Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... a demandé au tribunal administratif de Rennes :
1°) d'annuler l'arrêté n° 2015-11187 du 21 mai 2015 par lequel le préfet de la région Bretagne a approuvé et rendu obligatoire la délibération n° 2015-035 " ALGUES-CRPMEM-A " du 30 avril 2015 du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) de Bretagne ;
2°) d'annuler cette même délibération, en tant qu'elle prévoit en son article 1er la division du périmètre en différentes zones de pêche et la délivrance d'une autorisation limitée à ces zones aux navires titulaires d'une licence, et en tant qu'elle prévoit en son article 2 que le CRPMEM pourra déterminer, pour chaque campagne, les zones de pêche, une gestion spécifique par zone de pêche, un contingent global de licences, un contingent de licences délivrées par le comité départemental et par zone de pêche et la fixation de dates d'ouverture et de fermeture de la pêche pour l'ensemble du périmètre et/ou par zone de pêche ;
3°) d'annuler l'arrêté n° 2015-11188 du 21 mai 2015 par lequel le préfet de la région Bretagne a approuvé et rendu obligatoire la délibération n° 2015-036 " ALGUES-CRPMEM-B " du 30 avril 2015 du CRPMEM de Bretagne fixant le nombre de licences et l'organisation des campagnes de pêche des algues marines Laminaria Digitata sur le littoral de la région Bretagne ;
4°) d'annuler cette délibération en tant qu'elle a fixé, en son article 4, les conditions d'organisation de la campagne 2015 de pêche du Laminaria.
Par un jugement n°1503285 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Rennes a annulé les arrêtés n° 2015-11187 et n° 2015-11188 du préfet de la région Bretagne en date du 21 mai 2015 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C....
Procédure devant la cour :
I°) Par une requête enregistrée sous le n° 18NT01041 le 8 mars 2018 et un mémoire enregistré le 14 novembre 2019 le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2017 en tant qu'il a annulé les arrêtés n° 2015-11187 et n° 2015-11188 du préfet de la région Bretagne en date du 21 mai 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Rennes.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a jugé que les arrêtés préfectoraux du 21 mai 2015, rendant obligatoires les délibérations du CRPMEM du 30 avril 2015, avaient été pris en méconnaissance des dispositions des articles L. 914 -3 du code rural et de la pêche maritime et L. 120-1 du code de l'environnement ; la procédure particulière d'élaboration des décisions en matière de végétaux marins justifie que la consultation du public soit réalisée non par la préfecture mais par le CRPMEM lui-même, en amont de l'intervention d'un arrêté préfectoral ; les projets litigieux ont été mis en ligne pour consultation du public sur le site internet du CRPMEM du 7 au 30 avril 2015 conformément aux dispositions du II de l'article L. 120-1 du code de l'environnement et n'ont donné lieu à aucune observation ce qui a permis leur adoption par le CRPMEM par les délibérations du 30 avril 2015 ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que le bureau du CRPMEM ne disposait pas d'une délégation pour prendre la délibération n° 2015-035 portant création d'une licence de pêche ; cette délibération n'a pas institué une nouvelle licence de pêche, exclue du champ de la délégation faite au bureau, mais a renouvelé la licence de pêche existante, instituée par la délibération n° 2014-046 du 18 avril 2014, pour la campagne de pêche suivante ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que la délibération n° 2015-036 fixant le nombre de licences et l'organisation des campagnes de pêche méconnaissait les dispositions de l'article L. 921-2 du code rural et de la pêche maritime en ce qu'elle ne prenait pas en compte les orientations du marché et les équilibres économiques pour attribuer les licences de pêche ; les critères liés aux orientations du marché et aux équilibres économiques, s'ils ne sont pas mentionnés expressément, ont néanmoins été pris en considération dans le cadre de l'élaboration de la décision ; le fait qu'aucun indicateur traduisant leur prise en compte ne soit précisément énoncé dans la délibération est sans incidence à cet égard ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 921-2-2 et R. 912-31 du code rural et de la pêche maritime est inopérant, le comité ne s'étant pas fondé sur ces dispositions ;
- contrairement à ce que soutient M. C..., les articles L. 921-2-1 et R. 912-31 du code rural et de la pêche maritime permettaient au comité de définir des zonages pour organiser la pêche d'algues Laminaria Digitata ;
- le principe d'égalité n'est pas méconnu dès lors que les dispositions prises par le comité ont pour objet dans un secteur en surcapacité d'éviter une concentration de la pêche dans certains secteurs en répartissant l'effort de pêche sur tout le littoral ;
