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24/01/2020 | FRANCE | N°18NT01815

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 janvier 2020, 18NT01815


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts N... ont demandé au tribunal administratif de Nantes, à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes à les indemniser, à hauteur de 169 751,14 euros, des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès W... N... survenu le 7 septembre 2011 et, à titre subsidiaire, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser la somme de 10 040 euros en réparat

ion du préjudice subi par Nicole N....

Par un jugement n° 1509518 du 28 m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts N... ont demandé au tribunal administratif de Nantes, à titre principal, de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes à les indemniser, à hauteur de 169 751,14 euros, des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait du décès W... N... survenu le 7 septembre 2011 et, à titre subsidiaire, de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à leur verser la somme de 10 040 euros en réparation du préjudice subi par Nicole N....

Par un jugement n° 1509518 du 28 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a condamné le CHU de Nantes à verser aux héritiers de J... et Nicole N... la somme de 27 340,45 euros, à M. A... N... et à M. J... N... la somme de 4 000 euros chacun, à Mme D... N..., M. E... N... et M. C... N... la somme de 2 000 euros chacun. Par le même jugement, le CHU de Nantes a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) Finistère-Morbihan les sommes de 6 312,25 euros au titre de ses débours et de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 et 14 mai et 8 novembre 2018 sous le n° 18NT01815 M. J... N... fils, Mme L... R... épouse N..., M. A... N..., Mme F... G... épouse N..., M. E... N..., Mme K... Q... épouse N..., Mme H... Q... épouse T..., Mme P... T... épouse U..., Mme D... N... et M. C... N..., représentés par Me M..., demandent à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mars 2018 en tant qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leurs conclusions indemnitaires ;

2°) à titre principal, de condamner le CHU de Nantes à leur verser la somme totale de 169 751,14 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation des intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de mettre à la charge de l'ONIAM, au titre de la solidarité nationale, la somme de 10 140 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation des intérêts ;

4°) de mettre à la charge du CHU de Nantes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la responsabilité du CHU de Nantes est engagée non seulement du fait d'un défaut d'information mais également du fait d'une faute médicale ; la coloscopie n'était pas indispensable et des alternatives de diagnostic moins invasives auraient pu être utilisées, surtout au vu de l'état général de la patiente le 31 août 2011 ; les experts ont retenu l'existence d'une imprudence à ce titre, faute à laquelle le décès W... N... est imputable de manière directe et certaine ;

- le CHU de Nantes doit indemniser Nicole N... d'une part, au titre du déficit fonctionnel temporaire qu'elle a subi durant 7 jours (entre le 31 août et le 7 septembre) à hauteur de 140 euros et, d'autre part, au titre des souffrances qu'elle a endurées, à hauteur de 10 000 euros ;

- s'agissant des préjudices patrimoniaux subis par les proches W... N..., le CHU doit être condamné à rembourser 4 188,99 euros au titre des frais d'obsèques, 151,46 euros de frais de déplacements et photocopies ainsi que 2 500 euros relatifs aux frais d'honoraires d'un médecin conseil, exposés à l'occasion de l'expertise, et enfin 7 770,95 euros au titre des frais d'hébergement de l'époux W... N..., atteint de la maladie d'Alzheimer, dans un établissement spécialisé ;

- s'agissant des préjudices extra-patrimoniaux subis par les proches W... N..., le CHU doit être condamné à leur verser les sommes globales de 60 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement et de 85 000 euros au titre du préjudice d'affection.

Par des mémoires en défense enregistrés les 29 juin et 12 juillet 2018 et le 18 septembre 2019 le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), représentés par Me O..., concluent au rejet de la requête.

Ils font valoir que les moyens soulevés par les consorts N... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 19 octobre 2018 l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me B..., conclut à sa mise hors de cause.

Il fait valoir que :

- la coloscopie pratiquée n'était pas indiquée et le recours à des techniques alternatives non invasives était envisageable ;

- le dommage subi par Nicole N... n'a pas eu de conséquences anormales eu égard à son état de santé antérieur.

Appelée à la cause, la CPAM Finistère-Morbihan n'a pas produit de mémoire.

