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02/04/2020 | FRANCE | N°19NT00119

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 02 avril 2020, 19NT00119


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux requêtes distinctes, d'annuler, d'une part, les décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz portant refus de prise en charge de ses arrêts-maladie au titre de sa maladie professionnelle à compter du 18 mars 2014, placement en disponibilité d'office du

18 mars 2015 au 1er juin 2016 et maintien en disponibilité d'office à compter du 13 juin 2016 et, d'autre part, la décision du 12 septembr

e 2016 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de sa patholo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux requêtes distinctes, d'annuler, d'une part, les décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz portant refus de prise en charge de ses arrêts-maladie au titre de sa maladie professionnelle à compter du 18 mars 2014, placement en disponibilité d'office du

18 mars 2015 au 1er juin 2016 et maintien en disponibilité d'office à compter du 13 juin 2016 et, d'autre part, la décision du 12 septembre 2016 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de sa pathologie et placement en congé de longue maladie du 18 mars 2014 au 18 mars 2017.

Par un jugement n°s1605251,1608257 du 14 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz et a annulé la décision du 12 septembre 2016 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2019 l'hôpital intercommunal du Pays de Retz, représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 novembre 2018 du tribunal administratif de Nantes en ses articles 2, 3, 4 et 5 ;

2°) à titre subsidiaire, de procéder, par un jugement avant dire droit, à la désignation d'un collège d'experts afin de se prononcer sur l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. C... ;

3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, la minute du jugement ne comportant pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- aucun élément du dossier ne permet de conclure, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, que la pathologie dont souffre M. C... est directement imputable à l'exercice de ses fonctions au sein de l'hôpital ;

- l'expertise médicale réalisée par le Dr Marquestaut, médecin-expert agréé, indique que l'origine des lombalgies dont souffre M. C... est multifactorielle et que les causes de son déplacement de vertèbre intervenu en 2007 n'ont pas été déterminées ;

- aucune présomption d'imputabilité au service d'une pathologie non inscrite au tableau des maladies professionnelles ne peut se déduire de l'exercice d'une profession quelconque ou du descriptif figurant sur une fiche de poste ;

-aucun des moyens d'annulation soulevés à l'encontre de la décision contestée en première instance n'est fondé.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 décembre 2019 M. C..., représenté par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à ce qu'il soit enjoint à l'hôpital de le placer à compter du 18 mars 2014 en position de maladie professionnelle imputable au service, et, en cas d'expertise, ajouter au mandat de l'expert une analyse de l'ergonomie de son poste de travail.

Il soutient que :

- il n'y a plus lieu de statuer dès lors que l'hôpital a, par une décision du 23 novembre 2018, reconnu l'imputabilité au service de sa pathologie ;

- les moyens d'annulation soulevés par l'hôpital ne sont pas fondés ;

- la décision du 12 septembre 2016 est insuffisamment motivée ;

- la procédure relative à l'instruction de sa demande de reconnaissance d'imputabilité est entachée d'un vice de procédure tenant à l'absence d'une nouvelle consultation de la commission de réforme (méconnaissance des dispositions de l'article 16 du décret du 19 avril 1988) et à l'absence de consultation du médecin de prévention à l'occasion de la séance du 14 avril 2016 de la commission de réforme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., employé en qualité d'ouvrier professionnel qualifié par l'hôpital intercommunal du Pays de Retz, a été placé en congé de maladie à compter du 18 mars 2014 en raison d'une lombo-sciatalgie gauche. Par une décision du 26 avril 2016, le directeur de cet établissement a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette maladie, de le placer en congé de longue maladie et a confirmé deux décisions du 22 juillet 2015 le plaçant en disponibilité d'office. Puis, par deux décisions des 27 avril et 13 juin 2016, il a rétroactivement placé M. C... en position de disponibilité d'office du 18 mars 2015 au 1er juin 2016, puis à compter du 13 juin 2016. Enfin, par une décision du 12 septembre 2016, il a retiré les décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 (article 1), refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. C... (article 2) et l'a placé en congé de longue maladie du 18 mars 2014 au 18 mars 2017 (article 3). M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler les décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 et, d'autre part, d'annuler l'article 2 de la décision du 12 septembre 2016. Par un jugement du 14 novembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions en annulation des décisions des 26 avril, 27 avril et 13 juin 2016 de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz et a annulé l'article 2 de la décision du 12 septembre 2016 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie de M. C... et de ses arrêts de travail à compter du 18 mars 2014. L'hôpital intercommunal du Pays de Retz relève appel de ce jugement.

