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20/12/2019 | FRANCE | N°18NT02225

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 20 décembre 2019, 18NT02225


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 30 mars 2018 par lequel la préfète de l'Orne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800894 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 juin 2018 et 26 août 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour

d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen et l'arrêté préfectoral du 30 mars 2018.

Il...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 30 mars 2018 par lequel la préfète de l'Orne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1800894 du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 juin 2018 et 26 août 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen et l'arrêté préfectoral du 30 mars 2018.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision qui fixe le pays de renvoi est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 5 décembre 2018 et 2 décembre 2019, la préfète de l'Orne conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.

Par une décision du 19 juillet 2018, M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 3 mai 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mars 2018 par lequel la préfète de l'Orne l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. D... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il est constant que M. D... est le père de la petite Mélissa, née le 2 novembre 2017, de nationalité française, qu'il a reconnue le 1er septembre 2017. Il ressort des pièces du dossier, notamment, du jugement du 9 juillet 2018 du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance d'Argentan, qui fait état d'éléments de faits antérieurs à la décision contestée, que M. D... n'a pu voir sa fille depuis la naissance de celle-ci en raison du refus de sa mère qui entend faire obstacle aux droits que détient l'intéressé en tant que père de l'enfant, que celui-ci a tenté en vain une médiation familiale et qu'il a saisi, le 9 février 2018, le juge aux affaires familiales en vue de faire constater l'exercice conjoint de l'autorité parentale et d'obtenir un droit de visite et d'hébergement. Par suite, et dans les circonstances particulières de l'espèce, en prenant l'arrêté contesté, la préfète de l'Orne a porté au droit de M. D... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 3 mai 2018 du tribunal administratif de Caen et l'arrêté du 30 mars 2018 par lequel la préfète de l'Orne a obligé M. D... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, à la préfète de l'Orne.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme A..., président assesseur,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

C. A...

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°18NT02225 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02225
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SCP DESDOITS MARCHAND

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-12-20;18nt02225 ?
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