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18/02/2020 | FRANCE | N°18NT02317

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 18 février 2020, 18NT02317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 28 décembre 2015 tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) et d'enjoindre, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, au ministre de l'intérieur de reconstituer sa carrière en lui attribuant les réductions d'échelon qui en découlent et le versement des sommes correspondant à sa reconstitution de carrière.

Par un j

ugement n° 1601352 du 10 avril 2018, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 28 décembre 2015 tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) et d'enjoindre, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, au ministre de l'intérieur de reconstituer sa carrière en lui attribuant les réductions d'échelon qui en découlent et le versement des sommes correspondant à sa reconstitution de carrière.

Par un jugement n° 1601352 du 10 avril 2018, le tribunal administratif d'Orléans a annulé cette décision en tant qu'elle refuse à M. C... cet avantage pour la période du 1er janvier 1995 au 30 septembre 2009 (article 1), a enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de sa carrière en tenant compte de ses droits à l'ASA pour cette période par l'édiction d'une décision explicite dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement (article 2) et a rejeté le surplus de ses conclusions (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 juin 2018, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 10 avril 2018 ;

2°) de renvoyer le dossier au tribunal administratif d'Orléans ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa créance n'était pas prescrite ;

- le bénéfice de l'ASA n'est pas réservé aux seuls fonctionnaires de police affectés dans un commissariat de police ; un fonctionnaire affecté dans une direction départementale de sécurité publique (DDSP) peut y prétendre ; le tribunal administratif n'a pas vérifié si ses fonctions à la DDSP lui ouvraient droit à l'ASA.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2018, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés ;

- ses créances des années 1995 à 2011 sont prescrites.

Les parties ont été informées le 6 novembre 2019, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de irrecevabilité des conclusions du ministre de l'intérieur, présentées après l'expiration du délai d'appel, devant être regardées comme tendant à l'annulation des articles 1 et 2 du jugement attaqué (prescription invoquée pour la période du 1er janvier 1995 au 30 septembre 2009), lesquels constituent un litige distinct de celui introduit par M. C... dirigé contre l'article 3 de ce jugement (concernant la période postérieure au 30 septembre 2009).

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 ;

- la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 ;

- le décret n° 95-313 du 21 mars 1995 ;

- l'arrêté du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire du 6 juin 2006 portant règlement général d'emploi de la police nationale ;

- l'arrêté du 17 janvier 2001 fixant la liste des secteurs prévus au 1° de l'article 1er du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles ;

- l'arrêté du 3 décembre 2015 fixant la liste des circonscriptions de police prévues au 1° de l'article 1er du décret n° 95-313 du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., fonctionnaire de police, relève appel du jugement du 10 avril 2018 du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 28 décembre 2015 tendant au bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté (ASA) pour la période postérieure au 30 septembre 2009.

Sur la recevabilité des conclusions du ministre de l'intérieur en tant qu'elles concernent la période antérieure au 30 septembre 2009 :

2. Dans son mémoire en défense enregistré le 8 octobre 2018, après l'expiration du délai d'appel, le ministre de l'intérieur soutient que les créances de M. C... sont prescrites pour les années 1995 à 2011. Ces conclusions, en tant qu'elles concernent la période du 1er janvier 1995 au 30 septembre 2009, doivent être regardées comme tendant à l'annulation des articles 1 et 2 du jugement attaqué. Elles constituent dès lors un litige distinct de celui introduit par M. C... rappelé au point 1, et sont, par suite, irrecevables.

