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17/07/2020 | FRANCE | N°20NT01354

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 17 juillet 2020, 20NT01354


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 mars 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 1er décembre 2016 prise par les autorités consulaires françaises à Tanger refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjointe de ressortissant français.

Par un jugement n° 1705040 du 13 mars 2020 le tribunal administratif de Nantes a rejet

sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 mars 2017 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision du 1er décembre 2016 prise par les autorités consulaires françaises à Tanger refusant de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjointe de ressortissant français.

Par un jugement n° 1705040 du 13 mars 2020 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2020, Mme A... E..., représentée par Me Boezec, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 mars 2020 ;

2°) d'annuler cette décision du 30 mars 2017 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité dans le délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir ou subsidiairement de réexaminer sa demande dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- une erreur manifeste d'appréciation a été commise puisqu'aucune fraude ne peut être constatée ; la réalité de l'intention matrimoniale doit être constatée ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 juin 2020 le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Brisson,

- les observations de Me Moreau, substituant Me Boezec, représentant Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... E..., née le 1er janvier 1957, de nationalité marocaine, a épousé, le 9 septembre 2016 à Roubaix (Nord), M. I... G..., né le 20 janvier 1946, de nationalité française. Après être retournée au Maroc, Mme E... a déposé, le 26 septembre 2016, une demande de visa de long séjour en qualité de conjointe de ressortissant français auprès des autorités consulaires françaises à Tanger (Maroc). Par une décision du 1er décembre 2016, les autorités consulaires ont rejeté sa demande au motif de l'absence d'intention matrimoniale compte tenu de l'aveu par elle-même ou son conjoint de ce que leur mariage avait pour seul objet l'obtention d'un visa pour une installation en France. Par un recours présenté le 2 février 2017, Mme E... a contesté cette décision. Par une décision du 30 mars 2017 la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté ce recours et confirmé le refus de délivrance d'un visa de long séjour à Mme E.... Aux termes du jugement du 13 mars 2020 dont il est relevé appel par cette dernière, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public (...) ". Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté devant l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener en France une vie familiale normale. Toutefois, des circonstances particulières tenant à des motifs tirés par l'administration d'une fraude au mariage ou de la nécessité de préserver l'ordre public sont de nature à justifier légalement un refus de visa.

3. Pour refuser de délivrer le visa sollicité, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur les déclarations de l'époux de Mme E..., M. G..., lequel a déclaré une rupture de la vie commune et le caractère complaisant du mariage.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après que les futurs époux ont été entendus le 1er juillet 2016 en vue du mariage prévu le 6 août 2016, M. G... s'est rétracté le 8 juillet 2016 et a demandé l'annulation du mariage projeté. Il est toutefois revenu sur ses déclarations et le mariage a été célébré le 9 septembre 2016. Mme E..., dont la durée de validité du visa qui lui avait été délivré avait expiré le 27 juillet 2016, a ensuite quitté le territoire national le 14 septembre 2016 et a présenté, le 26 septembre suivant une demande de visa de long séjour en qualité de conjointe de français.

5. La requérante soutient que M. G..., lorsqu'il s'est rétracté de son intention de se marier, était sous l'emprise, non seulement de l'alcool, mais également d'une tierce personne, abusant de sa vulnérabilité, qui lui aurait suggéré de déclarer qu'il s'agit d'un mariage blanc. Elle fait également valoir, ainsi que le révèle le passeport de M. G..., que celui-ci s'est rendu à plusieurs reprises, entre octobre 2016 et août 2019, au Maroc afin de la rejoindre et fournit plusieurs attestations de compatriotes mentionnant que l'époux de Mme E... a résidé à plusieurs reprises à ses côtés dans son pays d'origine.

6. Toutefois, il ressort notamment de l'enquête de police que, lors de son audition, M. G... a déclaré ne pas connaître l'orthographe du nom de son épouse et avoir accepté le mariage organisé par la fille et le gendre de Mme E....

7. La circonstance que M. G... se soit rendu à plusieurs reprises au Maroc n'est pas à elle seule, en l'absence de toutes justifications de relations épistolaires, téléphoniques ou électroniques entre les époux ou de la contribution, apportée par chacun d'eux, à hauteur de ses ressources, aux charges du ménage, de nature à démontrer que les époux ont entretenu une relation de nature matrimoniale.

8. Dans ces conditions la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a pu, sans faire une inexacte application des dispositions précitées, rejeter la demande de visa sollicité en se fondant sur la circonstance que le mariage en cause avait été contracté à des fins étrangères à l'union matrimoniale de sorte qu'il présentait un caractère frauduleux.

9. Eu égard au caractère frauduleux du mariage, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée portée par la décision attaquée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

11. Le rejet des conclusions à fin d'annulation présentées par Mme E... n'appelle aucune mesure particulière d'exécution. Les conclusions présentées par cette dernière tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

12. Enfin les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par Mme E... ne peuvent dès lors être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020 , à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. Brisson

Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT01354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01354
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SELARL BOEZEC CARON BOUCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;20nt01354 ?
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