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13/10/2020 | FRANCE | N°19NT04292

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 13 octobre 2020, 19NT04292


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1906437 du 24 juin 2019, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 novembre 2019, Mme C..., représentée par Me E... D..., demande à la cour :

1

) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 24 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 juin 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1906437 du 24 juin 2019, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 novembre 2019, Mme C..., représentée par Me E... D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 24 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; cette décision n'était pas nécessaire dès lors qu'elle s'est présentée à toutes les convocations prises dans le cadre des décisions antérieures et que la perspective de son transfert est peu probable ; elle porte une atteinte disproportionnée à sa liberté d'aller et de venir ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit en se fondant sur la circonstance qu'elle était dans l'impossibilité de s'acquitter du paiement d'un titre de transport vers la Suisse.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 décembre 2019, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête est dépourvue d'objet eu égard à son caractère tardif dès lors que la Suisse est désormais libérée de son obligation de reprise en charge de Mme C... dont le transfert n'a pas été exécuté dans les six mois à compter de la notification du jugement du 19 février 2019 rejetant son recours dirigé contre les arrêtés du 23 janvier 2019.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante érythréenne, relève appel du jugement du 24 juin 2019 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a renouvelé son assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer présentées par le préfet :

2. Le préfet de Maine-et-Loire a indiqué dans son mémoire de première instance que l'arrêté du 23 janvier 2019 portant transfert vers la Suisse de Mme C..., dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 février 2019, n'avait pas été exécuté dans le délai de six mois suivant la notification de ce jugement, expirant le 19 août 2019. Il est ainsi devenu caduc ainsi qu'il le reconnaît lui-même. Toutefois, l'arrêté du 4 juin 2019 portant renouvellement de l'assignation à résidence de l'intéressée, qui a été pris avant l'expiration de ce délai de six mois, a produit des effets du fait de son exécution. En conséquence, contrairement à ce que soutient le préfet, la requête présentée par l'intéressée tendant à l'annulation de cette décision n'est pas dépourvue d'objet. Il y a lieu d'y statuer par le présent arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision d'assignation à résidence :

3. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...)1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (...) ". Aux termes de l'article R. 561-2 du même code : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) ".

4. En premier lieu, l'arrêté contesté vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment ses articles L. 561-2 et R. 561-2 et le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013. Il rappelle que Mme C... a fait l'objet d'un arrêté du 23 janvier 2019 décidant de son transfert aux autorités suisses et d'un arrêté du même jour l'assignant à résidence et que la légalité de ces décisions a été confirmée par le tribunal administratif de Nantes le 19 février 2019. Il indique que l'intéressée n'a effectué aucune diligence en vue d'exécuter la mesure de transfert, qu'elle n'est pas en possession d'un titre de transport et qu'elle n'a pas la possibilité d'en acquérir un légalement " étant dépourvue de ressources ". Il précise en outre, qu'elle dispose de garanties de représentation effectives du fait de sa domiciliation au FTDA de Nantes et qu'elle répond ainsi aux conditions du 1° bis de l'article L. 561-2-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, cette décision est suffisamment motivée.

5. En deuxième lieu, ainsi qu'il vient d'être rappelé au point 4, l'arrêté litigieux indique que Mme C... n'a pas les moyens de payer un titre de transport en vue d'organiser son retour en Suisse. Cette mention est toutefois sans incidence sur la légalité de cette décision, laquelle n'est pas fondée sur ce motif mais sur le fait que l'intéressée a fait l'objet d'un arrêté de transfert du 23 janvier 2019 vers ce pays. Par suite le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, si une mesure d'assignation à résidence apporte des restrictions à l'exercice de certaines libertés, en particulier la liberté d'aller et venir, elle ne présente pas, par elle-même, compte tenu de sa durée, de ses effets et de ses modalités d'exécution, le caractère d'une mesure privative de liberté. Dans ces conditions, l'arrêté assignant Mme C... à résidence, lui interdisant de quitter le département sans autorisation et lui imposant de se présenter au commissariat central de Nantes à 8h tous les mardis, mercredis et jeudis, à l'exception des jours fériés, ne méconnait pas les dispositions précitées de l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si la requérante soutient que ces mesures sont disproportionnées, elle n'invoque aucune raison qui en rendrait l'exécution impossible ou même difficile. La circonstance qu'elle s'est présentée à toutes les convocations prises dans le cadre des décisions antérieures et que la perspective de son transfert est peu probable, selon elle, eu égard au taux d'exécution de ce type de décisions, n'est pas de nature à établir le caractère disproportionné de l'arrêté litigieux dès lors qu'il est constant qu'elle n'a pas exécuté l'arrêté de transfert pris à son encontre le 23 janvier 2019 et que la perspective de son départ demeurait à la date du 4 juin 2019, une perspective raisonnable. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auraient été méconnues.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme B..., premier conseiller,

- M. Pons, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

O. COIFFET

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04292
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-13;19nt04292 ?
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