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06/03/2020 | FRANCE | N°19NT03253

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 06 mars 2020, 19NT03253


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours contre la décision du 6 février 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à Oran ont refusé de lui délivrer un visa de long séjour en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français.

Par un jugement n° 1902847 du 24 juillet 2019, le tribunal administratif de Nan

tes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours contre la décision du 6 février 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à Oran ont refusé de lui délivrer un visa de long séjour en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français.

Par un jugement n° 1902847 du 24 juillet 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 août 2019 et un mémoire du 14 février 2020 (non-communiqué) , Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2019 ;

2°) d'annuler la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle est à la charge effective de son fils et dans une situation d'isolement ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par un mémoire en défense enregistré le 16 janvier 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... relève appel du jugement du 24 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours contre la décision du 6 février 2019 par laquelle les autorités consulaires françaises à Oran ont refusé de lui délivrer un visa de long séjour qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) / a) Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent après le contrôle médical d'usage un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention " visiteur " ; / (...) ". L'article 7 bis de cet accord stipule : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit (...) : / b) (...) aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ". Le deuxième alinéa de l'article 9 du même accord prévoit que : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis, alinéa 4 (lettres c à d), et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".

3. Il résulte de la combinaison de ces stipulations que, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour au bénéfice d'un ressortissant algérien qui fait état de sa qualité d'ascendant de ressortissant français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé ni comme visiteur, dès lors qu'il ne justifie pas de moyens d'existence suffisants, ni comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

4. Mme D... soutient que son fils subvient à ses besoins en lui adressant deux ou trois par an de l'argent. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours de la période du 30 octobre 2016 au 25 octobre 2018, il lui a adressé une somme totale de 12 000 euros, sommes dont elle justifie l'utilisation pour son loyer et ses frais quotidiens. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme D... bénéficierait d'autres revenus, notamment une pension de retraite, contrairement à ce qui a pu être allégué par le ministre en première instance, lequel a opéré une confusion entre deux personnes portant les mêmes prénom et nom. Dès lors, la commission de recours a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme D... un visa en qualité d'ascendant à charge de ressortissant français.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, et sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, implique de délivrer à Mme D... le visa de long séjour sollicité. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au ministre de délivrer à l'intéressée le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2019 et la décision implicite de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme D..., sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, un visa de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme D... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 février 2020, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 mars 2020.

Le rapporteur,

T. B...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT03253


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03253
Date de la décision : 06/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : ENAM

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-03-06;19nt03253 ?
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