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17/07/2020 | FRANCE | N°19NT04820

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 juillet 2020, 19NT04820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 14 juin 2019 par lesquels le préfet du Morbihan a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office.

Par un jugement nos 1903322, 1903323 du 2 août 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist

rée le 13 décembre 2019 M. et Mme D..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... et Mme B... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 14 juin 2019 par lesquels le préfet du Morbihan a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office.

Par un jugement nos 1903322, 1903323 du 2 août 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 décembre 2019 M. et Mme D..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 août 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet du Morbihan du 14 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan de leur délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer leur situation et de leur délivrer dans l'attente des autorisations provisoires de séjour, dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative la somme de 2 000 euros à verser à leur conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de leur situation particulière ;

- le préfet du Morbihan a entaché les arrêtés contesté d'une erreur de fait en fixant la Russie comme pays destination de la mesure d'éloignement de M. A... D... alors qu'il est Géorgien ; cette erreur est susceptible d'entraîner l'éclatement de leur cellule familial ;

- les arrêtés contestés portent une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions fixant le pays de destination sont contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 mars 2020 le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., ressortissants géorgiens, sont entrés en France le 10 juillet 2018 avec leur fille. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des 30 août 2018 et 28 septembre 2018, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 22 mars 2019. Par des arrêtés du 14 juin 2019, le préfet du Morbihan a refusé de leur accorder un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être renvoyés d'office.

M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 2 août 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs recours tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. En premier lieu, les arrêtés contestés visent les textes applicables et mentionnent les éléments de fait propres à la situation de M. et Mme D.... Ils sont donc suffisamment motivés et ne révèlent pas un défaut d'examen de la situation particulière des requérants, alors même que l'arrêté pris à l'encontre de M. D... indique par erreur que celui-ci pourra être renvoyé d'office en Russie, erreur d'ailleurs rectifiée dès le 17 juin 2019 par un arrêté modificatif fixant la Géorgie comme pays de destination.

3. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le préfet du Morbihan a pris, trois jours seulement après l'arrêté contesté du 14 juin 2019, un nouvel arrêté modifiant le pays vers lequel M. D... pourra être reconduit d'office. Aucune erreur de fait ne peut donc lui être reprochée.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein

droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. D'une part, il ressort des déclarations de M. D... devant l'OFPRA qu'après avoir séjourné en France entre 2010 et 2013 il est rentré en Géorgie et s'y est maintenu jusqu'au 10 juillet 2018, date de son retour en France. Contrairement à ce qu'il soutient, M. D... ne justifie donc pas d'une résidence continue en France depuis 2010. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants seraient empêchés de reformer leur cellule familiale avec leurs deux enfants en Géorgie, pays où ils n'établissent pas être sans attaches privées et familiales, en particulier du côté de Mme D.... Enfin, les requérants ne justifient d'aucune insertion particulière dans la société française. Dans ces conditions, et alors même que la tante et la soeur de M. D... vivent en France en situation régulière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale des requérants une atteinte disproportionnée, contraire aux dispositions et aux stipulations rappelées au point précédent.

6. En quatrième lieu Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".

7. Les circonstances exposées par M. et Mme D... et rappelées au point 5 ne peuvent être regardées comme des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Morbihan a pu, sans entacher son appréciation d'une erreur manifeste, refuser de régulariser leur situation sur le fondement de ces dispositions.

8. En dernier lieu, il convient d'écarter le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente rapporteure,

- M. Mony, premier conseiller,

- Mme Le Barbier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

La rapporteure

N. E... L'assesseur le plus ancien

A. Mony

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04820


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04820
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE BOURHIS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;19nt04820 ?
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