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20/12/2019 | FRANCE | N°19NT02722

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 décembre 2019, 19NT02722


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., en sa qualité d'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans pour conduire une expertise sollicitée par la commune de Lèves et par la société TP Compact portant sur les désordres affectant le parvis de la mairie à la suite de la réalisation de travaux d'accessibilité aux personnes handicapées, a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans que ses opérations d'expertise en cours soient rendues communes et opposables à la société

Anjou Granit Import en sa qualité de fournisseur du matériau mis en oeuvre sur le parv...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C..., en sa qualité d'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans pour conduire une expertise sollicitée par la commune de Lèves et par la société TP Compact portant sur les désordres affectant le parvis de la mairie à la suite de la réalisation de travaux d'accessibilité aux personnes handicapées, a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans que ses opérations d'expertise en cours soient rendues communes et opposables à la société Anjou Granit Import en sa qualité de fournisseur du matériau mis en oeuvre sur le parvis de la mairie par la société TP Compact, à la société Acte Iard en sa qualité d'assureur de la société Anjou Granit Import, à la société Generali en sa qualité d'assureur de la société Anjou Granit Import et à la Mutuelle des architectes français en sa qualité d'assureur de M. G..., maître d'oeuvre.

Par une ordonnance n° 1901665 du 24 juin 2019, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a accepté l'extension de la mission de l'expert aux quatre sociétés désignées.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 10 juillet 2019 et 22 novembre 2019, la société Anjou Granit Import, représentée par Me H..., demande à la cour d'annuler l'ordonnance du 24 juin 2019 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'elle a étendu les opérations d'expertise à son égard et à celui de ses assureurs, les sociétés Acte Iard et Generali.

Elle soutient que :

- la demande d'extension des opérations d'expertise est inutile dès lors que l'expert peut disposer des éléments qu'il recherche par d'autres moyens et qu'elle ne présente aucun intérêt dans la perspective du litige principal car aucune demande ne pourra être formulée à son encontre, ou à celui de ses assureurs, sans se heurter à la prescription ;

- l'ordonnance est irrégulière en ce qu'elle ne statue par sur la question de la prescription.

Par un mémoire, enregistré le 22 octobre 2019, la société Acte Iard, représentée par Me I..., conclut à l'annulation de l'ordonnance du 24 juin 2019 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans en ce qu'elle a étendu les opérations d'expertise à son égard.

Elle soutient que :

- le caractère contradictoire de la procédure a été méconnue dès lors qu'elle est attraite à la procédure d'expertise sans avoir pu faire valoir ses observations en préalable ;

- la procédure d'expertise est inutile à son encontre au sens de l'article R. 532-4 du code de justice administrative pour le motif exposé par la société Anjou Granit Import et alors que l'expert ne cherche qu'a être éclairé sur l'origine des désordres constatés.

Par un mémoire, enregistré le 24 octobre 2019, la société TP Compact, représentée par Me D..., conclut à la confirmation de l'ordonnance de référé en ce qu'elle a étendu les opérations d'expertise communes et opposables à la société Anjou Granit et à ce que soit mis à la charge de cette dernière société le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'il est nécessaire d'attraire la société Anjou Granit Import à la procédure afin de disposer d'informations sur les caractéristiques techniques des pierres vendues et que la question de la prescription relève du juge du fond sachant qu'en tout état de cause l'action n'était pas prescrite au jour de l'introduction de la présente requête.

Par un mémoire, enregistré le 19 novembre 2019, M. E... G..., représenté par Me F..., conclut à la confirmation de l'ordonnance de référé en ce qu'elle a étendu les opérations d'expertise communes et opposables à la société Anjou Granit.

La requête a été communiquée à M. C... qui, bien qu'informé de l'obligation de ministère d'avocat par courrier du 24 juillet 2019, n'a pas produit de mémoire par avocat.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la société Acte IARD tendant à l'annulation de l'ordonnance contestée au motif qu'elles s'analysent comme une requête en appel, qui est tardive.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une ordonnance du 6 juillet 2018, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a fait droit à la demande d'expertise présentée par la commune de Lèves aux fins de déterminer les désordres affectant le parvis de la mairie à la suite de la réalisation de travaux d'accessibilité aux personnes handicapées et a désigné, à cet effet, un expert en la personne de M. A... C.... Cet expert a sollicité, le 13 mai 2019, devant le même tribunal, l'extension de ses opérations d'expertise à la société Anjou Granit Import, qui a fourni le matériau mis en oeuvre par la société TP Compact, aux sociétés Acte Iard et Generali en leur qualité d'assureurs de la société Anjou Granit Import et à la Mutuelle des architectes français en sa qualité d'assureur de M. G..., le maître d'oeuvre. Par une ordonnance du 24 juin 2019, dont la société Anjou Granit Import relève appel, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a fait droit à ces demandes.

