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26/11/2019 | FRANCE | N°18NT02893

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 26 novembre 2019, 18NT02893


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Trainou a rejeté sa demande du 6 juillet 2016 tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme approuvé le 5 février 2015, à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle rejette sa demande d'abrogation du plan local d'urbanisme en ce qu'il classe en zone A la parcelle cadastrée à la section ZH sous n°235.

Par un jugem

ent n° 1603584 du 5 juin 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision implicite par laquelle le maire de Trainou a rejeté sa demande du 6 juillet 2016 tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme approuvé le 5 février 2015, à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle rejette sa demande d'abrogation du plan local d'urbanisme en ce qu'il classe en zone A la parcelle cadastrée à la section ZH sous n°235.

Par un jugement n° 1603584 du 5 juin 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 juillet 2018 et 12 février 2019, la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier, représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler la décision implicite du maire de Trainou rejetant sa demande tendant à l'abrogation du plan local d'urbanisme approuvé le 5 février 2015, à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle rejette sa demande d'abrogation du plan local d'urbanisme en ce qu'il classe en zone A la parcelle cadastrée à la section ZH sous le n°235 ;

3°) d'enjoindre à la commune de Trainou d'abroger le plan local d'urbanisme dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, d'enjoindre, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, à la commune d'abroger le plan local d'urbanisme en ce qu'il classe en zone A la parcelle cadastrée section ZH n°235 ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Trainou le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les modalités de la concertation définies dans la délibération du 23 février 2011 n'ont pas été respectées ;

- la délibération approuvant le plan local d'urbanisme méconnaît les articles L. 123-10 du code de l'urbanisme et R. 123-11 du code de l'environnement, en raison de l'insuffisance de la publicité relative à l'enquête publique, l'affichage n'ayant eu lieu que 13 jours avant le début de l'enquête publique et les affiches n'étant pas conformes aux dimensions fixées par l'arrêté du 24 avril 2012 ;

- le classement en zone A la parcelle cadastrée section ZH n°235 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; il contrevient au rapport de présentation et aux objectifs poursuivis par le projet d'aménagement et de développement durables (PADD).

Par des mémoires en défense enregistrés les 2 novembre 2018 et 1er mars 2019, la commune de Trainou, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 24 avril 2012 fixant les caractéristiques et dimensions de l'affichage de l'avis d'enquête publique mentionné à l'article R. 123-11 du code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 5 juin 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier tendant à l'annulation de la décision implicite du maire de Trainou refusant d'abroger le plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 5 février 2015, à titre subsidiaire, à l'annulation de cette décision en ce que le plan local d'urbanisme classe en zone A la parcelle cadastrée à la section ZH sous le n°235 dont elle est propriétaire. La société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 153-19 du code de l'urbanisme : " L'abrogation d'un plan local d'urbanisme est prononcée par l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou par le conseil municipal (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales, relatif à la convocation du conseil municipal : " Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si le conseil municipal est seul compétent pour abroger tout ou partie du plan local d'urbanisme de la commune, c'est au maire qu'il revient d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal. Par suite, le maire a compétence pour rejeter une demande tendant à l'abrogation d'un plan local d'urbanisme ou de certaines de ses dispositions. Toutefois, il ne peut légalement prendre une telle décision que si les dispositions dont l'abrogation est sollicitée sont elles-mêmes légales. Dans l'hypothèse inverse, en effet, il est tenu d'inscrire la question à l'ordre du jour du conseil municipal, pour permettre à celui-ci, seul compétent pour ce faire, de prononcer l'abrogation des dispositions illégales.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme : " L'illégalité pour vice de forme ou de procédure (...) d'un plan local d'urbanisme ne peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause. / Les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables à l'acte prescrivant l'élaboration ou la révision d'un document d'urbanisme ou créant une zone d'aménagement concerté. / Les deux alinéas précédents ne sont pas applicables lorsque le vice de forme concerne : /(...); / -soit la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l'enquête publique sur (...) les plans locaux d'urbanisme (...); / -soit l'absence du rapport de présentation ou des documents graphiques.".

5. En vertu d'un principe général, il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal. Ce principe trouve à s'appliquer, en l'absence même de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les dispositions d'un document d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité, sauf si cette illégalité résulte de vices de forme ou de procédure qui ne peuvent plus être invoqués par voie d'exception en vertu de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme.

