La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/01/2020 | FRANCE | N°19NT02489

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 10 janvier 2020, 19NT02489


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H..., agissant au nom de l'enfant mineur G... J... C..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 novembre 2018 par laquelle le président de la commission de recours contre les refus de visas a rejeté comme manifestement mal fondé son recours dirigé contre la décision du chef du service des visas de l'ambassade de France au Kenya du 23 octobre 2018 refusant de délivrer un visa de long séjour à l'enfant G... J... C....

Par un jugement n°1900974 du 28 mai 2

019 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... H..., agissant au nom de l'enfant mineur G... J... C..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 novembre 2018 par laquelle le président de la commission de recours contre les refus de visas a rejeté comme manifestement mal fondé son recours dirigé contre la décision du chef du service des visas de l'ambassade de France au Kenya du 23 octobre 2018 refusant de délivrer un visa de long séjour à l'enfant G... J... C....

Par un jugement n°1900974 du 28 mai 2019 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juin 2019, sous le n° 1902489 et un mémoire enregistré le 13 décembre 2019 (non communiqué), Mme D... E... H..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 mai 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 30 novembre 2018 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer à M. G... J... C... le visa sollicité dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou subsidiairement, de procéder au réexamen de la demande, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision en litige est insuffisamment motivée en fait et en droit ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de la demande ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 août 2019 le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... E... H..., ressortissante somalienne, née le 1er juillet 1987, est entrée en France en janvier 2015 afin d'y solliciter l'asile. Elle a obtenu le 16 juin 2016, le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 16 juin 2016 et s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Elle a sollicité le bénéfice de la réunion familiale au profit de M. G... J... C... qu'elle présente comme son fils. Cette demande a été rejetée par une décision du 23 octobre 2018 de l'ambassadrice de France au Kenya. Le 30 novembre 2018, le président de la commission de recours contre les refus de visas a confirmé cette décision en rejetant comme manifestement mal fondé le recours formé contre cette décision. Mme H... relève appel du jugement du 28 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L 752-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, en sa rédaction alors en vigueur : " (...) / La réunification familiale n'est pas soumise à des conditions de durée préalable de séjour régulier, de ressources ou de logement. / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. (...) " et aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

3. La force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de la demande de visa, Mme H... a produit un certificat de naissance (" Warqadda Dhalashadda " ou " birth certificate ") établi le 13 février 2018 et délivré par la municipalité de Barawa (Somalie) après consultation du registre de famille portant le n° 1437. Les mentions figurant dans cet acte sont identiques à celles du certificat établi le 5 janvier 2008 portant le n° 6348 soit quelques jours après la naissance du jeune G... ainsi qu'avec celles figurant sur le passeport de ce dernier, délivré le 15 février 2018, dont la validité n'est pas contestée par le ministre et qui fait apparaître la filiation maternelle de l'enfant. Les indications figurant sur ces documents relatives à la date et au lieu de naissance de l'enfant, à l'identité de la mère sont concordantes avec les déclarations de Mme E... H... lors de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée en 2015 ainsi qu'avec les mentions de la fiche familiale de référence établie devant la Cour nationale du droit d'asile le 15 août 2016.

5. Si le ministre soutient que les certificats de naissance ne comportent pas toutes les informations requises, il ne se réfère toutefois à aucune disposition précise de la législation somalienne applicable. Dans ces conditions, alors même que le nom " C... " porté dans l'acte de 2008 tout comme sur le passeport, est orthographié " Aweys " dans l'acte de 2018, l'absence d'authenticité des actes produits au soutien de la demande de visa n'est pas établie par les pièces du dossier.

6. Il s'ensuit que le lien de filiation entre Mme D... E... H... et le jeune G... J... C... doit être regardé comme établi.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, eu égard à ses motifs, et sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait et de droit, implique la délivrance à l'enfant G... J... C..., du visa sollicité. Il y a lieu, par suite d'enjoindre au ministre de délivrer à l'intéressé ce visa dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme E... H... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 28 mai 2019 et la décision de la commission de recours contre les refus de visas du 30 novembre 2018 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. G... J... C... un visa de long séjour dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme E... H... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I... H... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2019, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme F..., président-assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 janvier 2020.

Le rapporteur,

C. F...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT02489


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02489
Date de la décision : 10/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : CABINET DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-01-10;19nt02489 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award