Sur le non-lieu à statuer :

2. Lorsque l'autorité administrative, en exécution d'un jugement d'annulation, prend une nouvelle décision qui n'est motivée que par le souci de se conformer à ce jugement d'annulation, cette délivrance ne prive pas d'objet l'appel dirigé contre ce jugement.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la cour que pour assurer l'exécution du jugement d'annulation de la décision portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie contractée par M. C... le 18 mars 2014, le directeur de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz a pris le 23 novembre 2018 une nouvelle décision reconnaissant l'imputabilité au service de la pathologie de M. C... et des arrêts de travail en lien avec cette maladie à compter du 18 mars 2014. Pour les motifs énoncés au point précédent, une telle délivrance ne prive pas d'objet l'appel dirigé contre le jugement d'annulation. Il s'ensuit que les conclusions de M. C... tendant à ce que soit prononcé un non-lieu à statuer dans la présente instance ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

5. La minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, pour ce motif, doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. En premier lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident ".

7. Le droit, prévu par les dispositions du deuxième alinéa du 2°de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, d'un fonctionnaire hospitalier en congé de maladie à conserver l'intégralité de son traitement en cas de maladie provenant d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions. Il appartient dans ce cadre au juge administratif d'apprécier, au vu des pièces du dossier soumis à son examen, s'il existe un lien direct et certain entre la pathologie dont est atteint le fonctionnaire et le service.

8. L'hôpital intercommunal du Pays de Retz soutient qu'aucun lien direct et certain ne peut être établi entre la pathologie dont souffre M. C... et le service. Il se prévaut des rapports d'expertise établis les 4 décembre 2015 et 19 août 2016, qui précisent que les lombalgies dégénératives ont une origine multifactorielle et que le glissement d'une vertèbre en L5S1 avait été décelé lors d'un examen subi par l'intéressé en 2007. Toutefois, il ressort également des pièces du dossier que M. C... exerce des fonctions de magasinier, fonctions qui selon la description des tâches réalisée par le médecin de prévention en juillet 2014, demandaient à l'intéressé des efforts de manutention conséquents et réguliers, les poids portés pouvant atteindre 12 à 15 kilos, M. C... devant également porter ces charges dans un escalier et assurer un stockage en hauteur. Par ailleurs, selon le compte-rendu d'intervention d'avril 2013 d'un spécialiste en gestes et postures, non sérieusement contesté par l'hôpital, ces conditions de travail engendrent " une fatigabilité certaine avec un risque accru de lombalgies ". Ainsi, compte tenu des conditions de travail de M. C... et alors même l'expert n'a pas retenu l'imputabilité au service de la lombo-sciatalgie dont souffre l'agent depuis le 18 mars 2014, le lien direct et certain entre cette pathologie et le service doit être tenu pour établi.

9. En second lieu, en détaillant les éléments qui l'ont conduit à retenir que la

lombo-sciatalgie dont souffre M. C... depuis le 18 mars 2014 présentait un lien direct et certain avec ses fonctions professionnelles, le tribunal administratif de Nantes n'a pas, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier, entendu instituer un régime de présomption d'imputabilité mais a fondé sa conviction au terme d'un exact examen des pièces du dossier.

10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, laquelle ne présenterait pas de caractère utile, que l'hôpital intercommunal du Pays de Retz, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 12 septembre 2016 portant refus de reconnaissance d'imputabilité au service de la pathologie de M. C....

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à l'hôpital intercommunal du Pays de Retz la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ce dernier, au même titre, une somme de 1 500 euros au profit de M. C....

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'hôpital intercommunal du Pays de Retz est rejetée.

Article 2 : L'hôpital intercommunal du Pays de Retz versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'hôpital intercommunal du Pays de Retz et à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 12 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme G..., présidente,

- M. A..., premier conseiller,

- M. Berthon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 2 avril 2020.

Le rapporteur

A. A...

La présidente

N. G...Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00119
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL CLEMENT DELPIANO

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-04-02;19nt00119 ?
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