :

7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 6 décembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour, le préfet

d'Ille-et-Vilaine a donné à M. D... E..., directeur des étrangers en France et, en cas d'absence ou d'empêchement, à M. F... B..., chef du bureau de l'éloignement, délégation aux fins de signer notamment les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec ou sans délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée doit être écarté comme manquant en fait.

8. En deuxième lieu, la décision contestée portant refus de délai de départ volontaire comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, cette décision est suffisamment motivée.

9. En troisième lieu, pour exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire, M. A... soutient d'abord que la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire a été prise alors que son mariage était programmé pour le 8 puis le 22 février 2020. Toutefois, si cette décision est susceptible d'avoir une incidence sur la date effective de la célébration du mariage de l'intéressé, elle n'a ni pour objet ni pour effet de l'empêcher de se marier. Par suite, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas méconnu les stipulations de l'article 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent et compte tenu du caractère récent de la relation que M. A... déclare entretenir depuis le mois d'août 2019 avec sa future épouse, la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Pour les mêmes raisons, le moyen tiré du détournement de pouvoir ne peut qu'être écarté

12. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que M. A... a répondu aux convocations de la police aux frontières et a remis son passeport aux autorités de sorte qu'il ne présente pas de risque de soustraction à l'exécution de la mesure d'éloignement au sens du II de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, présente un caractère inopérant eu égard au motif de la décision portant refus d'accorder un délai de départ volontaire.

S'agissant de la décision d'assignation à résidence :

13. L'arrêté contesté portant assignation à résidence comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'aurait pas procédé, préalablement à l'édiction de cet arrêté, à un examen particulier de la situation de M. A....

14. Compte tenu de ce qui précède, M. A... n'est pas fondé à exciper, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté l'assignant à résidence, de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

15. Il résulte de ce qui précède M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire au soutien de ses conclusions dirigées à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi.

Sur l'appel incident de M. A... :

16. A l'appui de ses conclusions d'appel incident dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. A... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance, tirés de ce que cette décision serait entachée de détournement de pouvoir et d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et de ce qu'elle aurait été prise en méconnaissance des stipulations des articles 8 et 12 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.

17. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de cette annulation.

18. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le préfet d'Ille-et-Vilaine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 29 janvier 2020 en tant qu'il refuse d'accorder un délai de départ volontaire à M. A... ainsi que son arrêté du même jour ordonnant l'assignation à résidence de l'intéressé et, d'autre part, que les conclusions d'appel incident présentées par ce dernier tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ne peuvent qu'être rejetées. Par voie de conséquence, les conclusions présentées tant en première instance qu'en appel par M. A... à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : Les articles 2, 3 et 5 du jugement n° 2000507 du 4 février 2020 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes sont annulés.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes par M. A... et ses conclusions d'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... A....

Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- Mme G..., président-assesseur,

- Mme Le Barbier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2020.

Le rapporteur

C. G...

Le président

I. Perrot

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20NT00717 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00717
Date de la décision : 20/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE VERGER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-20;20nt00717 ?
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