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05/11/2019 | FRANCE | N°18NT01963

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 05 novembre 2019, 18NT01963


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA de la Greyette, devenue GAEC de la Greyette, et M. D... E... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2014 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a accordé à la société GSM le renouvellement et l'extension de son autorisation d'exploiter une carrière et ses installations accessoires au lieu-dit " La Métairie Neuve ", sur le territoire de la commune de Missillac.

Par un jugement n° 1505727 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a r

ejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoire...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCEA de la Greyette, devenue GAEC de la Greyette, et M. D... E... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2014 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a accordé à la société GSM le renouvellement et l'extension de son autorisation d'exploiter une carrière et ses installations accessoires au lieu-dit " La Métairie Neuve ", sur le territoire de la commune de Missillac.

Par un jugement n° 1505727 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 16 mai 2018, 13 mai 2019 et 14 juin 2019, le GAEC de la Greyette et M. D... E..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 16 mars 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier car il méconnaît les dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

- l'arrêté contesté est illégal dès lors qu'il méconnaît les dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ;

- l'étude d'impact est insuffisante ;

- le projet porte atteinte aux intérêts protégés par l'article

L. 511-1 du code de justice administrative ;

- il est fondé sur une modification illégale du plan local d'urbanisme (PLU) et méconnaît les anciennes dispositions du plan d'occupation des sols remises en vigueur ;

- il méconnaît les dispositions de l'article A2 du PLU.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 novembre 2018, la société GSM, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge du GAEC de la Greyette et de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant la GAEC de la Greyette et M. E..., et les observations de Me B..., substituant Me A..., représentant la société GSM.

Une note en délibéré présentée par la société GSM a été enregistrée le 17 octobre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. La société GSM dispose, depuis 1995, d'une autorisation d'exploiter une carrière au lieu-dit " La Métairie Neuve ", sur le territoire de la commune de Missillac (Loire-Atlantique). Elle a présenté auprès du préfet de la Loire-Atlantique un dossier de demande de renouvellement d'autorisation d'exploiter cette carrière, ainsi que d'extension du périmètre d'exploitation. Par arrêté du 12 novembre 2014, le préfet de la Loire-Atlantique a accordé à l'exploitant le renouvellement et l'extension de cette autorisation. Le GAEC de la Greyette et M. E... relèvent appel du jugement du 16 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : "La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".

3. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le mémoire de la société GSM enregistré au tribunal administratif de Nantes le 31 août 2017 aurait comporté des éléments nouveaux sur lesquels les premiers juges se seraient fondés dans leur jugement. Dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'irrégularité faute pour les premiers juges d'avoir communiqué ce mémoire doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'absence de maîtrise foncière de l'emprise de la carrière :

4. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement dans sa version applicable : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 8° Pour les carrières et les installations de stockage de déchets, un document attestant que le demandeur est le propriétaire du terrain ou a obtenu de celui-ci le droit de l'exploiter ou de l'utiliser. " Eu égard notamment aux obligations qui peuvent être imposées par le régime des installations classées au propriétaire du terrain en cas de dommages pour l'environnement, il incombe à l'autorité administrative, lorsque le demandeur n'est pas le propriétaire du terrain, non seulement de s'assurer de la production de l'autorisation donnée par le propriétaire exigée par le 8° du I de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, sans laquelle la demande d'autorisation ne peut être regardée comme complète, mais également de vérifier qu'elle n'est pas manifestement entachée d'irrégularité.

