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31/07/2020 | FRANCE | N°19NT00145

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 31 juillet 2020, 19NT00145


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'une part, d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le maire de Véretz a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et, d'autre part, de condamner la commune de Véretz à lui verser la somme de 128 121 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il s'estime victime de la part de sa hiérarchie, assortie des intérêts au taux légal à compter de

la date de réception de sa réclamation préalable.

Par un jugement n°s 1601556,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif d'Orléans, d'une part, d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le maire de Véretz a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et, d'autre part, de condamner la commune de Véretz à lui verser la somme de 128 121 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il s'estime victime de la part de sa hiérarchie, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa réclamation préalable.

Par un jugement n°s 1601556, 1601825 du 24 mai 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 janvier et le 20 septembre 2019, M. B..., représenté par la SCP KPL Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 24 mai 2018 ;

2°) de condamner la commune de Véretz à lui verser les sommes de 60 000 euros à titre de réparation du préjudice moral et de 40 000 euros à titre de réparation des troubles dans ses conditions d'existence suite au harcèlement moral dont il prétend avoir été victime de la part de sa hiérarchie ;

3°) d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le maire de Véretz a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle ;

4°) d'enjoindre au maire de la commune de Véretz de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande visant à obtenir le bénéfice de la protection fonctionnelle, dans un délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir.

5°) de mettre à la charge de la commune de Véretz la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

- c'est à tort que le tribunal a estimé que ses conditions matérielles de travail, les missions qui lui ont été confiées, la surveillance exercée par le directeur des services techniques, le comportement dénigrant et inapproprié adopté par sa hiérarchie, l'avertissement du 18 juin 2015 qui lui a été infligé et le règlement de ses heures supplémentaires n'étaient pas de nature à caractériser des faits constitutifs de harcèlement moral ;

- les faits de harcèlement moral dont il a été victime n'ont nullement commencé en 2014, cette année n'est qu'une étape dans la dégradation de ses contions de travail ;

- le comportement de l'administration est à l'origine de la dégradation de son état de santé ;

- il est fondé solliciter une indemnité de 60 000 euros à titre de réparation du préjudice moral et de 40 000 euros à titre de réparation des troubles dans ses conditions d'existence suite au harcèlement moral subi.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 10 mars 2016 :

- elle a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juin 2019, la commune de Véretz conclut au rejet de la requête et de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, à titre principal, que la requête est irrecevable en ce qu'elle est tardive et que les demandes de M. B... se heurtent à la prescription quadriennale de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 et, à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par M. B... sont infondés.

L'instruction a été close au 11 octobre 2019, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative

La demande d'aide juridictionnelle de M. B... a été rejetée par une décision du 29 octobre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2012-924 du 30 juillet 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été recruté par la voie du détachement par la commune de Véretz le 5 septembre 2011, au titre des emplois réservés, dans le cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux de la fonction publique territoriale, afin d'exercer les fonctions de responsable administratif des services techniques. A l'issue de son année de détachement, il a été intégré, par arrêté du 30 juillet 2012, dans le cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux. Par une réclamation préalable reçue le 19 janvier 2016 par la commune de Véretz, il a formé une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il aurait été victime de la part de sa hiérarchie. Une décision implicite de rejet a été opposée à sa demande. Le requérant a alors, par courrier du 3 mars 2016, demandé au maire de Véretz de lui accorder la protection fonctionnelle. Le maire, par décision du 10 mars 2016, a refusé de lui accorder le bénéfice de cette protection. Par sa requête visée ci-dessus, M. B... relève appel du jugement du 24 mai 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant d'une part, à l'annulation de la décision du 10 mars 2016 par laquelle le maire de Véretz a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle et, d'autre part, à la condamnation de la commune de Véretz à lui verser une indemnisation en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements de harcèlement moral dont il aurait été victime de la part de sa hiérarchie.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la demande indemnitaire :

2. Aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / La collectivité publique est tenue d'accorder sa protection au fonctionnaire ou à l'ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales à l'occasion de faits qui n'ont pas le caractère d'une faute personnelle. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) ".

3. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

4. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

5. M. B... soutient que ses conditions de travail n'ont cessé de se dégrader depuis son intégration, notamment en raison du comportement de son supérieur hiérarchique direct, le directeur des services techniques. Il indique ainsi qu'il a été contraint de partager le bureau du directeur des services techniques alors qu'un bureau était vacant, qu'il ne disposait que d'un bureau, d'un ordinateur et d'une chaise de bureau inadaptée, sans aucun meuble pour ranger ses dossiers. Il ajoute qu'il était obligé de se lever à l'entrée de chaque visiteur dans le bureau et que ce dernier était placé de telle sorte que son supérieur hiérarchique disposait d'une vue directe sur son écran d'ordinateur. Il soutient également que les missions qui lui ont été confiées ne correspondaient pas à la fiche de mission qui lui a été remise lors de sa prise de fonctions en 2011 et que ses missions n'ont cessé d'augmenter et d'être modifiées, entraînant une surcharge de travail. Selon le requérant, la commune, qui était informée de son inaptitude physique, n'en n'a pas tenu compte dans la définition de ses missions. M. B... fait par ailleurs valoir qu'il lui a été reproché, en 2014, son adhésion en tant que membre à une organisation syndicale, qu'il a fait l'objet de contrôle permanent de la part de sa hiérarchie, ses conversations, ses horaires, ses relations de travail étant surveillés et qu'il a été mis à l'écart. Le requérant produit différents témoignages, dont celui de Mme G..., en date du 29 janvier 2016, qui fait état de ce qu'elle s'est souvent opposée au directeur des services techniques qui supervisait les demandes adressées à M. B..., lui interdisant même de lui parler. Le requérant ajoute qu'il a été régulièrement victime de propos dégradants, humiliants et inappropriés de sa hiérarchie, que le directeur général des services aurait volontairement fait obstacle au traitement de ses demandes de révision des comptes rendus d'entretien professionnel afférents aux années 2014 et 2015, que la commune refuse de lui régler les heures supplémentaires effectuées, que l'animosité de sa hiérarchie à son égard est liée au fait qu'il aurait soutenu une collègue se disant elle-même victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie.

6. Les éléments de fait avancés par M. B... sont susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

7. En réponse, la commune de Véretz fait valoir que le grief de harcèlement moral est infondé, que la dégradation progressive des conditions de travail n'est aucunement avérée, que l'affirmation selon laquelle le travail du requérant faisait systématiquement l'objet de reproches ne recouvre aucune réalité, que M. B... a disposé des mêmes moyens et outils de travail que ses collègues et exerçait ses fonctions dans les mêmes conditions que ces derniers, que la prétendue augmentation de la charge de travail n'est pas démontrée, dès lors que les missions de l'intéressé sont expressément mentionnées dans sa fiche de poste, qu'elle a pris en considération l'inaptitude physique de M. B... dans la définition de ses misions, que le dénigrement constant et le caractère partial des décisions administratives défavorables prises à l'encontre de l'intéressé ne sont nullement établis.

8. En premier lieu, si M. B... a partagé le bureau du directeur des services techniques à la suite de son recrutement, cette situation n'est pas, en elle-même, de nature à caractériser une situation de harcèlement. En outre, il n'est pas contesté que l'intéressé a obtenu son propre bureau au plus tard en janvier 2014, ainsi qu'un siège de bureau ergonomique. Les allégations du requérant selon lesquelles le directeur des services techniques l'aurait contraint à procéder à son déménagement en dehors de ses heures de travail et à archiver plus de dix ans de documents avant de quitter le bureau ne reposent sur aucun élément. A cet égard, les attestations établies le 29 janvier 2016 et le 6 novembre 2016 par Mme G..., l'une des élues en fonction de 2008 à 2014, se bornant à relater des faits rapportés et les autres attestations produites, peu circonstanciées s'agissant des souffrances au travail de M. B... et louant son travail en général, ainsi que les photographies produites, ne sont pas de nature à établir le caractère inadapté des conditions de travail du requérant et les circonstances dégradantes alléguées de son changement de bureau. De même, il ne résulte pas de l'instruction que M. B... aurait fait l'objet d'un traitement moins favorable que ses collègues en matière d'équipement mobilier, s'agissant notamment de sa demande d'obtention d'un siège de bureau ergonomique. Par suite, les conditions matérielles de travail de l'intéressé ne permettent pas de révéler des agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de la commune.

