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19/06/2020 | FRANCE | N°19NT03736

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 19 juin 2020, 19NT03736


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 du préfet des Côtes d'Armor lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1900098 du 8 avril 2019 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 septembre 2019 M. A..., représenté pa

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Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 du préfet des Côtes d'Armor lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1900098 du 8 avril 2019 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 19 septembre 2019 M. A..., représenté par

Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 8 avril 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 du préfet des Côtes d'Armor ;

3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont entachées d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- en ne lui délivrant pas un titre de séjour en qualité de salarié, le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 de ce code, qui lui sont applicable en vertu du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais modifié ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée en conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 15 janvier 2020 le préfet des Côtes d'Armor conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires du 23 septembre 2006 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais, relève appel du jugement du 8 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2018 du préfet des Côtes d'Armor lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

2. Par l'arrêté contesté, le préfet des Côtes d'Armor a notamment refusé à M. A... la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. La décision d'obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour qui, en l'espèce, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est ainsi suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui s'est approprié l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et a indiqué que l'intéressé n'apportait aucun élément pour contredire cet avis, n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation.

3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

4. Pour refuser le renouvellement du titre de séjour pour raisons médicales sollicité par M. A..., le préfet des Côtes d'Armor s'est fondé sur l'avis émis le 15 mai 2018 par le collège de médecins de l'OFII et indiquant que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il pouvait bénéficier effectivement au Sénégal d'un traitement approprié et qu'il pouvait voyager sans risque vers ce pays. M. A... soutient que le médicament composé de sitagliptine et de metformine qui lui est prescrit pour le traitement du diabète de type 1 B dont il est affecté n'est pas disponible au Sénégal. Toutefois, les documents produits par l'intéressé, parmi lesquels se trouvent notamment un extrait d'une version non datée de la " liste nationale de médicaments et produits essentiels du Sénégal " sur laquelle ne figure pas la sitagliptine et un certificat médical du 16 juillet 2018 dont il ressort que le requérant, déjà traité par metformine, se voit prescrire ce nouveau médicament pour une durée de trois mois, ne suffisent pas à établir qu'un traitement approprié à son état de santé ne serait pas disponible dans son pays d'origine. La documentation à caractère général, évoquant les difficultés de prise en charge du diabète au Sénégal, dont se prévaut par ailleurs M. A..., ne permet pas de remettre en cause la teneur de l'avis précité du collège de médecins de l'OFII. Par suite, en refusant de lui délivrer le titre de séjour qu'il avait sollicité pour raisons médicale, le préfet des Côtes d'Armor n'a pas méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. M. A..., entré pour la dernière fois en France en juin 2015, soutient qu'il a bénéficié de titres de séjour à compter de 2016 et que ses contrats de travail, à durée déterminée puis à durée indéterminée, attestent de son intégration et de son autonomie financière. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui n'a été autorisé à séjourner en France qu'en qualité de travailleur saisonnier puis pour raisons médicales, ne justifie pas d'attaches d'une particulière intensité en France, où il est entré une première fois en 2014 à l'âge de quarante-cinq ans, alors que son épouse et ses quatre enfants résident au Sénégal. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision contestée lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet des Côtes d'Armor n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

6. Aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié par l'avenant du 25 février 2008 : " (...) Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : / - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / - Soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1°et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".

7. Il est constant que M. A... disposait d'un titre de séjour pour raisons médicales valable jusqu'au 1er janvier 2018 et, par suite, encore valide le 6 novembre 2017, date à laquelle il en a sollicité le renouvellement et qu'il disposait d'un récépissé de demande de titre de séjour valide à la date de l'arrêté contesté. Par suite, l'intéressé, qui était en situation régulière à cette même date, ne saurait utilement invoquer, à l'encontre de la décision lui ayant refusé un titre de séjour, les stipulations du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord

franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié qui concernent la délivrance des titres de séjour aux ressortissants sénégalais en situation irrégulière en France par voie d'admission exceptionnelle au séjour, notamment en tant que salarié.

8. Si M. A..., qui avait produit un contrat de travail à l'appui de sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étranger malade, soutient qu'il avait également souligné son intégration professionnelle, il n'établit pas avoir présenté une demande au titre de l'admission exceptionnelle au séjour. En tout état de cause, en se prévalant de ces circonstances et de la durée de sa présence en France, l'intéressé ne justifie pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels tels qu'en ne lui délivrant pas un titre de séjour en qualité de salarié, le préfet des Côtes d'Armor aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Le présent arrêt ne prononçant l'annulation ni de la décision portant refus de titre de séjour ni de celle portant obligation de quitter le territoire français, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence.

10. Pour le surplus, M. A... se borne à invoquer devant le juge d'appel, sans plus de précisions ou de justifications, les mêmes moyens que ceux développés en première instance tirés de ce que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce qu'elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- Mme D..., présidente-assesseure,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juin 2020.

La rapporteure

N. D...

Le président

I. Perrot

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19NT037362


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03736
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE VERGER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-06-19;19nt03736 ?
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