5. D'une part, il résulte de l'instruction que la société GMS a produit, à l'appui de son dossier de demande de renouvellement et d'extension d'autorisation, une attestation notariée souscrite par Me G..., notaire à Missillac, le 12 juin 2012, attestant que la société GSM avait obtenu des propriétaires des parcelles cadastrées section ZW n° 49, 50, 51 et 92 à 99 et ZT n° 151 des promesses de convention de foretage, et qu'elle avait également obtenu, de la part des différents propriétaires des parcelles cadastrées section ZT, n°s 50 à 66, des promesses de vente unilatérale desdites parcelles. Si ces promesses de vente devaient expirer le 19 septembre 2016 et alors même que la réalisation des ventes ainsi consenties n'est pas intervenue à la date à laquelle il est statué sur le présent recours, le document, joint à sa demande d'autorisation par la société GSM, était de nature à attester que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, les propriétaires des terrains en cause lui avaient donné le droit d'y exploiter une carrière. Enfin, il résulte de l'instruction que les parcelles ZT n°58 à 63 et 66 ont été exclues du périmètre d'exploitation par un arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 27 novembre 2017, modifié le 7 décembre 2017.

6. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que cette autorisation aurait été manifestement entachée d'irrégularité. La seule circonstance que certains des terrains faisaient l'objet de baux ruraux et que cette utilisation n'ait pas été indiquée sur les attestations notariales est sans influence sur la régularité des promesses de vente. Par ailleurs, les parcelles faisant l'objet de baux ruraux dont la résiliation fait l'objet d'un litige entre le preneur et le propriétaire ont été, comme il a été dit au point précédent, exclues, à la demande de la société GSM du périmètre de l'exploitation.

7. Ainsi, le GAEC de la Greyette et M. E... ne sont pas fondés à soutenir que la société GSM n'aurait pas justifié de la maîtrise foncière du terrain d'assiette de la carrière.

En ce qui concerne l'insuffisance de l'étude d'impact :

8. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

9. En premier lieu, les requérants soutiennent que l'étude d'impact indiquerait à tort p. 144 que l'exploitant aurait conclu des conventions avec les exploitants agricoles des parcelles concernées par le renouvellement de l'autorisation et l'extension de la carrière en vue d'organiser, avec ces exploitants, les conditions de mise en valeur des parcelles ainsi que les modalités de leur remise en état et de leur retour à leur vocation agricole. S'il n'est pas contesté qu'aucune convention de ce type n'a été signée avec le GAEC de la Greyette, il résulte toutefois de l'instruction que ce groupement n'est pas le seul exploitant agricole concerné par le projet, et que d'autres exploitants agricoles dont le GAEC de Rollieux et l'EARL des Peupliers, dont une partie des terres sont incluses dans le périmètre du projet, ont conclu de telles conventions avec la société GSM.

10. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que la stabulation la plus proche des limites du périmètre d'exploitation de la carrière, sise au lieu-dit Coëtquen, se situe à une distance de 260 mètres de la limite la plus proche de l'emprise du projet. Ainsi, l'étude d'impact qui mentionne l'absence de stabulation " dans un rayon proche de la carrière " ne peut être regardée comme entachée d'inexactitude ou d'insuffisance en concluant à l'absence de stabulation à une distance de la carrière telle qu'elle emporterait des conséquences directes sur le bon fonctionnement de l'exploitation agricole concernée.

11. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que l'étude d'impact, en ce qui concerne les mesures acoustiques réalisées à proximité de l'exploitation et les études relatives aux nuisances sonores susceptibles d'être provoquées par le renouvellement et l'extension de l'autorisation d'exploiter, est entachée d'une erreur tenant à l'inversion des points de mesure et de simulations, notés respectivement B 6 et B 7 et R 6 et R 7, et situés en principe au lieu-dit " Coëtquen " pour les points B6 et R 6 et au lieu-dit " La Chauvelière " pour les points B 7 et R 7. Les requérants soutiennent que cette inversion, qui ne permet pas de connaître les valeurs acoustiques exactes relevées dans l'un et l'autre de ces lieux-dits, a été de nature à fausser la qualité de l'information dispensée au public. Toutefois, cette erreur matérielle rectifiée dès la p. 68 de l'étude d'impact, porte sur une différence entre les niveaux sonores perçus entre les deux points qui ne dépasse pas 3 dB. Les niveaux d'émergence sonores actuels et prévus dans le cadre de la réalisation du projet sont identiques à l'un et l'autre des points de mesure intervertis. Dans ces conditions, et pour regrettable que soit cette erreur, elle n'a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ni exercé une influence sur la décision de l'autorité administrative.

