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19/06/2020 | FRANCE | N°19NT00189

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 19 juin 2020, 19NT00189


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 1 129 074 euros et une rente annuelle de 3 180 euros en réparation des différents préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de la myofasciite à macrophages dont elle est atteinte, qu'elle impute aux différentes vaccinations reçues avant son entrée en école d'infirmière.

Par un ju

gement n°1700360 du 16 novembre 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 1 129 074 euros et une rente annuelle de 3 180 euros en réparation des différents préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de la myofasciite à macrophages dont elle est atteinte, qu'elle impute aux différentes vaccinations reçues avant son entrée en école d'infirmière.

Par un jugement n°1700360 du 16 novembre 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 janvier 2019 Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 novembre 2018 du tribunal administratif de Caen ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme globale de 1 129 074 euros, cette somme portant intérêts et capitalisation des intérêts, ainsi qu'une rente mensuelle de 3 180 euros, revalorisée conformément aux dispositions des articles L. 464-17 et L. 565-25 du code de la sécurité sociale ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM les dépens et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'apparition de la pathologie dont elle souffre doit être présumée comme étant en lien de causalité directe avec les vaccins qui lui ont été administrés dès lors qu'elle remplit les critères jurisprudentiels posés par le Conseil d'Etat ;

- les vaccins à l'origine de sa maladie étaient des vaccins obligatoires et au moins un de ces vaccins contenait un adjuvant aluminique ; la vaccination obligatoire qu'elle a subie en 1998, quoique dépourvue d'adjuvant aluminique, a nécessairement servi de révélateur de sa maladie ; elle entre ainsi dans le champ d'application des dispositions des articles L. 3111-4 à L. 3111-9 du code de la santé publique ;

- le diagnostic de myofasciite à macrophages qui a été posé dans son cas ne saurait être contesté dès lors qu'elle présente l'ensemble des éléments constituant le tableau clinique de cette pathologie ; en outre elle ne présente aucun antécédent de nature à expliquer sa symptomatologie ;

- plusieurs de ses préjudices sont encore évolutifs et leur estimation ne peut qu'être réservée, comme en matière de dépenses de santé, de pertes de gains professionnels, de frais de véhicule adapté ;

- son besoin d'assistance par tierce personne s'élève à cinq heures par jour au titre de la prise en charge spécialisée et à 10 heures par semaine au titre de la prise en charge non spécialisée et doit être indemnisé à hauteur de 572 400 euros pour la période s'étendant de 2002 à la date de consolidation, puis sous la forme d'une rente mensuelle de 3 180 euros pour l'avenir ;

- son état de santé a nécessité une adaptation de son logement ;

- la survenance de sa pathologie lui ôte toute possibilité de travailler et l'a privée de l'avantage que présente l'exercice d'une activité professionnelle, ce qui est à l'origine d'un préjudice qui peut être fixé à 50 000 euros ;

- elle a souffert d'un déficit fonctionnel temporaire entre 1999 et sa date de consolidation à l'origine d'un préjudice pouvant être estimé à 11 274 euros ;

- l'importance des souffrances endurées est à la base d'un préjudice pouvant être fixé à 40 000 euros ;

- son préjudice esthétique temporaire peut être fixé à 15 000 euros et son préjudice esthétique permanent à 20 000 euros ;

- son déficit fonctionnel permanent global doit être estimé à 60 %, et justifie une indemnisation à hauteur de 250 000 euros ;

- elle souffre d'un préjudice d'agrément qui peut être estimé à 25 000 euros ;

- son préjudice d'établissement peut être estimé à 50 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 décembre 2019 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... a été vaccinée contre l'hépatite B en 1995 et 1996, puis s'est vue administrer en août 1998 un vaccin DT Polio avant de débuter sa scolarité en école d'infirmière à compter du mois de septembre 1998. A partir de janvier 1999, elle a présenté de nombreux symptômes qui sont allés en s'aggravant, a fait l'objet de plusieurs hospitalisations et consultations médicales, sans toutefois que les différents symptômes alors présentés permettent de poser un diagnostic tangible. Une biopsie réalisée en 2003 a révélé l'existence de sels aluminiques au point de vaccination, et un diagnostic de myofasciite à macrophages a été posé. Ses troubles s'aggravant, l'intéressée a finalement saisi en 2015 l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) afin d'être indemnisée au titre de la solidarité nationale pour les préjudices qu'elle impute aux vaccins reçus par elle. L'ONIAM a mandaté deux experts qui ont rendu leur rapport le 17 juin 2016. Par une décision du 4 janvier 2017, il a rejeté la demande de Mme D.... L'intéressée a alors formé à l'encontre de l'office un recours indemnitaire devant le tribunal administratif de Caen. Elle relève appel du jugement du 16 novembre 2018 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

2. Aux termes de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale. (...)". Aux termes de l'article R. 3111-31 du même code : " L'office se prononce par une décision motivée : / 1° Sur le caractère obligatoire de la vaccination ; / 2° Le cas échéant, sur l'existence d'un lien de causalité entre le dommage subi par la victime et la vaccination à laquelle il est imputé ; / Lorsque l'office estime que le dommage est indemnisable au titre de l'article L. 3111-9, la décision énumère les différents chefs de préjudice et en détermine l'étendue (...) ".

3. Mme D... soutient que les différentes pathologies dont elle souffre aujourd'hui, et en particulier la myofasciite à macrophages dont l'existence aurait été révélée en 2003, sont la conséquence des vaccins contre l'hépatite B et DT Polio qui lui ont été administrés au cours des années 1995 à 1998.

4. Il résulte toutefois de l'instruction que les vaccins administrés à Mme D... en 1995 et 1996 en vue de la prémunir contre l'hépatite B, s'ils contenaient des sels d'aluminium, ont été réalisés alors que l'intéressée n'était pas encore élève-infirmière ni ne s'apprêtait à entrer en école d'infirmière. Ils ne peuvent dans ces conditions être qualifiés de vaccinations obligatoires au sens des dispositions du code de la santé publique rappelées au point 2.

5. Il n'est par ailleurs nullement contesté que le vaccin DT Polio qui a été administré à Mme D... en août 1998 en vue de sa scolarité en école d'infirmière débutant au mois de septembre suivant, et qui présentait seul le caractère d'un vaccin obligatoire, ne contenait lui-même pas d'adjuvant aluminique. Si la requérante soutient que l'administration de ce dernier vaccin a été le déclencheur, par " effet de seuil ", des troubles dont elle souffre, aucun des éléments qu'elle produit ne permet d'établir un tel lien de causalité, alors que le rapport de l'expertise diligentée par l'ONIAM indique, à plusieurs reprises, qu'il n'est pas possible de conclure que la pathologie de Mme D... soit due à l'injection de ce vaccin, ni d'ailleurs à l'injection des vaccins précédents.

6. Dans ces conditions, le lien entre les différents troubles dont souffre

Mme D... depuis 1999 et la vaccination obligatoire dont elle a bénéficié en qualité

d'élève-infirmière en août 1998 ne peut être tenu pour établi. Par suite, la requérante ne peut se prévaloir d'aucun droit à être indemnisée au titre de la solidarité nationale sur le fondement des dispositions de l'article L. 3111-19 du code de santé publique.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que l'ONIAM, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme D... la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et à la caisse primaire d'assurance maladie du Calvados.

Délibéré après l'audience du 4 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- M. B..., premier conseiller,

- M. Berthon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 19 juin 2020.

Le rapporteur

A. B...

Le président,

I. Perrot Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00189
Date de la décision : 19/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SCP JULIA JEGU BOURDON

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-06-19;19nt00189 ?
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