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28/02/2020 | FRANCE | N°19NT03457

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 28 février 2020, 19NT03457


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I. Mme I... M... G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 janvier 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française au Caire (Egypte) du 25 octobre 2018 refusant de lui délivrer un visa de court séjour.

Par un jugement n° 1902595 du 24 juillet 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

II. Mme F... B.

.. L... G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 ...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I. Mme I... M... G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 janvier 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française au Caire (Egypte) du 25 octobre 2018 refusant de lui délivrer un visa de court séjour.

Par un jugement n° 1902595 du 24 juillet 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

II. Mme F... B... L... G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 janvier 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française au Caire (Egypte) du 25 octobre 2018 refusant de lui délivrer un visa de court séjour.

Par un jugement n° 1902598 du 24 juillet 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Sous le n°19NT03457, par une requête enregistrée le 23 août 2019, Mme I... M... G..., représentée par Me E... et Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1902595 du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2019 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 23 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de court séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

­ en estimant qu'il existait un risque de détournement de l'objet du visa, l'autorité administrative a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ;

­ la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors qu'elle est empêchée de voir sa fille qui a obtenu, en France, le statut de réfugié.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé en s'en remetant principalement à ses écritures de première instance.

II. Sous le n°19NT03458, par une requête enregistrée le 23 août 2019, Mme F... B... L... G..., représentée par Me E... et Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1902598 du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2019 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 23 janvier 2019 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa de court séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

­ en estimant qu'il existait un risque de détournement de l'objet du visa, l'autorité administrative a entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation ;

­ la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme dès lors qu'elle est empêchée de voir sa soeur qui a obtenu, en France, le statut de réfugié.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé en s'en remettant principalement à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

­ le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas (code des visas) ;

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A...'hirondel,

­ et les observations de Me E..., représentant Mme I... M... G... et Mme F... B... L... G....

Considérant ce qui suit :

1. Mme I... M... G..., née le 17 février 1960 et Mme F... B... L... G..., née le 8 janvier 1996, sa fille, ressortissantes palestiniennes, ont sollicité auprès des autorités consulaires françaises au Caire (Egypte) la délivrance d'un visa de court séjour pour visite touristique et familiale qui leur a été refusé par des décisions du 25 octobre 2018. Les recours qu'elles ont, chacune d'elles, exercés le 14 décembre 2018 devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ont été rejetés par des décisions du 25 janvier 2019. Mme I... M... G... relève appel du jugement n° 1902595 du tribunal administratif de Nantes du 24 juillet 2019 et Mme F... B... L... G..., du jugement n° 1902598 du même tribunal prononcé le même jour, qui a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces dernières décisions.

2. Les requêtes enregistrées sous les n°s 19NT03457 et 19NT03458, qui concernent la situation des membres d'une même famille et qui portent sur le refus de délivrance de visas pour le même voyage, ont fait l'objet d'une instruction commune. Dans ces conditions, il y a lieu de joindre les deux requêtes pour y statuer par un même arrêt

3. Aux termes de l'article 32 du code communautaire des visas : " Sans préjudice de l'article 25, paragraphe 1, le visa est refusé: / (...) s'il existe des doutes raisonnables sur l'authenticité des documents justificatifs présentés par le demandeur ou sur la véracité de leur contenu, sur la fiabilité des déclarations effectuées par le demandeur ou sur sa volonté de quitter le territoire des États membres avant l'expiration du visa demandé ". Selon l'annexe II de ce code : " Liste non exhaustive de documents justificatifs / Les justificatifs visés à l'article 14, que les demandeurs de visa doivent produire, sont notamment les suivants : (...) / Documents permettant d'apprécier la volonté du demandeur de quitter le territoire des états membres : / 1) un billet de retour ou un billet circulaire, ou encore une réservation de tels billets; 2) une pièce attestant que le demandeur dispose de moyens financiers dans le pays de résidence; 3) une attestation d'emploi : relevés bancaires; 4) toute preuve de la possession de biens immobiliers; 5) toute preuve de l'intégration dans le pays de résidence: liens de parenté, situation professionnelle. ".