II - Par une requête et des mémoires enregistrés les 28 mai, 29 juin, 12 juillet et 27 novembre 2018 et le 18 septembre 2019 sous le numéro 18NT02108 le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes et la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), représentés par Me O..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mars 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par les consorts N... et, le cas échéant, les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie Finistère-Morbihan.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- Nicole N... a bénéficié d'une information appropriée et aucune faute ne peut à cet égard être retenue contre le centre hospitalier ; en outre, le taux de perte de chance de 100 % appliqué par les premiers juges est erroné ;

- l'indication de la coloscopie, examen à visée diagnostique et curative, n'était pas fautive ;

- il n'existait pas d'alternative adaptée à la coloscopie et la perforation a été prise en charge dans les règles de l'art ; le décès de Mme N... a été favorisé par un état antérieur très dégradé, et le lien de causalité entre la coloscopie et le décès de la patiente n'est pas établi ;

- le risque de perforation colique au cours d'une coloscopie, qui n'est que de 0,01 %, est particulièrement exceptionnel, et la recherche diagnostique était justifiée, de sorte que le taux de perte de chance ne pouvait être que faible et certainement pas évalué à 100 % comme l'ont retenu les premiers juges ;

- le déficit fonctionnel temporaire allégué n'est pas imputable à la coloscopie ; en l'absence de complications, Nicole N... aurait nécessairement été hospitalisée au moins huit jours eu égard à son état de santé dégradé ; l'indemnité accordée par les premiers juges au titre des souffrances endurées n'est pas insuffisante ; les requérants n'établissent pas la nécessité de l'assistance d'un médecin conseil dans le cadre de l'expertise amiable ; il n'y a pas de lien de causalité direct entre les complications dont Nicole N... a eu à souffrir et l'hébergement en établissement spécialisé dont a dû bénéficier son époux ; le préjudice d'accompagnement n'est en l'espèce pas distinct du préjudice d'affection, qui n'a pas été insuffisamment évalué par les premiers juges.

Par un mémoire enregistré le 19 octobre 2018, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me B..., conclut à sa mise hors de cause par les mêmes moyens que dans l'instance n°18NT01815 visée ci-dessus.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 novembre 2018 les consorts N..., représentés par Me M..., concluent :

1°) au rejet de la requête du CHU de Nantes et de la SHAM ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mars 2018 en tant que ce dernier n'a pas intégralement fait droit à leurs demandes ;

3°) à la condamnation du CHU de Nantes à leur verser la somme totale de 169 751,14 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation des intérêts ;

4°) à titre subsidiaire, à ce que soit mise à la charge de l'ONIAM, au titre de la solidarité nationale, la somme de 10 040 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation des intérêts ;

5°) à ce que soit mise à la charge du CHU de Nantes la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils invoquent les mêmes moyens que dans l'instance n°18NT01815 visée ci-dessus.

Par une lettre enregistrée le 11 décembre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) Finistère-Morbihan a informé la cour de ce qu'elle n'entendait pas intervenir dans l'instance.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme S...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Demailly, substituant Me O..., avocat du CHU de Nantes et de la SHAM.

Considérant ce qui suit :

1. Nicole N..., alors âgée de 71 ans, a été admise au service des urgences du centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes le 8 août 2011 en raison de lésions cutanées diffuses associées à un amaigrissement rapide. Elle a subi différents examens exploratoires, dont un scanner thoraco-abdominal qui a révélé une embolie pulmonaire bilatérale ainsi qu'une colite droite, puis une coloscopie pratiquée le 31 août suivant et au décours de laquelle la paroi du côlon a été perforée par l'endoscope lors de la récupération d'un polype réséqué, ce qui a nécessité une colostomie, pratiquée en urgence. Son état s'est progressivement dégradé à compter du 2 septembre 2011, du fait d'une défaillance respiratoire aiguë, et elle est décédée le 7 septembre 2011. M. J... N... et M. A... N..., ses fils, Mme L... R... épouse N... et Mme F... G... épouse N..., ses belles-filles, M. E... N..., Mme D... N... et M. C... N..., ses petits-enfants, Mme K... Q... épouse N... et Mme H... Q... épouse T..., ses soeurs, et Mme P... T... épouse U..., sa nièce, ont saisi la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) des Pays de la Loire le 23 juillet 2012. Une expertise a été confiée à un médecin spécialiste de médecine interne et à un hépato-gastroentérologue, qui ont remis leur rapport le 2 mai 2013. Par un avis du 9 décembre 2013, la CCI a estimé que la responsabilité pour faute d'imprudence du CHU de Nantes était engagée et a évalué à 50 % la perte de chance d'éviter la survenue du décès. Les consorts N... ont adressé une réclamation préalable au CHU de Nantes par courrier du 4 septembre 2015. Ni le CHU ni son assureur, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), n'ayant fait d'offre d'indemnisation, les consorts N... ont saisi le tribunal administratif de Nantes, le 17 novembre 2015, d'une demande indemnitaire dirigée principalement contre le CHU de Nantes et subsidiairement contre l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM).

