Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... et Mme A... E... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 10 mai 2019 du préfet des Côtes d'Armor leur refusant la délivrance de titres de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Par un jugement n° 1902711, 1902712 du 9 juillet 2019, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête enregistrée sous le numéro 19NT04275 le 6 novembre 2019, M. C..., représenté par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 9 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2019 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre de subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et sous la même astreinte, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Il soutient que :
- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- ces décisions ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elles ont été prises en méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les dispositions des articles L. 743-2 à L. 743-4, L. 744-9-1 et L. 571-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont non conformes à la directive 2013/32/UE du Parlement européen dès lors que celle-ci prévoit un droit à se maintenir sur le territoire jusqu'à la décision sur le recours prévu au § 6 de l'article 46, que le tribunal administratif ne peut tenir compte d'éléments nouveaux susceptibles de remettre en cause la décision de l'OFPRA et que la loi française crée un conflit de compétence entre juridictions administratives ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;
- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 février 2020, le préfet des Côtes d'Armor conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 septembre 2019.
II - Par une requête enregistrée sous le numéro 19NT04276 le 6 novembre 2019 Mme E..., représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du président du tribunal administratif de Rennes du 9 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 mai 2019 pris à son encontre ;
3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre de subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et sous la même astreinte, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Elle invoque les mêmes moyens que dans l'instance n°19NT04275.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 février 2020 le préfet des Côtes d'Armor conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... et Mme E..., ressortissants géorgiens déclarant être entrés en France le 15 janvier 2019 avec leurs deux enfants mineurs, ont présenté des demandes d'asile examinées en procédure accélérée et rejetées par des décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 mars 2019. Par des arrêtés du
10 mai 2019, le préfet des Côtes d'Armor a refusé de leur délivrer des titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par deux requêtes n°19NT04275 et 19NT04276 qu'il y a lieu de joindre, les intéressés relèvent appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes respectives tendant à l'annulation de ces arrêtés.
2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas allégué que M. C... et Mme E... entreraient, au titre des arrêtés contestés portant refus de titres de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, dans le champ d'application des dispositions des articles L. 571-4, L. 743-4 et L. 744-9-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, ils ne sauraient utilement se prévaloir de l'inconventionnalité de ces dispositions à l'appui de leurs conclusions en excès de pouvoir dirigées contre ces arrêtés.
3. En second lieu, si, en vertu des dispositions de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un demandeur d'asile a le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la date de lecture, le cas échéant, de la décision de la Cour nationale du droit d'asile statuant sur cette demande, ce principe est assorti de dérogations énumérées à l'article L. 743-2 du même code qui prévoit notamment que : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 (...) ". Cet article dispose que : " I. L'office statue en procédure accélérée lorsque : / 1° le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 (...) ". En vertu d'une décision du conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides adoptée le 9 octobre 2015 dans les conditions prévues par l'article L. 722-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la Géorgie figure au nombre des pays d'origine sûrs.
4. En outre, l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour ".
5. Il résulte des dispositions combinées du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, du 6° de l'article L. 511-1, du I bis de l'article L. 512-1 et de l'article L. 512-3 du même code, qu'un ressortissant étranger issu d'un pays sûr dont la demande d'asile a été rejetée selon la procédure accélérée, s'il ne bénéficie pas du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours, peut contester l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre. Ce recours présente un caractère suspensif et l'intéressé peut également, en application de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, saisir le tribunal administratif de conclusions aux fins de suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à ce que la Cour nationale du droit d'asile ait statué sur son recours, à l'appui desquelles il lui est loisible de présenter tout élément postérieur à la décision de l'OFPRA ou de la mesure d'éloignement et non, comme l'affirment les requérants, exclusivement des éléments préalables à l'édiction de ces décisions. En outre, le recours prévu par l'article L. 743-3 devant le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à fin de suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci n'est pas, par lui-même, de nature à faire naître un conflit de compétence entre le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné et la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, M. C... et
Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'il limite leur droit à se maintenir sur le territoire français et celles de l'article L. 743-3 du même code seraient incompatibles avec les objectifs définis par les dispositions de l'article 46 de la directive 2013/32/UE relatives au droit au recours effectif.
6. Pour le surplus, M. C... et Mme E... se bornent à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance et tirés de ce que les décisions contestées sont entachées d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de leur situation, de ce que les décisions portant refus de titres de séjour et obligation de quitter le territoire français ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de ce que les décisions fixant le pays de renvoi ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le premier juge.
7. Il résulte de ce qui précède que M. C... et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E
Article 1er : Les requêtes de M. C... et de Mme E... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Mme A... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Côtes d'Armor.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président,
- Mme B..., présidente-assesseure,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 novembre 2020
Le rapporteur
C. B...
Le président,
I. Perrot
Le greffier,
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Nos 19NT04275, 19NT042762