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17/07/2020 | FRANCE | N°19NT04576

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 17 juillet 2020, 19NT04576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B..., alias D..., a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n°1903745 du 30 octobre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :>
Par une requête enregistrée le 28 novembre 2019 M. B..., représenté par

Me E..., demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B..., alias D..., a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet d'Indre-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, lui a fait interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n°1903745 du 30 octobre 2019, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 novembre 2019 M. B..., représenté par

Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 octobre 2019 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 du préfet d'Indre-et-Loire ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de séjour :

- la décision contestée méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il dispose désormais de l'essentiel de ses liens privés et familiaux en France, où il vit sans discontinuer depuis dix ans ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision contestée a été prise en dehors de tout examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que sa compagne n'est pas admissible en Serbie ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour :

- cette décision est insuffisamment motivée et est disproportionnée ; elle révèle une absence d'examen personnalisé de sa situation, notamment la durée de son séjour en France ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

- cette décision est illégale du fait de l'illégalité des autres décisions prises à son encontre ;

- cette décision ne lui a pas été notifié conformément aux dispositions de l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête de M. B... a été transmise au préfet d'Indre-et-Loire, qui n'y a pas répondu.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite du rejet de sa seconde demande de réexamen de sa demande d'asile par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 14 août 2019, le préfet d'Indre-et-Loire a pris le 25 septembre 2019 à l'encontre de M. C... B...,, alias C... D..., lequel est en possession d'un passeport serbe, un arrêté portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination, lui faisant interdiction de retour pour une durée de deux ans et l'assignant à résidence. Par un jugement du 30 octobre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande d'annulation de cet arrêté formée par M. B..., alias D.... Ce dernier relève appel de ce jugement.

Sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 décembre 2019. Par suite, sa demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle est devenue sans objet.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

3. En premier lieu, l'arrêté contesté ne refuse pas à M. B..., alias D..., la délivrance d'un titre de séjour mais, ayant notamment été pris sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il se limite à obliger l'intéressé à quitter le territoire français dès lors que, du fait du refus opposé à sa seconde demande de réexamen de sa demande d'asile M. B..., alias D..., ne bénéficie plus du droit à se maintenir sur le territoire français en application de l'article L.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, sa demande d'annulation d'un prétendu refus de séjour ne peut, en tout état de cause, être accueillie.

4. Si M. B..., alias D..., soutient en second lieu qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant que la seule demande d'admission au séjour qu'il a formée l'a été en vue d'obtenir l'asile ou le statut de réfugié statutaire. Le préfet d'Indre-et-Loire, par suite, n'avait pas à examiner d'office si l'intéressé remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur un autre fondement. Enfin, les circonstances mises en avant par M. B..., tirées de la présence en France de sa fratrie, de la durée de son séjour en France, de la scolarisation de l'aîné de ses enfants et de ce qu'il s'exprime sans difficulté en français sont insuffisantes à démontrer que l'intéressé a désormais fixé de manière stable et durable le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, la durée du séjour en France de l'intéressé tenant en particulier à ce que, à trois reprises, il ne s'est pas conformé à la mesure d'éloignement dont il faisait l'objet et dont il avait à deux reprises en vain contesté la légalité.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Il ne ressort pas des pièces du dossier, en premier lieu, que le préfet

d'Indre-et-Loire se soit abstenu de procéder à un examen particulier de la situation personnelle du requérant, l'arrêté litigieux rappelant notamment le parcours de l'intéressé ainsi que sa situation de famille, ni qu'il se serait estimé tenu de prendre l'arrêté litigieux compte tenu des décisions du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile.

5. Si M. B... soutient, en second lieu, que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en faisant valoir la durée de son séjour en France, la présence de l'ensemble de ses frères dans ce pays, la scolarisation de l'aîné de ses enfants et sa maîtrise du français, ces circonstances ne suffisent pas, comme déjà indiqué au point 3, et alors que l'intéressé a par le passé déjà fait l'objet de trois mesures d'éloignement auxquelles il ne s'est pas conformé, à révéler une atteinte disproportionnée portée à ce principe, la compagne du requérant n'étant elle-même plus admise au séjour en France et faisant également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

6. En premier lieu, si M. B..., dont la demande d'asile et les deux demandes de réexamen de cette demande ont déjà été à trois reprises rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile, invoque le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il n'apporte aucune précision ni aucun élément de justification à l'appui de ces moyens de nature à démontrer la réalité des risques personnels qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine.

7. Si le requérant soutient, en second lieu, que cette décision méconnaît à la fois les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, en ce que son exécution aurait nécessairement pour effet de provoquer l'éclatement de sa cellule familiale, sa compagne n'étant pas admissible en Serbie du fait de sa nationalité macédonienne, il ressort des pièces du dossier que la décision fixant le pays de renvoi ne se limite pas à indiquer le Kosovo et la Serbie comme pays possibles de renvoi mais mentionne également la Macédoine du Nord, ou tout autre pays dans lequel l'intéressé étranger serait légalement admissible. Il ressort également des pièces du dossier que la compagne du requérant a également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire et que la décision fixant le pays de renvoi accompagnant cette décision mentionne dans son cas, outre la Macédoine du Nord, la Serbie et le Kosovo. Eu égard à ce qui précède, la décision contestée n'apparaît pas de nature à emporter des conséquences disproportionnées vis-à-vis de la cellule familiale de M. B..., ni à contrevenir à l'intérêt supérieur de ses enfants.

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

8. En premier lieu, comme déjà indiqué, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B..., alias D..., avant de prendre la décision contestée.

9. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B..., alias D..., a déjà fait l'objet, en 2012, 2013 et 2017, de mesures d'éloignement auxquelles, en dépit de la confirmation de leur légalité par des jugements du tribunal administratif d'Orléans et de la cour, il ne s'est pas conformé. Le requérant ne justifie pas, de ce fait, d'une durée particulière de séjour en France, ni de liens particuliers tissés dans ce pays, où il ne démontre pas disposer de perspectives particulières d'intégration. Dans ces conditions, l'interdiction de retour pour une durée de deux ans dont il fait l'objet ne présente pas de caractère disproportionné.

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

10. En premier lieu, à défaut d'établir l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire prise à son encontre, M. B... ne peut en exciper vis-à-vis de l'assignation à résidence dont il fait également l'objet

11. En second lieu, si M. B... soutient que la décision contestée ne lui a pas été notifiée conformément aux dispositions de l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette circonstance, à la supposer même établie, est, en tout état de cause, sans incidence sur sa légalité.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B..., alias D..., n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2019 du préfet d'Indre-et-Loire.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de M. B..., alias D..., n'appelle aucune mesure particulière en vue de son exécution. Les conclusions à fin d'injonction sous astreinte formées par le requérant ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. B..., alias D..., la somme que ce dernier réclame au titre des frais exposés par lui non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Article 2 : La requête de M. B..., alias D..., est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., alias C... D..., et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 2 juillet 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- M. A..., premier conseiller,

- Mme Le Barbier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 17 juillet 2020.

Le rapporteur

A. A...

Le président

I. Perrot Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°19NT04576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04576
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : EQUATION AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;19nt04576 ?
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