2. Par un jugement du 28 mars 2018, ce tribunal a jugé que la responsabilité du CHU de Nantes était engagée pour manquement à l'obligation d'information, a évalué à 100 % la perte de chance d'éviter le décès et a condamné le CHU de Nantes à verser aux consorts N... la somme globale de 12 299,99 euros, outre le versement, au titre du préjudice d'affection, de la somme de 15 000 euros à J... N..., époux décédé W... N..., de la somme de 4 000 euros chacun à M. J... N... fils et M. A... N... ses deux fils et de la somme de 2 000 euros chacun à Mme D... N..., M. E... N... et M. C... N..., ses petits-enfants.

3. Par la voie de l'appel principal dans l'instance n° 18NT01815 et de l'appel incident dans l'instance n° 18NT02108, les consorts N... demandent à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mars 2018 en tant que ce dernier n'a pas intégralement fait droit à leurs demandes, de porter à 169 751,14 euros la somme due par le CHU de Nantes et, à titre subsidiaire, de mettre à la charge de l'ONIAM le versement à leur profit de la somme de 10 140 euros. Par la voie de l'appel principal dans l'instance n° 18NT02108 et de l'appel incident dans l'instance n° 18NT01815 le CHU de Nantes et la SHAM concluent à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mars 2018 et au rejet de la demande des consorts N.... Il y a lieu de joindre les deux instances.

I. La responsabilité du CHU de Nantes

4. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique :

" I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ".

5. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport des experts désignés par la CCI, qui n'est pas contredit de manière utile par les éléments d'analyse médicale produits par le CHU de Nantes dans le dernier état de l'instruction, que, compte tenu du mauvais état général et des nombreux facteurs de comorbidité aiguë et chronique que présentait Nicole N... le jour où cet examen a été réalisé, la coloscopie présentait, en cas de survenue d'une complication per endoscopique, un risque élevé de mauvais pronostic, et que ce risque aurait dû conduire à différer l'acte de quelques semaines, ce qui aurait été sans conséquence sur l'évolution ultérieure. Dans ces conditions, et alors que d'autres examens étaient envisageables dans un premier temps, le choix de pratiquer une coloscopie dès le 31 août 2011 relève d'une imprudence médicale fautive qui, compte tenu des facteurs aggravants rappelés ci-dessus, doit être regardée comme constituant la cause directe du décès W... N.... Par suite, et sans qu'il soit besoin d'apprécier la réalité du défaut d'information retenu par les juges de première instance, les requérants sont fondés à rechercher la responsabilité du CHU de Nantes du fait de la faute médicale ainsi commise.

6. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que l'insuffisance pulmonaire sévère qui a provoqué le décès W... N... est en lien direct avec la survenue de la perforation colique et la réalisation en urgence de la colostomie pratiquée pour y remédier, complication qui ne serait pas survenue en l'absence de coloscopie. Les experts désignés par la CCI ont estimé, en particulier, que, si elle n'avait pas subi de coloscopie, Nicole N... serait retournée à son domicile et aurait vécu quelques semestres encore. Dans ces conditions, l'intéressée doit, en raison de l'imprudence commise par le CHU de Nantes dans le choix de l'examen diagnostic indiqué, être regardée comme ayant perdu une chance de se soustraire au risque de décès découlant directement de la réalisation de cette coloscopie qu'il y a lieu d'évaluer à 100 %.

II. Les préjudices

Sur les préjudices W... N... :

7. Le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause, de sorte que si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers.

8. Par ailleurs, il résulte de l'instruction et notamment de l'attestation du notaire qui a constaté la dévolution successorale Nicole N..., décédée le 7 septembre 2011 et de M. J... N... père, décédé le 26 décembre 2011, que les héritiers de ces derniers sont leurs deux fils, M. A... N... et M. J... N..., ainsi que M. E... N..., leur petit-fils et fils de M. I... N..., troisième fils du couple lui-même décédé.

9. En premier lieu, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que Nicole N..., admise au service des urgences du CHU de Nantes le 8 août 2011 dans un état de santé très dégradé nécessitant la réalisation de plusieurs examens exploratoires, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'ils ne se seraient pas poursuivis au-delà du 31 août 2011, ne pouvait prétendre à l'indemnisation d'un déficit fonctionnel temporaire à raison de son hospitalisation entre cette date et le 7 septembre 2011, jour de son décès.

10. En second lieu, les souffrances endurées par Nicole N... à la suite de la coloscopie litigieuse ont été évaluées par les experts à 4 sur une échelle de 7. Par suite, c'est par une juste appréciation de ce préjudice que les premiers juges ont condamné le CHU de Nantes à verser à ses héritiers la somme de 8 000 euros à ce titre.

Sur les préjudices propres des consorts N... :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

11. En premier lieu, eu égard aux pathologies en cause, il ne résulte pas de l'instruction que l'intervention d'un médecin spécialiste d'orthopédie et de traumatologie du sport en qualité de médecin conseil de M. J... N... fils a été utile à la solution du litige dans le cadre de l'expertise. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les prétentions des consorts N... à ce titre.