- si M. C... soutient que les points 4.3 et 4.4 de la délibération " CRPMEM - B1 " et l'arrêté la rendant obligatoire permettant aux producteurs de changer de zone sont illégaux dès lors qu'ils ne seraient pas appliqués correctement par l'administration, ce moyen est inopérant car l'application de ces dispositions n'a pas d'influence sur leur légalité ; en tout état de cause le moyen n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
- si M. C... soutient que la délibération " CRPMEM - B1 " méconnait le principe de non rétroactivité des actes réglementaires, ce moyen est inopérant car cette délibération n'a produit aucun effet dans le passé ;
- si M. C... soutient que la délibération " Algues-CRPMEM-Bl " méconnaîtrait le principe de sécurité juridique, faute d'être assortie de mesures transitoires, la disposition de l'article L. 221-5 du code des relations entre le public et l'administration ne s'applique pas à la situation de M. C..., dès lors que la décision contestée, qui ne l'a pas empêché de récolter des algues dans les zones n° 4 et 6, n'a pas porté une atteinte excessive à ses intérêts ;
- si M. C... soutient que l'annexe II de la délibération " Algues-CRPMEM-Bl ", en ce qu'elle affecte ses navires à des zones en dehors desquelles il ne peut pas pêcher, constitue un retrait illégal de la décision du 24 décembre 2014 par laquelle le préfet lui a attribué une autorisation de pêche aux algues, un tel moyen est inopérant, dès lors que la fixation de zones par le CRPMEM aux fins d'organisation des pêcheries, en vertu de l 'article R. 912-32 du CRPM, n'a pas pour effet de retirer l'autorisation de pêche qui a été attribuée à M. C... sur le fondement de l'article R. 921-20 du CRPM ;
- si M. C... soutient que le comité a commis une erreur de fait ou une erreur d'appréciation juridique des faits en considérant qu'il n'avait pas d'antériorités dans la zone de pêche n° 5, les fiches de pêche dont il se prévaut indiquent qu'il a récolté des goémons en zone n° 5 ; or ces éléments ne mentionnent pas le type d'algues récoltées ; de plus M. C... ne démontre pas avoir communiqué ces fiches à 1'Ifremer ; enfin les volumes invoqués (inférieurs à 200 T) sont largement inférieurs aux volumes qu'il récoltés dans les zones 4 et 6 ;
- si M. C..., qui se prévaut de l'article 110.11 de l'arrêté du 23 novembre 1987 relatif à la sécurité des navires, soutient que le rattachement de certains navires concurrents à la zone n° 5 serait illégal, ceux-ci n'ayant pas le droit de pêcher au-delà d'une limite de 5 milles marins, les dispositions du code des transports et les arrêtés pris pour son application, relatifs aux caractéristiques des navires, ne sont pas pris en compte lors de l'attribution des zones de récolte des algues à des fins de protection de la ressource marine, en vertu de l'indépendance des législations.
Par des mémoires en défense enregistrés le 4 octobre 2019 et le 29 octobre 2019 (non communiqué) M. C..., représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au versement par l'Etat d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés le 7 octobre 2019 et le 14 novembre 2019 le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Bretagne, représenté par Me B..., conclut à l'annulation du jugement du 29 décembre 2017, au rejet de la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Rennes et à ce qu'il soit mis à sa charge une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en l'absence de précision quant aux incidences directes et significatives sur l'environnement de la délibération et de l'arrêté critiqués, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 120-1 du code de l'environnement doit être écarté ;
- en tout état de cause, la procédure de consultation du public a été respectée ;
- M. C... a participé activement à l'élaboration des décisions contestées et n'a été privé d'aucune garantie, et la participation du public a été largement respectée par la consultation électronique ;
- les dispositions de l'article L. 921-2 du code rural et de la pêche ont été respectées ; le critère de l'antériorité n'est pas le seul à avoir été pris en compte ; les délibérations et avis visés en préambule des délibérations doivent être pris en compte.
II°) Par une requête enregistrée sous le n° 18NT01051 le 8 mars 2018 et des mémoires enregistrés les 1er octobre et 14 novembre 2019, le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Bretagne, représenté par Me H..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 décembre 2017 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a annulé les arrêtés n° 2015-11187 et n° 2015-11188 du préfet de la région Bretagne en date du 21 mai 2015;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il invoque les mêmes moyens que dans l'instance n°18NT01041 visée ci-dessus.