4. Pour rejeter les demandes de Mesdames G..., la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le seul motif tiré du risque de détournement de l'objet des visas à des fins migratoires compte tenu de ce que les requérantes, mère et fille, qui souhaitent voyager ensemble, n'établissent pas avoir suffisamment de revenus personnels réguliers ou avoir d'éventuels intérêts de nature économique, matérielle ou familiale dans leur pays de résidence susceptibles d'assurer des garanties de retour alors qu'un autre membre de leur famille réside en France.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, dans leurs demandes de visa, Mesdames I... et F... G... ont toutes deux déclaré, être sans emploi. Si elles allèguent désormais avoir un emploi, la première, depuis le 1er septembre 2015 et la seconde, depuis le 1er mars 2018, elles n'ont présenté aucun justificatif, tels que par exemple, des bulletins de salaire ou des relevés bancaires, de nature à attester la réalité de cet emploi et le montant des revenus allégués. De même, l'attestation du département financier de l'université islamique de Gaza établie le 20 août 2019 selon laquelle M. B... G..., époux et père des requérantes, perçoit une retraite mensuelle de 777,55 dinars jordaniens, n'est accompagnée d'aucun justificatif de revenus. Si les requérantes allèguent, par ailleurs, justifier de leur domicile en Palestine, il ressort du contrat de bail établi le 1er décembre 2017 que Mme I... G... n'est pas la propriétaire du bien mais seulement la locataire alors que Mme F... G... n'a présenté aucune pièce attestant être propriétaire d'un bien dans son pays d'origine. Les intéressés n'établissent pas, non plus, les liens affectifs conservés avec M. B... G..., alors que le contrat de bail précité du 1er décembre 2017 n'a été conclu qu'au nom de Mme I... G.... En revanche, Mme I... G... a omis de déclarer, en ne cochant pas la case 35 de la demande de visa, la présence en France de Mme C... G..., fille et soeur des requérantes, qui réside à Toulouse, les intéressées déclarant se rendre en France chez Mme J... H..., qui habite à Paris et qui est celle qui doit prendre en charge leurs frais durant leur séjour, Mme H... se présentant comme leur amie. Enfin, si Mme F... G... présente un certificat d'inscription établi par l'université de Gaza le 28 novembre 2018 selon lequel elle est étudiante en master en sciences biologiques et zoologie, ce certificat mentionne que le premier semestre commencera le 15 septembre 2018 pour se terminer le 22 janvier 2019 et attire l'attention de l'intéressée sur sa présence pour les cours théoriques et pratiques alors qu'elle a sollicité un voyage en France du 13 octobre au 13 décembre 2018. Enfin, les documents de droit de sortie et de retour dont se prévalent les requérantes ne sont pas de nature à établir qu'elles regagneront leur pays à l'expiration de leur visa. Il résulte de ce qui précède que les intéressées n'ont produit aucun justificatif suffisamment probant permettant d'établir les attaches fortes, aussi bien familiales que matérielles, qu'elles auraient conservées dans leur pays d'origine alors que vit en France leur fille et soeur dont la présence n'a pas été au demeurant signalée dans les demandes de visa, de nature à garantir leur volonté de quitter le territoire français avant l'expiration des visas sollicités. Par suite, et sans que les intéressées puissent utilement se prévaloir des attestations d'accueil délivrées par Mme H... sur le fondement des dispositions de l'article L. 211-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a pu, sans entacher ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation, refuser de leur délivrer les visas qu'elles sollicitaient en raison d'un doute raisonnable sur l'existence d'un projet d'installation en France.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Si les requérantes allèguent que le refus des autorités consulaires les empêchera de pouvoir rendre visite à Mme C... G..., leur fille et soeur, à qui le statut de réfugié a été reconnu, il ressort de leurs demandes de visa, ainsi qu'il a été dit précédemment, qu'elles ont seulement déclaré se rendre chez Mme H.... En tout état de cause, elles n'établissent pas, ni même n'allèguent, alors qu'elles ont déposé une demande de visa devant les autorités consulaires françaises au Caire, qu'elles ne pourraient se rencontrer dans un pays tiers. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être qu'écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mmes I... et F... G... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérantes ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme I... G... et de Mme F... G... sont rejetées.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme I... M... G..., à Mme F... B... L... G... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 4 février 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 février 2020.

Le rapporteur,

M. K...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 19NT03457,19NT03458


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03457
Date de la décision : 28/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : DUPPRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-02-28;19nt03457 ?
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