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08/10/2020 | FRANCE | N°18NT03398

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 08 octobre 2020, 18NT03398


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1701961 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 septembre 2018 et 17 septembre 2020 M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1701961 du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 septembre 2018 et 17 septembre 2020 M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il a subi ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure de taxation d'office est irrégulière dès lors que l'administration lui a adressé une mise en demeure du 29 juillet 2016 sans respecter les prescriptions de demande de justificatifs ;

- la mention de " cause juridique réelle " recherchée par l'administration sur la gestion de ses économies au sein de la même banque ne constitue pas une mise en demeure précise ;

- l'origine des espèces a été déterminée en 2007 ; l'établissement bancaire n'a pas manqué à ses obligations de contrôle et de surveillance des fonds en 2014 ;

- une réponse peu précise n'est pas assimilable à un défaut de réponse si la demande est elle-même peu précise ;

- il a fourni tous les éléments matériels ; la charge de preuve des numéros de billets de banque ne peut lui appartenir ;

- seule une instruction pénale permet d'effectuer des recherches en matière cambiaire ;

- l'administration ne peut présumer de l'origine illicite de revenus dès lors que les conditions de réalisation de déposer des économies en espèces dans un coffre répondent à une justification économique et patrimoniale, justifiée par la peur de la crise bancaire entre 2007 et 2012 ;

- le service n'a relevé aucune anomalie sur son train de vie ou sa situation patrimoniale ; il n'a effectué aucune balance d'espèces et n'a pas apporté aucun élément sur l'existence d'activités occultes ou frauduleuses ; il n'a pas utilisé les moyens prévus à l'article L. 228 du livre des procédures fiscales ;

- en l'absence de soupçon de fraude, l'intention d'un manquement d'éluder l'impôt n'est pas établie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions indemnitaires ne sont pas recevables dans le cadre d'un contentieux de l'assiette de l'impôt ;

- les autres moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de la relance a été enregistré le 21 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un examen de la situation fiscale personnelle de M. B..., l'administration a taxé d'office une somme de 145 000 euros en tant que revenus d'origine indéterminée au titre de l'année 2014. Par un jugement du 5 juillet 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. B... tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2014. M. B... relève appel de ce jugement et demande également la condamnation de l'Etat à réparer un préjudice moral qu'il aurait subi.

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

2. Aux termes de l'article R. 772-1 du code de justice administrative : " Les requêtes en matière d'impôts directs et de taxe sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées dont l'assiette ou le recouvrement sont confiés à la direction générale des impôts sont présentées, instruites et jugées dans les formes prévues par le livre des procédures fiscales. / Les requêtes relatives aux taxes dont le contentieux ressortit à la juridiction administrative et autres que celles qui sont mentionnées à l'alinéa 1 sont, sauf disposition spéciale contraire, présentées et instruites dans les formes prévues par le présent code. ". Ces dispositions s'opposent à ce que des demandes de dommages et intérêts puissent être jointes aux demandes de décharge ou réduction d'impôts du fait qu'elles sont jugées selon des règles de procédure différentes. Les conclusions indemnitaires présentées par M. B... en réparation d'un préjudice moral qu'il aurait subi ne sont ainsi pas recevables. Dès lors, il y a lieu d'accueillir la fin de non-recevoir en ce sens opposée par le ministre de l'action et des comptes publics à ces conclusions.

Sur les conclusions à fin de décharge :

3. La procédure de taxation d'office ayant été appliquée à M. B..., il lui incombe, en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition.

4. M. B... a clôturé les 13 et 14 décembre 2007 ses trois comptes d'épargne (compte sur livret, compte épargne logement et livret de développement durable) dont les montants s'élevaient respectivement à 81 846,35 euros, 55 114,69 euros et 5 309,34 euros, soit un montant global de 142 270,38 euros, pour les créditer sur un compte bancaire aux mêmes dates. Le 21 décembre 2007, cette somme globale et une somme complémentaire de 2 729,62 euros, soit un total de 145 000 euros, ont été mises en réserve sous forme d'espèces dans un coffre bancaire loué à cet effet le 13 décembre 2007. Ce dépôt dans le coffre est resté inchangé entre 2008 et 2013. Au cours de l'année 2014, M. B... a procédé à dix-sept retraits d'espèces contenus dans le coffre pour les déposer sur un compte bancaire ouvert à son nom à hauteur de la somme totale de 95 000 euros. Un dernier retrait d'espèces, soit une somme de 50 000 euros, a eu lieu le 5 décembre 2014, date de la résiliation du contrat de location du coffre, pour créditer de cette somme un second compte également ouvert à son nom. Dès lors, M. B... justifie d'une corrélation entre, d'une part, la mise en réserve de la somme de 145 000 euros dans son coffre en 2007 et, d'autre part, le versement d'un même montant sur deux comptes bancaires en 2014. Dans les circonstances très particulières de l'espèce, il apporte ainsi la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration qui, à tort, a imposé la somme de 145 000 euros en tant que revenus d'origine indéterminée en 2014.

5. Il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Il s'ensuit également qu'une somme de 1 500 euros doit être mise à la charge de l'Etat, partie perdante, au titre des frais liés au litige.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen 5 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : M. B... est déchargé, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2014.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. D... B... et au ministre des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. A..., président assesseur,

- M. Brasnu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2020.

Le rapporteur,

J.-E. A...Le président,

F. Bataille

La greffière,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT03398


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03398
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : COURREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-10-08;18nt03398 ?
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