Par des mémoires enregistrés les 22 mai 2018 et 14 novembre 2019 le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rennes du 29 décembre 2017 et au rejet de la demande de M. C... devant le tribunal administratif de Rennes par les mêmes moyens que ceux invoqués dans l'instance n° 18NT01041.
Par des mémoires en défense enregistrés les 11 octobre et 29 novembre 2019 (non communiqué) M. C..., représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête pour les mêmes motifs que ceux exposés dans l'instance n°18NT01041 et au versement par l'Etat d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme I...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- les observations de Me G..., représentant M. C... et celles de Me F..., représentant le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... exploite dans le Finistère deux navires de pêche destinés à la récolte des algues Laminaria digitata et Laminaria Hyperborea et est titulaire à ce titre d'une licence de pêche. Il a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les deux arrêtés n° 2015-11187 et n° 2015-11188 du 21 mai 2015 par lesquels le préfet de la région Bretagne a approuvé et rendu obligatoires les deux délibérations 035 et 036 du 30 avril 2015 du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) de Bretagne qui, pour la première, portait création et fixation des conditions d'attribution de la licence spéciale pour la pêche des algues marines Laminaria Digitata et Laminaria Hyperborea et, pour la seconde, fixait le nombre de licences au titre de la campagne 2015 et l'organisation des campagnes de pêche des algues marines Laminaria Digitata sur le littoral de la région Bretagne. Il a également demandé l'annulation partielle de ces deux délibérations. Par un jugement du 29 décembre 2017 le tribunal administratif de Rennes a annulé les deux arrêtés du préfet de la région Bretagne du 21 mai 2015 et a rejeté comme irrecevables les conclusions de M. C... tendant à l'annulation partielle des délibérations du 30 avril 2015 du CRPMEM, au motif que celles-ci présentaient un caractère indivisible. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation et le comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) de Bretagne relèvent chacun appel de ce jugement en tant qu'il a annulé les arrêtés n° 2015-11187 et n° 2015-11188 du préfet de la région Bretagne du 21 mai 2015.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 914-3 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsqu'elles ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration, les décisions des personnes publiques prises en application de la législation nationale ou des règlements de l'Union européenne relatifs à la pêche maritime et à l'aquaculture marine ayant une incidence sur l'environnement sont soumises à participation du public dans les conditions et limites prévues aux articles L. 120-1 à L. 120-2 du code de l'environnement ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 120-1 du code de l'environnement, dans sa version alors applicable : " I. - Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / II. - Sous réserve des dispositions de l'article L. 120-2, le projet d'une décision mentionnée au I, accompagné d'une note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs de ce projet, est mis à disposition du public par voie électronique (...). Lorsque le volume ou les caractéristiques du projet de décision ne permettent pas sa mise à disposition par voie électronique, la note de présentation précise les lieux et horaires où l'intégralité du projet peut être consultée (...) ".
3. Les arrêtés du 21 mai 2015 rendent obligatoires les délibérations du 30 avril 2015 du CRPMEM qui, pour la première, porte création et fixation des conditions d'attribution de la licence spéciale pour la pêche des algues marines Laminaria Digitata et Laminaria Hyperborea et, pour la seconde, fixe le nombre de licences accordées au titre de la campagne 2015 et l'organisation des campagnes de pêche des algues marines Laminaria Digitata sur le littoral de la région Bretagne. Eu égard à leur objet, ces délibérations ont nécessairement une incidence directe et significative sur l'environnement. Elles devaient dès lors être soumises à la participation du public. Or, à la supposer établie, la seule mise en ligne par le CRPMEM des projets de délibération du 30 avril 2015 en vue de leur examen par les membres du comité ne saurait être assimilée à la procédure de participation du public prévue à l'article L. 120-1 du code de l'environnement. Dans ces conditions, les délibérations du 30 avril 2015 ont été prises à la suite d'une procédure irrégulière, qui a privé les administrés d'une garantie. Par voie de conséquence, les arrêtés du préfet du 21 mai 2015, validant ces délibérations sont entachés d'illégalité.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 921-2 du code rural et de la pêche maritime " Les autorisations mentionnées à l'article L. 921-1 sont délivrées par l'autorité administrative ou sous son contrôle, pour une durée déterminée, en tenant compte des trois critères suivants : - l'antériorité des producteurs ;- les orientations du marché ;- les équilibres économiques. Les autorisations de pêche des espèces soumises à un total autorisé de captures ou à des quotas de captures en application de la réglementation européenne sont délivrées par l'autorité administrative ou, sous son contrôle, par des organisations de producteurs ou leurs unions. (...). ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 921-1 du même code : " Dans le respect des objectifs mentionnés à l'article L. 911-2, la récolte des végétaux marins, (...) peuvent être soumis à la délivrance d'autorisations. Ces autorisations ont pour objet de permettre à une personne physique ou morale pour un navire déterminé, d'exercer ces activités pendant des périodes, dans des zones, pour des espèces ou groupe d'espèces et, le cas échéant, avec des engins et pour des volumes déterminés. (...). ". Enfin, selon l'article R. 921-95 de ce code : " L'autorité ou l'organisation professionnelle mentionnées à l'article R. 921-94 fixe, pour chaque régime d'autorisations, le plafond, exprimé en nombre, puissance ou tonnage, des autorisations susceptibles d'être délivrées, en tenant compte notamment des capacités biologiques de la pêcherie concernée, de l'antériorité des producteurs, des orientations du marché et des équilibres socio-économiques définis conformément à l'article D. 921-1. Les autorisations de pêche résultant d'un régime d'autorisation de pêche arrêté par les autorités administratives définies à l'article R. 911-3 sont délivrées, dans un délai de deux mois, soit par ces autorités, soit sous le contrôle de celles-ci, par le comité national ou les comités régionaux des pêches maritimes et des élevages marins ou les organisations de producteurs, par priorité aux demandeurs qui répondent aux critères utilisés pour la fixation du plafond du régime mentionné à l'alinéa précédent. ".
5. La délibération 2015-036 du 30 avril 2015 du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Bretagne fixe le nombre de licences et organise les campagnes de pêche des algues marines Laminaria Digitata sur le littoral de la région Bretagne. Elle constitue ainsi une autorisation au sens de l'article L. 921-1 du code rural et de la pêche maritime et doit, par voie de conséquence, être prise en tenant compte des trois critères visés à l'article L. 921-2 du même code. Selon son article 4.2, relatif au " Rattachement des navires à une zone particulière " : " Chaque navire est rattaché à une ou plusieurs zones en fonction de sa ou de ses zones de pêches historiques des algues marines-Laminaria digitata et sur la base de son activité quantifiée sur les deux années de référence 2012 et 2013. ". Aux termes de l'article 4.5 de la même délibération relatif à la " Capacité de référence annuelle des zones " : " La capacité annuelle des zones est fixée pour chacune des zones sur la base de la moyenne des prélèvements opérés de 2009 à 2012, prenant en considération les données d'obligations déclaratives de production des goémoniers sur la période et l'état de connaissance et d'expertise d'Ifremer. ". Compte tenu des termes ainsi rappelés, et alors même que le ministre et le comité régional des pêches requérants soutiennent que l'élaboration de la délibération est fondée sur une prise en compte effective des trois critères prescrits, la délibération contestée, qui attribue les licences de pêche et affecte les navires par zone en fonction des volumes de capture des années antérieures et selon l'antériorité de leur zone de pêche, ne peut qu'être regardée comme fondée sur le seul historique des captures et des zonages d'attribution. A cet égard, le rappel, en préambule de la délibération, de la nécessité de gérer durablement la ressource alguéale et d'organiser la récolte de façon collégiale, équitable et durable, ne permet pas d'estimer que les critères des orientations du marché et des équilibres économiques auraient été effectivement pris en considération. Dans ces conditions, la délibération 036 du 30 avril 2015 a été prise en méconnaissance des dispositions du code rural et de la pêche maritime rappelées au point 4. Il en résulte que l'arrêté préfectoral 21 mai 2015 la rendant obligatoire est entaché de la même illégalité.
6. Il résulte de ce qui précède que les motifs rappelés aux point 3 et 5 du présent arrêt suffisent à établir l'illégalité des deux arrêtés contestés, et que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ainsi que le CRPMEM de Bretagne ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes les a annulés.
Sur les frais d'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C..., qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le CRPMEM de Bretagne au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat seulement une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes n°18NT01041 et 18NT01051 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Bretagne sont rejetées.
Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture et de l'alimentation, au comité régional des pêches maritimes et des élevages marins de Bretagne et à M. A... C....
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président,
- Mme I..., présidente-assesseure,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2020.
La rapporteure
N. I...Le président
I. Perrot
Le greffier
M. D...
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°18NT01041, 18NT01051 6