6. La société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier soutient, d'une part, que la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme approuvé par délibération du 5 février 2015 du conseil municipal est entachée d'irrégularité au regard des dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme en ce que les modalités de la concertation définies dans la délibération du 23 février 2011 prescrivant la révision du plan n'ont pas été respectées, d'autre part, que la délibération du 5 février 2015 est entachée d'irrégularité au regard des dispositions des articles L. 123-10 du code de l'urbanisme et R. 123-11 du code de l'environnement, en raison de l'insuffisance de la publicité relative à l'enquête publique, l'affichage n'ayant eu lieu que 13 jours avant le début de l'enquête publique, qui s'est déroulée du 27 octobre au 28 novembre 2014, au lieu des 15 jours prescrits par ces dispositions, les affiches de format A4 et A3 n'étant pas conformes aux dimensions, correspondant au format A2, fixées par l'arrêté du 24 avril 2012 et l'affichage n'ayant pas été réalisé sur le parking Léon Pierrot. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point 5, et en tout état de cause, ces moyens tirés des insuffisances, à les supposer établies, dont seraient entachées la procédure de concertation et les modalités d'affichage de l'avis d'ouverture de l'enquête publique, soulevés au-delà du délai de six mois mentionné à l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme et qui ne portent pas sur des vices substantiels dont serait entachée la procédure d'enquête publique ou l'absence de rapport de présentation ou des documents graphiques, ne peuvent qu'être écartés.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. (...) ".

8. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

9. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation, que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu revenir sur les formes de développements urbains retenus par le précédent document d'urbanisme telles que " le développement linéaire le long des voies (liaison des hameaux de la Motte Moreau ...) " et " la dispersion au sein des espaces naturels et agricoles " qui ont conduit à la forme " étirée " de la commune. Ils ont souhaité réduire la consommation d'espace agricole et lutter contre l'étalement urbain en appliquant un " principe de compacité " autour du centre bourg dans le but de " privilégier le développement de nouveaux quartiers soit par la centralité soit au plus proche des zones urbaines existantes et de façon cohérente en termes de liaisons, afin de préserver les espaces naturels et agricoles qui façonnent (...) le territoire communal ". Ils ont, notamment, recensé des " poches vides ", comprises dans l'enveloppe urbaine du bourg, définies comme des secteurs d'urbanisation prioritaires à vocation d'habitat et ont créé une zone A dont l'objectif est, selon le rapport de présentation, " de préserver l'activité agricole et un parcellaire cohérent permettant l'exploitation des terres concernées ". Il ressort, également, des pièces du dossier que la parcelle cadastrée à la section ZH sous le n° 235, propriété de la société requérante, demeurée à l'état naturel, qui s'étend sur plus de 4 hectares, est située en dehors de l'enveloppe urbanisée du hameau de la Motte Moreau, à l'extrémité nord de la commune. Elle s'ouvre à l'ouest et, pour une grande partie, au sud, sur un vaste espace dépourvu de toute construction, à dominante agricole, dont elle fait partie intégrante et jouxte, au nord et à l'est, une zone caractérisée par une urbanisation dispersée le long des voies. Par suite, le classement, conforme aux principes rappelés ci-dessus du rapport de présentation, de cette parcelle qui, compte tenu de ses caractéristiques et de l'environnement dans lequel elle s'insère, ne peut être regardée comme " une dent creuse ", n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, alors même que la parcelle ne présenterait pas, ce qui n'est au demeurant pas établi, une valeur agronomique particulière. Enfin, ce classement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document d'urbanisme ont définis dans le PADD, notamment celui de " Modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain " qui vise à " Réduire la consommation effective d'espace pour répondre aux besoins d'urbanisation " en imposant " un principe de compacité pour la définition des nouvelles zones de développement ".

10. Il résulte de ce qui précède que la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Trainou, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier le versement à la commune de Trainou d'une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier est rejetée.

Article 2 : La société Crédit agricole Centre Loire aménagement foncier versera à la commune de Trainou une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Crédit agricole Centre Loire aménagement et à la commune de Trainou.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme A..., présidente-assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 novembre 2019.

Le rapporteur,

C. A...

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT02893


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02893
Date de la décision : 26/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : SELARL CASADEI-JUNG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-11-26;18nt02893 ?
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