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03/07/2020 | FRANCE | N°19NT00860

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 03 juillet 2020, 19NT00860


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... H..., Mme C... H... née D..., son épouse, et ses trois filles B..., Mona et Rachel H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONAIM) à leur verser la somme de 725 490,34 euros en réparation des différents chefs de préjudice qu'ils estiment avoir subis du fait des séquelles de la vaccination contre le virus H1N1 dont M. H..., médecin, a fait l'objet le 1er déc

embre 2009.

Par un jugement n°1701040 du 31 décembre 2018, le tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... H..., Mme C... H... née D..., son épouse, et ses trois filles B..., Mona et Rachel H... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONAIM) à leur verser la somme de 725 490,34 euros en réparation des différents chefs de préjudice qu'ils estiment avoir subis du fait des séquelles de la vaccination contre le virus H1N1 dont M. H..., médecin, a fait l'objet le 1er décembre 2009.

Par un jugement n°1701040 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2019 M. H... et autres, représentés par

Me I..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 décembre 2018 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de condamner l'ONIAM à les indemniser de leurs préjudices, après avoir ordonné avant dire droit une expertise afin de les évaluer ;

3°) de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes les dépens et une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que l'existence d'un lien de causalité entre la vaccination reçue et la sclérose en plaques dont souffre aujourd'hui M. H... n'était pas établi ; les données acquises de la science n'excluent pas l'existence d'un tel lien de causalité ;

- le risque de développer une sclérose en plaques des suites d'une vaccination contre le virus H1N1 doit être regardé comme établi compte tenu du nombre significatif de cas relevés par les services de pharmaco-vigilance ;

- la situation personnelle de l'intéressé, en l'absence d'antécédents et du fait de la proximité temporelle immédiate avec la survenance de la maladie, doit être regardée comme constituant un indice de l'existence d'un lien de causalité ; en outre son âge, son sexe et son origine géographique l'écartent des groupes risquant de développer une sclérose en plaques, ce qui constitue un indice fort de ce que sa maladie provient de sa vaccination, et il ne présente aucun antécédent d'affection de type neurologique ;

- la vaccination est intervenue dans un cadre professionnel et doit être regardée comme présentant le caractère d'une vaccination obligatoire ;

- un expert aurait dû être désigné par le tribunal administratif et la complexité du sujet justifie qu'une seconde expertise soit diligentée ;

- leurs prétentions indemnitaires sont réservées dans l'attente des conclusions d'une seconde expertise.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 avril 2019 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, représenté par Me F... conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par M. H... et autres ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. H..., médecin-urgentiste au CHU de Brest, a été vacciné le

1er décembre 2009 contre la grippe H1N1, dans le cadre de la campagne de vaccination contre cette infection décidée par le ministre de la santé. Une sclérose en plaques lui a été diagnostiquée le 29 octobre 2012. M. H... a saisi le 26 juin 2015 l'Office national des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) d'une demande d'indemnisation des différents préjudices nés de cette affection, qu'il impute à la vaccination contre la grippe H1N1 subie en 2009. Après avoir ordonné une expertise l'ONIAM a, par une décision du 30 décembre 2016, rejeté la principale demande de M. H..., acceptant seulement de prendre en charge l'indemnisation des troubles dont a été victime l'intéressé dans les premiers jours ayant suivi la vaccination. L'intéressé a formé le 28 février 2017 un recours indemnitaire devant le tribunal administratif de Rennes. Il relève appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'obligation de l'ONIAM :

2. Aux termes de l'article L. 3131-1 du code de la santé publique : " En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d'urgence, notamment en cas de menace d'épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l'intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population (...) ". Aux termes de l'article L. 3131-4 : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées en application de mesures prises conformément aux articles L. 3131-1 ou L. 3134-1 est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales mentionné à l'article L. 1142-22. / L'offre d'indemnisation adressée par l'office à la victime ou, en cas de décès, à ses ayants droit indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, nonobstant l'absence de consolidation, ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime ou à ses ayants droit (...)".

