Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... G... et Mme C... E..., agissant en leur nom propre et en leur qualité de représentants légaux de M. F... G..., M. D... G... et Mme A... G..., ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Etat à leur verser une somme totale de 12 104 euros en réparation des préjudices subis en raison de la perquisition effectuée à leur domicile le 20 décembre 2016, assortie des intérêts et de leur capitalisation.
Par un jugement n° 1800141 du 4 octobre 2019, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à leur verser une somme globale de 500 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l'opération de perquisition menée à leur domicile, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 septembre 2017 et de leur capitalisation à compter du 14 septembre 2018 (article 1er), a mis à la charge de l'Etat le versement à M. B... G... et Mme C... E... de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de la demande (article 3).
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2019, M. B... G... et Mme C... E..., agissant en leur nom propre et en leur qualité de représentants légaux de M. F... G..., M. D... G... et Mme A... G..., représentés par la SELARL ABC, demandent à la cour :
1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 4 octobre 2019 et de porter à 12 104 euros la somme principale à laquelle l'Etat est condamné ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- à la suite de l'intervention des forces de police à leur domicile, le jeune F... a présenté un hématome de la main gauche et deux éraflures rectilignes sur 3 cm de la main gauche, face dorsale à la racine du pouce ainsi qu'une anxiété importante ;
- son frère et sa soeur présentaient également une forte anxiété ;
- des anxiolytiques ont dû être prescrits au chien de la famille ;
- ainsi un préjudice moral de 12 000 euros a été subi par la famille auquel s'ajoute 104 euros de frais de vétérinaire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jouno, rapporteur,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. G..., Mme E... et leurs trois enfants, F..., Nohra et Maxence, sont locataires d'un appartement à Brest. Le 20 décembre 2016 au matin, vers 8 heures 20, une perquisition a été menée dans cet appartement. Elle visait un ou plusieurs membres de la famille ayant précédemment occupé cet appartement. Par un courrier du 11 septembre 2017, M. G... et Mme E... ont demandé au garde des sceaux, ministre de la justice, l'indemnisation des conséquences dommageables de cette perquisition, qui ne les visait pas, réalisée à leur domicile. Cette demande a été rejetée implicitement. Ils ont alors saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande indemnitaire. Par un jugement du 4 octobre 2019, les premiers juges ont condamné l'Etat à leur verser une somme principale de 500 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de la perquisition. Par leur requête, M. G... et Mme E... demandent à la cour de réformer ce jugement et de porter à 12 104 euros l'indemnité à laquelle l'Etat a été condamné.
Sur la responsabilité sans faute de l'Etat :
2. S'il n'appartient qu'à la juridiction judiciaire de connaître d'actions mettant en cause la responsabilité pour faute de l'Etat du fait du fonctionnement du service public de la justice judiciaire, il appartient à la juridiction administrative, sauf dispositions législatives contraires, de connaître des actions fondées sur la responsabilité sans faute de l'Etat.
3. Les premiers juges ont estimé que la responsabilité sans faute de l'Etat était engagée à raison des opérations de perquisition judiciaire mentionnées au point 1 et ont alloué à ce titre à M. G... et Mme E... une indemnité de 500 euros. A l'appui de leur appel, les requérants exposent que cette indemnité a été sous-évaluée.
4. D'une part, s'ils soutiennent qu'ils ont engagé, du fait des préjudices subis par leur chien lors de la perquisition, des frais de vétérinaire d'un montant de 104 euros, il n'est pas établi, au vu de l'instruction, que ces frais trouvent effectivement leur cause directe et nécessaire dans cette intervention.
5. D'autre part, il résulte de l'instruction, notamment du certificat médical et de l'attestation d'un pédopsychiatre, que la perquisition judiciaire dont il s'agit, qui a été réalisée au domicile des requérants alors qu'en réalité, elle visait non pas un membre de leur foyer mais une ou plusieurs personnes ayant occupé antérieurement le même logement, a causé un grave traumatisme psychologique, notamment aux jeunes F..., Maxence et Nohra, nés respectivement en 2005, 2007 et 2010, en raison de l'intrusion inopinée et violente de policiers armés, munis de boucliers, de gilets pare-balles et de casques à une heure matinale. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral en résultant en l'indemnisant par le versement à M. G... et Mme E..., en leur nom et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs, d'une indemnité globale de 7 500 euros en réparation du préjudice anormal et spécial qu'ils ont ainsi subi.
6. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont limité à 500 euros l'indemnité due par l'Etat et à demander que cette indemnité soit portée à 7 500 euros.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement aux requérants d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : L'indemnité de 500 euros à laquelle le jugement n° 1800141 du tribunal administratif de Rennes en date du 4 octobre 2019 a condamné l'Etat est portée à 7 500 euros.
Article 2 : Le jugement n° 1800141 du tribunal administratif de Rennes en date du 4 octobre 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. G... et Mme E... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... G... et Mme C... E... ainsi qu'au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 octobre 2020.
Le rapporteur,
T. JounoLe président,
L. Lainé
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT04710
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