12. En ce qui concerne la modélisation des niveaux de bruit, l'étude d'impact retient les émissions d'un poste d'extraction et des allers-retours de tombereaux en phase de production maximale soit 30 rotations par heure. Si les requérants soutiennent que le postulat selon lequel le nombre d'engins présents sur la carrière ne constitue pas un indicatif valable pour vérifier le respect des limites de bruit mentionné dans l'étude, celui-ci n'est pas utilement remis en cause par ceux-ci alors qu'il résulte de l'instruction que les niveaux de bruits ambiants mesurés en 2016 par le bureau d'étude Geoscop et présentés dans son rapport de février 2017 sont cohérents avec ceux estimés dans l'étude d'impact. Enfin, si les requérants allèguent qu'il y aurait des dépassements très importants au point B1, il résulte de l'instruction que ce point de mesure historique est situé à l'intérieur du site d'exploitation et est inoccupé.

13. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'étude d'impact comporte un développement sur le patrimoine agricole en pages 61 et 62 dans lesquelles sont reprises les données du dernier recensement agricole et analyse l'impact de la carrière sur les exploitations agricoles en pages 146 et 147. Il ne résulte pas de l'instruction que l'absence de mention de toutes les exploitations agricoles concernées directement ou indirectement par le projet et de leurs caractéristiques aurait été de nature à nuire à l'information du public ou à avoir une influence sur la décision du préfet. Enfin, l'effet bordure sur les exploitations agricoles voisines est étudié, l'étude relevant sans que cela ne soit utilement contesté, qu'aucune observation relative à l'épuisement de la réserve d'eau facilement utilisable pour les plantes n'a été observée autour de l'exploitation et prévoyant qu'un délaissé de terrain d'une largeur minimum de 10 mètres sera respecté le long des parcelles du projet.

14. En cinquième lieu, les requérants font grief à l'étude d'avoir omis de prendre en considération un fossé traversant le périmètre de l'extension de la carrière vers le ruisseau de la Chauvelière. Si les requérants produisent différents documents, photographies aériennes et plan faisant apparaître l'existence d'un trait qui pourrait caractériser un ruisseau, la société GSM soutient, en s'appuyant sur les archives de l'Institut national de l'information géographique et forestière et sur des attestations qu'il s'agit d'un ancien chemin. De plus, aucune donnée n'est référencée sur un cours d'eau à cet emplacement dans la base de données des cours d'eau du service d'administration nationale des données et référentiels sur l'eau (SANDRE). Au demeurant, l'omission de ce cours d'eau, compte tenu de sa taille, des doutes sur son existence et de l'absence d'éléments justifiant qu'il soit en eau n'a pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population ni été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative. De plus, il ne résulte pas de l'instruction que les mentions du plan de situation des fossés périphériques seraient erronées en ce qui concerne le sens de circulation de l'eau dans le fossé à créer à l'extrémité Nord-Ouest du périmètre d'extension de la carrière. Cette circonstance ne peut cependant être utilement invoquée dès lors que le périmètre de la carrière ne les inclut plus après les arrêtés préfectoraux des 27 novembre et 7 décembre 2017.

15. En sixième lieu, si l'étude ne mentionne pas les habitations attenantes à la ferme de Coëtquen, l'incidence d'une telle omission n'est pas établie alors que ces habitations sont situées en amont hydraulique, au-delà de la ligne de partage des eaux délimitant le bassin hydrographique auquel appartient la carrière litigieuse. Ensuite, si les requérants invoquent une erreur sur la localisation des piézomètres telle que figurée dans l'étude d'impact, l'arrêté attaqué a, en tout état de cause, prescrit l'installation d'un piézomètre en amont de la carrière et deux en aval, ainsi que le mentionne l'étude d'impact. Egalement, en ce qui concerne les chiffres obtenus pour l'analyse des puits, il n'est pas utilement contesté que le puits n° 17 n'a pas pu être analysé dès lors que son accès a été fermé jusqu'au 23 août 2017. Il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait été possible de localiser le puits n° 1 à la date de l'étude, ni que le puits n° 18 n'aurait pas été à sec à cette date. Si les battements des puits n° 10 et 17 en 2010 sont supérieurs à la moyenne, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir une incohérence dans les données recueillies dans l'étude d'impact.