Sur la recevabilité des conclusions de la société Acte IARD :

2. Aux termes de l'article R. 533-1 du code de justice administrative : " L'ordonnance rendue en application du présent titre par le président du tribunal administratif ou par son délégué est susceptible d'appel devant la cour administrative d'appel dans la quinzaine de sa notification. ". La société Acte IARD, partie à l'instance devant le tribunal administratif d'Orléans, avait qualité pour se pourvoir en appel contre l'ordonnance attaquée. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation de cette ordonnance ne peuvent être regardées que comme une requête d'appel. Celle-ci n'a été enregistrée au greffe de la présente cour que le 22 octobre 2019, soit après l'expiration du délai d'appel qui a commencé à courir à compter du 8 juillet 2019, date à laquelle lui a été notifiée l'ordonnance attaquée. Elle est donc tardive et, par suite, irrecevable.

Sur le bien-fondé de la demande d'extension d'expertise :

3. Aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". Par ailleurs, les articles R. 532-3 et R. 532-4 du même code disposent que " Le juge des référés peut (...) à la demande de l'expert formée à tout moment, étendre l'expertise à des personnes autres que les parties initialement désignées par l'ordonnance, ou mettre hors de cause une ou plusieurs des parties ainsi désignées. / Il peut, dans les mêmes conditions, étendre la mission de l'expertise à l'examen de questions techniques qui se révélerait indispensable à la bonne exécution de cette mission, ou, à l'inverse, réduire l'étendue de la mission si certaines des recherches envisagées apparaissent inutiles. " et que " Le juge des référés ne peut faire droit à la demande prévue au premier alinéa de l'article R. 532-3 qu'après avoir mis les parties et le cas échéant les personnes auxquelles l'expertise doit être étendue en mesure de présenter leurs observations sur l'utilité de l'extension ou de la réduction demandée.(...) ". Peuvent être appelées en qualité de parties à une expertise ordonnée sur le fondement de ces dispositions les personnes qui ne sont pas manifestement étrangères au litige susceptible d'être engagé devant le juge de l'action qui motive l'expertise. En outre le juge du référé peut appeler à l'expertise en qualité de sachant toute personne dont la présence est de nature à éclairer ses travaux.

4. En premier lieu, comme il a été exposé au point 1, M. C... a demandé, sur le fondement de l'article R. 532-3 précité du code de justice administrative, d'étendre la mission qui lui a été confiée par ordonnance du 6 juillet 2018 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans notamment à la société Anjou Granit Import et à ses assureurs, les sociétés Acte Iard et Generali. Cette demande est motivée par la circonstance que les parties déjà appelées sont dans l'incapacité de définir les caractéristiques techniques des pierres, venant de Chine, utilisées pour constituer le parvis de la mairie de Lèves. Dès lors, la société Anjou Granit Import, qui a fourni ces pierres, doit être regardée comme un sachant dont la présence aux opérations d'expertise serait de nature à éclairer les travaux de l'expert, indépendamment même des analyses déjà décidées pour définir la nature desdites pierres.

5. En deuxième lieu, la société oppose à cette demande d'élargissement la prescription de l'action au fond susceptible de la viser en sa qualité de fournisseur. Cependant c'est en sa qualité de sachant, pour les motifs invoqués au point précédent, que le juge des référés a appelé à l'expertise la société Anjou Granit Import. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'une quelconque prescription pourrait être opposée au cas d'espèce. Par ailleurs, l'action susceptible d'être engagée par la commune de Lèves à l'égard des autres intervenants, à l'origine de la procédure ici contestée, n'était pas manifestement prescrite.

6. En revanche, dès lors que, comme il a été dit, la société Anjou Granit Import est attraite à l'expertise en qualité de sachant, et non en vue d'une action contentieuse ultérieure visant à voir éventuellement reconnaître sa responsabilité de fournisseur, il n'apparaît pas que la présence de ses assureurs y serait d'une quelconque utilité. Elle est ainsi fondée à contester l'extension de l'expertise à ses assureurs, les sociétés Generali et Actes Iard.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société Anjou Granit Import n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée en tant qu'elle la concerne mais est fondée à en demander l'annulation en tant qu'elle étend l'expertise aux sociétés Acte Iard et Generali.

Sur les frais d'instance :

8. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la société Anjou Granit Import, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme demandée au titre des frais exposés par la société TP Compact.

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 1901665 du 24 juin 2019 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans est annulée en tant qu'elle étend l'expertise aux sociétés Acte Iard et Generali.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Anjou Granit Import et les conclusions de la requête d'appel de la société Acte IARD sont rejetés.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société TP Compact sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Anjou Granit Import, à M. A... C..., à la société TP compact, à la société Acte IARD, à la mutuelle des architectes français, à la société Generali IARD, à la commune de Lèves et à M. G....

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président,

- M. B..., président assesseur,

- Mme J..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

C. B...

Le président,

L. Lainé

La greffière,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet d'Eure-et-Loir en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT02722


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02722
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SCP IMAGINE BROSSOLETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-12-20;19nt02722 ?
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