3. Les dispositions précitées de l'article L. 3131-4 du code de la santé publique prévoient la réparation intégrale par l'ONIAM, en lieu et place de l'Etat, des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales imputables à des activités de prévention ou de soins réalisées en application de mesures prises conformément aux articles L. 3131-1 ou L. 3134-1, sans qu'il soit besoin d'établir l'existence d'une faute ni la gravité particulière des préjudices subis. Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la réparation incombant à l'ONIAM bénéficie à toute victime, c'est-à-dire tant à la personne qui a subi un dommage corporel du fait de l'une de ces mesures qu'à ceux de ses proches qui en subissent directement les conséquences.

4. Il résulte de l'instruction, en particulier des conclusions des experts désignés par l'ONIAM à la suite de la demande d'indemnisation présentée par les consorts H..., que le lien entre la vaccination subie le 1er décembre 2009 par M. H... et la sclérose en plaques dont il est atteint, dont le diagnostic a été définitivement posé le 29 octobre 2012, n'est pas établi. Si M. H... fait état d'études médicales canadienne et suédoise qui n'excluent pas l'existence d'un lien de causalité entre une vaccination et l'apparition d'une sclérose en plaques, ces éléments ne permettent pas d'affirmer l'existence d'un tel lien, d'autant plus que l'étude canadienne portait sur un autre vaccin que celui administré au requérant. Si l'intéressé fait également état de données issues du dispositif d'observation mis en place en 2009, ces éléments ne permettent pas davantage d'établir ce lien, l'étude citée réalisée en 2010 faisant par exemple apparaître seulement 4 cas de sclérose en plaques sur l'ensemble des personnes observées. Les études de pharmacovigilance du CHU de Brest, faute de rapporter le nombre d'affections démyélinisantes observé au nombre de vaccins administrés, ne le permettent pas davantage. II en va de même des chiffres publiés en février 2019 par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et cités par le requérant, qui ne mettent pas en relation le nombre des douze cas de sclérose en plaques observés avec le nombre de personnes vaccinées observé dans cette étude. Si M. H... soutient qu'il doit être regardé comme bénéficiant d'une présomption d'imputabilité, les éléments qu'il apporte ne peuvent être regardés comme des " indices graves, précis et concordants ", et aucune analogie ne peut être utilement tirée du cas des vaccinations contre l'hépatite B, le vaccin contre la grippe H1N1 étant d'une composition différente et, en particulier, sans adjuvant aluminique. Le fait que M. H... n'appartienne à aucun des groupes identifiés comme surexposés au risque de sclérose en plaques, pathologie qui touche majoritairement, selon une étude médicale figurant au dossier, des femmes, des personnes jeunes et non originaires des régions à fort ensoleillement, ne permet pas davantage d'établir que la vaccination subie constitue la seule explication possible au fait qu'il a développé cette maladie. Enfin, et à supposer même que les juges se soient mépris sur les conclusions des experts en ce qui concerne le délai d'apparition de la maladie, il ne résulte pas de l'instruction que les signes de fatigue manifestés dès les premiers mois de 2010 constituaient, dès cette date, des signes permettant de révéler l'existence de l'affection. Ainsi, en l'état des éléments apportés par M. H..., il n'est pas établi que la sclérose en plaques dont souffre l'intéressé soit imputable à la vaccination réalisée le 1er décembre 2009.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle mesure d'expertise, que M. H... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'ONIAM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. H... et autres la somme que ceux-ci réclament au titre des frais exposés par eux non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. H... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... H..., à Mme C... D... épouse H..., à Mme B... H..., à Mme A... H..., à Mme E... H... et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- M. A..., premier conseiller,

- M. Berthon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 juillet 2020.

Le rapporteur

A. A...

Le président

I. Perrot Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00860


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00860
Date de la décision : 03/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : DANTE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-03;19nt00860 ?
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