12. En second lieu, eu égard à l'état de très forte dépendance de J... N..., époux de la victime atteint de la maladie d'Alzheimer, et compte tenu, d'une part, de la forte dégradation de l'état de santé W... N... et, d'autre part, du caractère incertain tant de la date de son retour à domicile si elle n'avait pas subi de coloscopie que de sa capacité à s'occuper de son époux, le lien de causalité entre la réalisation de cet examen et les frais d'hébergement en établissement spécialisé exposés pour J... N... n'est pas établi.

13. Enfin il y a lieu de confirmer les sommes de 4 188,99 euros au titre des frais d'obsèques, de 111 euros au titre des frais de déplacement pour participer aux opérations expertales et de 40,46 euros au titre des frais de photocopie de dossier médical dans ce même cadre, qui ne sont pas contestées en appel par les parties.

S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux :

14. Dans les circonstances de l'espèce et eu égard à l'état de santé antérieur très dégradé de la victime et à ses faibles chances de survie à moyen terme ainsi qu'à l'état de santé de son mari tel que rappelé ci-dessus, il sera fait une plus exacte appréciation du préjudice d'affection subi par l'époux, les enfants et les petits-enfants W... N... du fait du décès de cette dernière en allouant la somme de 5 000 euros à J... N... père pour la période précédant son propre décès, la somme de 3 000 euros chacun à M. J... N... fils et à M. A... N... et la somme de 1 500 euros à chacun à Mme D... N..., à M. E... N... et à M. C... N..., ses petits-enfants. Le jugement attaqué doit être réformé sur ce point.

15. Par ailleurs, les personnes dépourvues de lien de parenté direct avec une victime peuvent être indemnisées de leur préjudice d'affection à la condition d'établir par tout moyen avoir entretenu un lien affectif réel et certain avec celle-ci. En se bornant à produire des attestations de leur main et quelques photographies, pour la plupart anciennes, les belles-filles, les soeurs et la nièce W... N... n'établissent pas avoir entretenu avec cette dernière un lien affectif de nature à leur ouvrir droit à réparation au titre du préjudice d'affection. Il y a donc lieu de confirmer le jugement attaqué sur ce point.

16. Enfin, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les requérants ne justifiaient pas d'un préjudice d'accompagnement indemnisable distinct du préjudice d'affection dès lors qu'ils n'apportent aucun élément de nature à établir qu'ils auraient durant les 7 jours concernés apporté à leur mère, grand-mère et parente une aide particulière.

17. Il résulte de ce qui précède que le CHU de Nantes doit être condamné à verser aux héritiers de J... et Nicole N... la somme de 23 340,45 euros et la somme de 1 500 euros à chacun des trois petits-enfants de ces derniers.

Sur les intérêts et la capitalisation :

18. Les consorts N... ont droit aux intérêts sur les sommes que le CHU de Nantes est condamné à leur verser à compter du 8 septembre 2015, date de réception de la demande préalable qu'ils ont adressée au CHU de Nantes. Les intérêts échus à compter du 8 septembre 2016 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.

Sur les frais des instances :

19. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du CHU de Nantes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme que les consorts N... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les sommes que le tribunal administratif de Nantes a condamné le centre hospitalier universitaire de Nantes à verser aux héritiers W... et J... N..., soit MM. J... N... fils, Loïc N... et Cédric N..., sont ramenées à la somme globale de 23 340,45 euros, somme qui sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 8 septembre 2016 et à chaque échéance annuelle.

Article 2 : Les sommes que le tribunal administratif de Nantes a condamné le centre hospitalier universitaire de Nantes à verser à Mme D... N..., à M. E... N... et à M. C... N..., petits enfants W... et J... N..., sont ramenées à la somme de 1 500 euros chacun, sommes qui seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 8 septembre 2016 et à chaque échéance annuelle.

Article 3 : Le jugement n° 1509518 du 28 mars 2018 du tribunal administratif de Nantes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des consorts N... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... N..., à Mme L... R... épouse N..., à M. A... N..., à Mme F... G... épouse N..., à M. E... N..., à Mme K... Q... épouse N..., à Mme H... Q... épouse T..., à Mme P... T... épouse U..., à Mme D... N..., à M. C... N..., au centre hospitalier universitaire de Nantes, à la société hospitalière d'assurances mutuelles, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie Finistère-Morbihan.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme V..., présidente-assesseure,

- Mme S..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 janvier 2020.

Le rapporteur

M. S...Le président

I. PerrotLe greffier

M. J...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18NT01815,18NT021082

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01815
Date de la décision : 24/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Muriel LE BARBIER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SOCIETE AVOCATS CARTRON-LHOSTIS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-01-24;18nt01815 ?
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