Sur les conclusions de M. C... concernant la période postérieure au 30 septembre 2009 :

3. Aux termes de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, modifié par l'article 17 de la loi du 25 juillet 1994 relative à l'organisation du temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique : " Les fonctionnaires de l'Etat et les militaires de la gendarmerie affectés pendant une durée fixée par décret en Conseil d'Etat dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ont droit, pour le calcul de l'ancienneté requise au titre de l'avancement d'échelon, à un avantage spécifique d'ancienneté dans des conditions fixées par ce même décret ". Aux termes de l'article 1er du décret du 21 mars 1995 relatif au droit de mutation prioritaire et au droit à l'avantage spécifique d'ancienneté accordés à certains agents de l'Etat affectés dans les quartiers urbains particulièrement difficiles : " Les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, mentionnés au quatrième alinéa de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée et à l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 susvisée, doivent correspondre : / 1° En ce qui concerne les fonctionnaires de police, à des circonscriptions de police ou à des subdivisions de ces circonscriptions désignées par arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité, du ministre chargé de la ville, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget (...) ". La liste des circonscriptions de police ouvrant droit à l'avantage spécifique d'ancienneté a d'abord été fixée, sur le fondement de ces dispositions, par un arrêté du 17 janvier 2001, dont le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, par voie d'exception, constaté l'illégalité par sa décision n° 327428 du 16 mars 2011. Un arrêté du 3 décembre 2015 a arrêté une nouvelle liste comprenant soit des circonscriptions de sécurité publique, qui constituent, aux termes de l'article 252-3 du règlement général d'emploi de la police nationale approuvé par l'arrêté du 6 juin 2006, " la structure de base des services territoriaux de la sécurité publique ", soit, à Paris et dans les départements de la petite couronne, des circonscriptions de sécurité de proximité. Au nombre des circonscriptions mentionnées par cet arrêté figure la circonscription de sécurité publique (CSP) d'Orléans.

4. D'une part, l'illégalité de l'arrêté du 17 janvier 2001 n'implique pas que l'administration serait tenue de rejeter les demandes des fonctionnaires de police tendant à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté au titre de services accomplis antérieurement à l'entrée en vigueur de l'arrêté du 3 décembre 2015. Une telle demande doit être accueillie, sous réserve de l'application des dispositions relatives à la prescription des créances sur l'Etat, si l'agent était affecté à une circonscription de police, ou une subdivision d'une telle circonscription, où se posaient des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles au sens et pour l'application des dispositions de l'article 11 de la loi du 26 juillet 1991 modifiée.

5. D'autre part, il résulte des dispositions citées au point 3 de la loi du 26 juillet 1991 et du décret du 21 mars 1995 que le bénéfice de l'avantage spécifique d'ancienneté n'est ouvert qu'aux fonctionnaires de police affectés administrativement à une circonscription de police ou une subdivision d'une telle circonscription correspondant à un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles. Elles font, par suite, obstacle à l'attribution de l'avantage spécifique d'ancienneté à un agent affecté administrativement non à une circonscription de sécurité publique ou à une circonscription de sécurité de proximité, mais dans un service dépendant directement de la direction départementale de la sécurité publique, quel que soit le lieu où l'intéressé exerce ses fonctions.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été affecté à la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) du Loiret en résidence à Orléans à compter du 1er octobre 2009. N'ayant, à compter de cette date, pas été affecté administrativement à une circonscription de police ou une subdivision d'une telle circonscription où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, l'intéressé ne peut prétendre à l'avantage spécifique d'ancienneté alors même que le siège de la DDSP se confondrait avec celui de la CSP d'Orléans. Par suite, le tribunal administratif d'Orléans a pu rejeter ses conclusions tendant à l'octroi de l'ASA pour la période postérieure au 30 septembre 2009.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'exception de prescription opposée par le ministre de l'intérieur en ce qui concerne les créances postérieures au 30 septembre 2009, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de renvoyer l'affaire au tribunal administratif d'Orléans ainsi que le demande l'intéressé.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. C... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre de l'intérieur relatives à la période du 1er janvier 1995 au 30 septembre 2009 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 février 2020.

Le rapporteur,

V. GELARDLe président,

H. LENOIR

La greffière,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18NT02317


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : BCV AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Date de la décision : 18/02/2020
Date de l'import : 25/02/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18NT02317
Numéro NOR : CETATEXT000041602944 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-02-18;18nt02317 ?
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