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19/06/2020 | FRANCE | N°19NT03548

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 19 juin 2020, 19NT03548


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... J... C... et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours formé à l'encontre de la décision du 29 novembre 2017 des autorités consulaires françaises à Tel Aviv (Israel) refusant de délivrer à M. J... C..., un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une réfugiée.

Par un jugement n° 1900713 du 11 juillet 2019, l

e tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... J... C... et Mme G... H... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté leur recours formé à l'encontre de la décision du 29 novembre 2017 des autorités consulaires françaises à Tel Aviv (Israel) refusant de délivrer à M. J... C..., un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une réfugiée.

Par un jugement n° 1900713 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 3 septembre 2019 et un mémoire du 26 mai 2020, M. F... J... C... et Mme G... H..., représentés par Me Brel, demandent à la cour :

- d'annuler ce jugement du 11 juillet 2019 ;

- d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

- d'enjoindre au ministre, à titre principal, de délivrer à M. J... C... un visa de long séjour dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande ;

- de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à verser à leur conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- une erreur de droit a été commise par violation de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- une erreur d'appréciation a été commise quant au lien familial ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a été méconnu ;

- l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant a été méconnu.

Par un mémoire en défense enregistré le 31 décembre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... H..., ressortissante érythréenne née le 1er janvier 1990, s'est vu reconnaître la qualité de réfugiée le 11 juillet 2017 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). M. F... J... C..., se présentant comme son époux, a présenté une demande de visa de long séjour en qualité de membre de la famille d'une réfugiée auprès des autorités consulaires françaises à Tel-Aviv (Israël) qui l'ont rejetée par une décision du 29 novembre 2017. M. J... C... et Mme H... ont demandé au tribunal d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre cette décision. Par un jugement n° 1900713 du 11 juillet 2019, le tribunal a rejeté leur demande. M. J... C... et Mme H... relèvent appel de ce jugement.

Sur les conclusions tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".

3. Eu égard aux circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. J... C... et Mme H... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.-Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; / 2° Par son concubin, âgé d'au moins dix-huit ans, avec lequel il avait, avant la date d'introduction de sa demande d'asile, une vie commune suffisamment stable et continue ; / (...) II.- (...) / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. ".

5. Pour rejeter implicitement la demande de visa d'entrée et de long séjour présentée pour M. J... C..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France doit être regardée comme s'étant implicitement fondée sur le motif retenu par l'autorité consulaire française à Tel Aviv (Israël) tenant à l'absence de justification du lien familial avec Mme H... placée sous la protection de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

6. En premier lieu, il est constant que M. J... C... n'a produit ni devant les autorités consulaires à Tel Aviv ni devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France de document d'état civil relatif à son identité. La fourniture, dans le cadre de l'action contentieuse, d'une autorisation de séjour temporaire délivrée par les autorités israëliennes se référant à un numéro de passeport et du certificat d'enregistrement par le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations-Unies ne peut tenir lieu d'acte de naissance. Ces documents mentionnent comme nom de famille C... et comme prénom F.... Par ailleurs, la copie de la carte d'identité érythréenne de l'intéressé permet de constater que l'époux allégué a pour prénom F... et pour nom de famille J... C....

7. En deuxième lieu, Mme H... a déclaré, dans sa demande d'asile du 14 avril 2017 et dans la fiche familiale de référence établie devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 octobre 2017, avoir pour époux M. E... F... K... et que ce dernier est le père de son fils B....

8. Toutefois, âgée de moins de 18 ans au jour de son mariage célébré le 29 janvier 2006, elle ne justifie pas que, comme le prévoit la loi érythréenne, l'accord d'un tuteur aurait été recueilli. De plus, le certificat de mariage religieux ne fait pas apparaître les dates et lieux de naissance des intéressés.

9. En l'espèce des photographies récentes sont produites et des captures d'écran téléphoniques permettent de constater des échanges entre les intéressés depuis février 2018, soit postérieurement à la décision en litige. Il est en outre justifié de l'envoi d'un colis postal en mai 2018 depuis Israël, d'un transfert de fonds en septembre 2018, d'un voyage effectué en Ethiopie en octobre et novembre 2019, de deux témoignages de compatriotes attestant connaître le mariage et la vie de couple des intéressés ainsi que des attestations de travailleurs sociaux faisant état des difficultés rencontrées par Mme H.... Toutefois, ces éléments ne sauraient suffire à caractériser une vie commune suffisamment stable et continue avant l'introduction de la demande d'asile de cette dernière au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce alors même que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a enregistré M. E... F... K... en qualité de concubin de Mme H....

10. Ces mêmes éléments ne peuvent davantage suffire à établir, par la possession d'état, l'identité et les liens matrimonial et filial entre les intéressés et le jeune B..., né le 24 mai 2011, dont le certificat de naissance tenant lieu d'acte d'état civil établi par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides mentionne qu'il a pour père M. F... E... K....

11. Bien que Mme H... a, le 23 mai 2018, saisi le procureur de la République aux fins de rectification d'erreurs commises quant à la transcription des noms et prénoms des intéressés et de leurs lieux de naissance, il n'est ni établi ni même allégué que les modifications sollicitées auraient été prises en compte.

12. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait fait une inexacte application des dispositions précitées.

13. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés ci-dessus les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peuvent être accueillis.

14. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Le rejet des conclusions à fin d'annulation n'appelle aucune mesure particulière d'exécution. Il s'ensuit que les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par M. J... C... et Mme H... ne peuvent dès lors être accueillies.

DECIDE :

Article 1er : M J... C... et Mme H... sont admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. J... C... et de Mme H... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... J... C..., à Mme G... H... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Pérez président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- Mme Bougrine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juin 2020.

Le rapporteur,

C. BrissonLe président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03548


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03548
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : CABINET DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-06-19;19nt03548 ?
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