16. Il résulte de ce qui précède que le GAEC de la Greyette et M. E... ne sont pas fondés à soutenir que les erreurs ou insuffisances entachant l'étude d'impact seraient de nature à justifier l'annulation de l'arrêté attaqué.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l'environnement :

17. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement: " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne (...) morale (...) privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ". Aux termes de l'article L. 512-1 du même code : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral. Le demandeur fournit une étude de dangers qui précise les risques auxquels l'installation peut exposer, directement ou indirectement, les intérêts visés à l'article L. 511-1 en cas d'accident, que la cause soit interne ou externe à l'installation (...) ".

18. Les requérants soutiennent que le préfet de la Loire-Atlantique, en délivrant à la société GMS l'arrêté contesté, aurait fait une appréciation inexacte des inconvénients que causera l'exploitation de la carrière sur l'agriculture, qui est au nombre des intérêts protégés par l'article L. 511-1 du code de l'environnement précité.

19. En premier lieu, contrairement à ce que soutiennent le GAEC de la Greyette et M. E..., l'étude d'impact comporte, en page 240, un plan de réaménagement du périmètre d'exploitation dans le cadre des opérations de remise en état du site. Ce plan permet d'identifier les parcelles qui seront rendues à leur vocation agricole en fin d'exploitation, la partie VII de l'étude d'impact décrivant, de manière précise, les conditions de remise en état des terres agricoles concernées par l'exploitation de la carrière. Ensuite, la description des différentes phases de mise en exploitation et de remise en état du périmètre du projet, figurant en pages 48 à 52 de l'étude d'impact, permet d'identifier la durée prévisionnelle de chacune des séquences d'exploitation et de remise en état prévues par la société GSM. En outre, si la carrière autorisée en 1994 et en 2007 n'a pas été entièrement remblayée, cette circonstance est relative à l'exécution des autorisations antérieures et n'est pas de nature à établir que la remise en état prévue ne serait pas possible. Enfin, s'il résulte de l'instruction que le remblaiement partiel conduit à une restitution à des altitudes moindres que celle du terrain naturel exploité compte tenu d'une difficulté à trouver des matériaux inertes pour le remblaiement, il n'est pas établi qu'une telle circonstance ferait obstacle à une remise en état en vue d'une exploitation agricole à l'issue de l'exploitation ni que la société GSM serait dans l'impossibilité de se fournir en matériaux extérieurs inertes pour pourvoir au remblaiement total de la carrière.

20. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les parcelles cadastrées section ZT, n°s 58, 59, 60, 61, 62, 63 et 66, actuellement exploitées par le GAEC de la Greyette, sont destinées à accueillir à l'issue des opérations de remise en état du site un plan d'eau et des prairies sèches reconstituées et ne pourront être rendues à l'agriculture. Les requérants soutiennent qu'aucune disposition n'a été mise en place pour compenser la perte de surface agricole ainsi causée, dans un contexte de rareté de terrains disponibles à proximité, présentant une valeur agronomique équivalente. Cependant, le préfet de la Loire-Atlantique ainsi que la société GSM font valoir, sans être contredits, que le GAEC de la Greyette n'a pas donné suite aux propositions de l'exploitant visant à fixer, d'un commun accord, les conditions de prise en charge des préjudices résultant de l'extension de la carrière.