9. En deuxième lieu, M. B... a été recruté à compter du 5 septembre 2011 en qualité de responsable administratif des services techniques de la commune avec pour missions le suivi administratif des services techniques, la responsabilité des fêtes et cérémonies, la responsabilité de la vie associative et sportive, ainsi qu'il résulte de la fiche de missions signée par l'intéressé lors de sa prise de fonctions. Il résulte de l'instruction que le médecin de prévention a émis, le 20 septembre 2012, lors de la visite d'embauche de M. B..., un avis favorable d'aptitude sans aucune restriction ou recommandation. Si, compte tenu des difficultés rencontrées par M. B... dans l'exercice de ses fonctions et la survenance d'un accident reconnu imputable au service survenu le 8 novembre 2013, le maire a, à l'occasion de la réorganisation des services de la commune, redéfini le périmètre des missions de l'intéressé, ce dernier s'étant vu confier les seules missions de " responsable vie associative, fêtes et cérémonies ", à compter du 1er septembre 2014, ainsi qu'il ressort de la fiche de mission signée par le requérant le 25 août 2014, il est constant que le maire de Véretz a sollicité, le 31 octobre 2014, l'assistance du correspondant handicap et reclassement du centre de gestion de la fonction publique territoriale, lequel a entendu M. B... le 28 novembre 2014, afin d'étudier les possibilités d'amélioration des conditions de travail de l'intéressé. Les missions définies le 25 août 2014 ont été confirmées par une seconde fiche de poste signée par le requérant le 20 octobre 2014, ajoutant le " suivi de la sécurité des bâtiments communaux : sécurité incendie, gaz, électricité (...) ". Aucun élément ne permet d'affirmer que les missions ainsi définies, établies en concertation avec l'intéressé, auraient entraîné une surcharge de travail ou seraient contraires à l'avis du médecin de prévention rendu le 15 janvier 2015, ou non conformes aux missions définies par les dispositions du décret n° 2012-924 du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux. Par suite, ces éléments de fait ne sont pas de nature à établir la réalité d'un accroissement de la charge de travail au-delà du raisonnable, alors même que le requérant se plaint également du retrait d'une partie de ses missions, ou l'absence de prise en considération par la commune de son inaptitude physique.

10. En troisième lieu, aucune des pièces produites ne permet d'établir la réalité de la surveillance permanente dont M. B... se plaint d'avoir été l'objet au regard de ses horaires. Il ne résulte pas davantage de l'instruction que l'intéressé aurait fait l'objet de reproches de la part de sa hiérarchie en 2014, liés à son adhésion à une organisation syndicale. Enfin, la circonstance que le requérant n'aurait pas été informé et invité à participer à une réunion de travail organisée le 19 novembre 2015, relative notamment à la détermination de l'emploi du temps de l'inauguration d'un nouveau complexe sportif et à la réorganisation de l'ensemble des équipements de la commune à la rentrée sportive 2016/2017, ne saurait, à elle seule, démontrer une quelconque volonté de sa hiérarchie de le mettre à l'écart. Par suite, il ne résulte ainsi pas de l'instruction que le comportement du maire de Véretz et du directeur des services techniques aurait excédé l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

11. En quatrième lieu, aucun élément ne permet d'établir que le requérant aurait été régulièrement victime de propos dégradants, humiliants et inappropriés de la part de sa hiérarchie. Si M. B... soutient avoir été pris à parti le 15 octobre 2015 par un élu référent mécontent au regard du planning de location de certaines salles, ainsi que le 10 février 2016 par un élu président d'une association, les pièces produites, à savoir des courriels de M. B... à l'attention du directeur général des services, ne sont pas de nature à établir la réalité des agressions verbales alléguées et un comportement inapproprié de la part de la hiérarchie de l'intéressé. De même, si M. B... fait valoir qu'il a été victime de " séances répétées de réprimandes publiques " et de propos à caractère injurieux de la part de sa hiérarchie, notamment lors de l'entretien d'évaluation de l'année 2015, l'intéressé n'apporte aucun début de preuve à l'appui de ses allégations. En outre, il résulte de l'instruction que les demandes de révision des comptes rendus d'entretien professionnel afférents aux années 2014 et 2015 ont été examinées et ont recueilli un avis défavorable de la commission administrative paritaire. Aucun élément ne permet d'attester que ces évaluations professionnelles, relevant que l'intéressé manque de souplesse dans ses positions, qu'il entretient des relations difficiles si ce n'est maladroites avec les élus et ses collègues, et regrettant son absence de toute force de proposition lors de situation imprévue, seraient infondées. Par suite, les relations de M. B... et de sa hiérarchie en l'espèce ne sauraient relever d'une situation de harcèlement moral.

12. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que M. B... s'est vu infliger, par décision du 18 juin 2015, un avertissement pour avoir employé un ton déplacé envers l'adjointe à la culture, en sous-entendant qu'elle lui demandait de favoriser l'une des associations locales, et pour ne pas s'être conformé aux directives des élus. Le requérant, qui se borne à faire valoir son incompréhension quant au prononcé d'une sanction à son égard, ne démontre pas que la mesure disciplinaire ainsi infligée répondrait à un objectif étranger à l'intérêt et à la bonne administration du service. De même, le refus de la commune de régulariser les heures supplémentaires réellement effectuées n'est pas établi au vu des éléments du dossier. Enfin, la production du témoignage de Mme D... n'est pas de nature à démontrer la réalité d'une quelconque animosité du directeur des services techniques à l'égard de l'intéressé en raison du soutien qu'il affirme avoir apporté à sa collègue Mme E..., après que celle-ci se serait plainte, auprès du requérant, d'agissement de harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique directe. Au demeurant, il résulte de l'instruction que si M. B... a déposé plainte pour harcèlement moral contre le maire de Veretz, le directeur général des services et le directeur des services techniques, la commune fait valoir sans être contredite que la plainte du requérant a été classée sans suite.

13. En dernier lieu, il est constant que M. B... souffre d'un état dépressif, pathologie pour laquelle il a été placé en congé de longue durée à compter du 2 mars 2016. Il résulte de l'instruction et notamment des conclusions du rapport d'expertise médicale établi le 16 avril 2013 par un médecin expert psychiatre qu'il n'existe pas de difficulté majeure dans le cadre du travail de l'intéressé au sein de la commune de Véretz depuis septembre 2011, que le requérant souffre d'un syndrome psycho-traumatique et présente un état antérieur à 2010 qui évolue depuis 2011. Si, à la lecture du second rapport d'expertise établi le 27 mai 2015 par ce même expert, le requérant a fait état d'une situation de harcèlement dont il serait victime au sein de la mairie, l'expert indique que s'ajoute à son état dépressif une alcoolisation. Ni ces documents ni les autres pièces produites au dossier ne permettent de tenir pour établi que M. B... aurait été victime de la part de l'administration d'un comportement vexatoire, dégradant et répété, depuis son recrutement ou depuis 2014, susceptible de caractériser des faits de harcèlement moral commis à son encontre, ni par suite que le comportement de l'administration serait à l'origine de la dégradation de son état de santé.

14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Véretz à lui verser les sommes réclamées suite au harcèlement moral allégué.

Sur la demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mars 2016 :

15. En premier lieu, le maire de Véretz, après avoir rappelé que M. B..., estimant être victime de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie, a sollicité la protection fonctionnelle prévue à l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, a indiqué le motif pour lequel il a rejeté cette demande, à savoir que l'intéressé ne communiquait " dans le cadre de sa demande aucun élément permettant d'établir en quoi il serait victime de harcèlement moral et de nature à établir la réalité de ce dernier ". Par suite, la décision attaquée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est suffisamment motivée.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...) ". Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence.

17. La décision contestée est signée par Mme F..., maire de Véretz, autorité compétente, au regard de missions qui lui sont confiées en vertu des dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales, pour prendre une décision relative à l'application des dispositions de l'article 11 précitées. La circonstance que Mme F... ait pris la décision du 10 mars 2016, alors qu'elle était nommément visée par la demande du bénéfice de la protection fonctionnelle émise par M. B... le 3 mars 2017, est sans incidence sur la légalité de la décision en cause, au regard du caractère infondé de la demande de l'intéressé

18. Au regard des éléments développés précédemment, M. B... n'établit pas qu'il a été victime de la part de l'administration d'un comportement vexatoire, dégradant et répété depuis son recrutement, susceptible de caractériser des faits de harcèlement moral commis à son encontre, ni, par suite, que le comportement de l'administration serait à l'origine de la dégradation de son état de santé. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 10 mars 2016 attaquée est entachée d'une erreur d'appréciation.

19. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mars 2016 par laquelle le maire de Véretz a refusé de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle.

20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir et l'exception de prescription quadriennale opposées par la commune, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Le présent arrêt qui rejette les conclusions indemnitaires et à fin d'annulation du requérant n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions visées ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Véretz, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. B... au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme réclamée par la commune de Véretz au titre des mêmes frais.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Véretz sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune de Véretz.

Délibéré après l'audience du 17 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 juillet 2020.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00145


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00145
Date de la décision : 31/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SCP PIELBERG KOLENC

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-31;19nt00145 ?
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