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31/03/2020 | FRANCE | N°19NT02140

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 31 mars 2020, 19NT02140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 5 mars 2019 par lequel le préfet de l'Orne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900610 du 6 mai 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions relatives à l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er) et a rejeté l

e surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 5 mars 2019 par lequel le préfet de l'Orne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1900610 du 6 mai 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions relatives à l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire (article 1er) et a rejeté le surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 juin 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute d'avoir mentionné et pris en compte le mémoire enregistré le 30 avril 2019 ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'absence de notification régulière de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ce qui lui permettait de se maintenir sur le territoire français ;

- la décision fixant le Soudan, sans exclure le Darfour, comme pays de renvoi méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu des risques de persécutions qu'il encourt dans son pays d'origine.

Par un mémoire, enregistré le 16 septembre 2019, le préfet de l'Orne conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 29 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant soudanais né le 1er janvier 1993, a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 5 mars 2019 par lequel le préfet de l'Orne lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Il relève appel du jugement du 6 mai 2019 par lequel le magistrat désigné par le président de ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En vertu de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, le jugement contient l'analyse des conclusions et mémoires.

3. Si le magistrat désigné a omis de mentionner dans les visas du jugement attaqué le mémoire enregistré le 30 avril 2019, il résulte de l'examen de ce jugement, qui fait état du risque d'intégration forcée dans les milices janjawids qui n'était évoqué avec cette précision que dans ce mémoire, qu'il en a tenu compte et a répondu aux moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité pour n'avoir pas visé ce mémoire et à en demander pour ce motif l'annulation.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. (...) ". Il résulte de l'application combinée de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile. En l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire.

5. Le préfet de l'Orne établit, par la production d'une copie du pli comportant la décision du 28 septembre 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, que celle-ci a été envoyée, par recommandé avec accusé de réception à M. B... à l'adresse suivante : " FTDA n°16080 2 rue du château de l'Eraudière 44300 Nantes " et que ce pli, portant la mention " présenté/avisé le 26/10 ", n'ayant pas été réclamé, a été renvoyé à l'Office qui l'a reçu le 30 novembre 2018. Si M. B... soutient que cette notification a été effectuée à son ancienne adresse, qu'il avait quittée en mai 2018, soit avant son audition par les services de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en juillet 2018, il ne justifie pas avoir informé l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de son changement d'adresse avant le 14 janvier 2019 et aucune de ses démarches effectuées auprès des gestionnaires des centres d'hébergement n'est de nature à suppléer cette carence. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la notification est irrégulière. Dans ces conditions, la notification régulière de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ayant été effectuée le 26 octobre 2018, le préfet de l'Orne pouvait regarder, à la date du 5 mars 2019, comme ne bénéficiant plus du droit de se maintenir sur le territoire français, et était fondé à estimer que le requérant figurait au nombre des étrangers pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement sur le fondement du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

6. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

7. M. B... se prévaut des risques qu'il encourt en cas de retour au Soudan en raison, d'une part, de son évasion d'un camp militaire tenu par les janjawids dans lequel il aurait été enrôlé de force et des persécutions subies par l'ethnie borgo à laquelle il appartient, d'autre part, de la situation de violence au Darfour et, enfin, des risques qu'il encourt d'être arrêté lors de son arrivée sur le territoire soudanais. Toutefois, alors que son récit n'a pas convaincu l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le requérant ne produit aucune pièce permettant de justifier qu'il serait originaire du Darfour et qu'il appartiendrait à l'ethnie dont il se prévaut. Par suite, alors même que la situation prévalant dans la région du Darfour est caractérisée par une violence généralisée résultant d'un conflit armé, M. B... ne justifie pas du bien-fondé de ses craintes. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles cités au point 6 doivent être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de l'Orne.

Délibéré après l'audience du 5 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la juridiction le 31 mars 2020.

Le rapporteur,

F. D...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°19NT02140

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02140
Date de la décision : 31/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CAVELIER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-03-31;19nt02140 ?
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