21. En troisième lieu, les requérants soutiennent que les opérations d'extraction assècheraient la nappe phréatique et les terres agricoles, conduisant à diminuer le rendement de celles-ci. Si une baisse brutale du niveau du puits n° 17 a été observée en avril 2015 au début de l'exploitation de la carrière dans son périmètre d'extension autorisé par l'arrêté attaqué, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir un risque sur les nappes phréatiques situées dans le sol des terres agricoles exploitées aux alentours de la carrière, alors qu'il n'est pas utilement contesté que le niveau mesuré dans ce même puits en août 2017 est comparable aux niveaux qui y ont été mesurés en octobre 2011 et en septembre 2012 en période de sécheresse, le puits ayant été en outre complètement asséché en septembre 2005. De plus, les chiffres donnés par les requérants, sur la base des rendements agricoles envisagés par la SARL André Bernard sont insuffisamment certains pour être tenus pour probables. L'arrêté contesté ne peut, dans ces conditions, être regardé comme portant atteinte de manière grave et irrémédiable aux conditions d'exploitation de l'élevage de la société requérante et des exploitants agricoles installés aux alentours.

22. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que les caractéristiques de l'exploitation ne permettraient pas le rétablissement de la valeur initiale des parcelles présentant un intérêt agricole. Il résulte de l'instruction que les modalités de remise en état prévues par l'exploitant reposent sur les études menées par le Centre national du machinisme agricole du génie rural, des eaux et des forêts (CEMAGREF) en matière de remise en état de terres agricoles occupées par l'exploitation d'une carrière et aucun élément de l'instruction ne vient corroborer les affirmations des requérants concernant la perte de valeur des parcelles présentant un intérêt agricole.

23. En cinquième lieu, si les requérants soutiennent que l'arrêté contesté ne prendrait pas en compte l'incidence de l'exploitation de la carrière sur les stabulations situées à proximité, ils ne font état d'aucun élément de nature à caractériser la réalité et, le cas échéant, la nature des inconvénients qu'emporterait cette exploitation sur le fonctionnement de ces dernières.

24. En sixième lieu, le GAEC de la Greyette et M. E... n'établissent pas que l'extension de la carrière inclurait, comme ils le prétendent, des parcelles actuellement comprises dans un plan d'épandage. Ils n'établissent pas davantage que des parcelles limitrophes, incluses dans un tel plan, ne permettraient plus cet usage après la création d'un plan d'eau.

25. En septième lieu, l'augmentation du nombre de nuisibles qui résulterait, selon les requérants, de la reconstitution d'un couvert forestier et bocager dans les conditions prévues par l'arrêté attaqué au titre de la remise en état du site d'exploitation, n'est pas établie.

26. En huitième et dernier lieu, le GAEC de la Greyette soutient que la privation de l'usage des parcelles qu'elle exploite et qui sont comprises dans le périmètre d'extension de la carrière litigieuse entraînera pour elle une perte des droits à paiement de base versés au titre de la politique de soutien à la production agricole menée par l'Union européenne. A supposer une telle circonstance établie, l'exécution de l'arrêté contesté ne pourrait cependant être regardée de ce seul fait comme portant atteinte, en tant que telle, à l'agriculture, dès lors que, notamment, le GAEC ne démontre pas que les exploitants agricoles concernés ne pourraient poursuivre l'exploitation d'autres parcelles en compensation des terres agricoles dont ils seraient privés, ni que cette exploitation de terres nouvelles ne leur ouvrirait pas droit à la perception de droits à paiement de base.

27. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique, en délivrant l'arrêté contesté, aurait méconnu les dangers ou inconvénients que représentait l'exploitation de la carrière en cause pour l'un des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement précité.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la délibération du 27 novembre 2013 du conseil municipal de Missillac approuvant la révision du plan local d'urbanisme (PLU) :

28. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, applicable au présent litige: " Le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. (...) ". Aux termes de l'article R. 123-7 du même code : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. Les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées en zone A. (...)". L'article R. 123-11 du même code dispose que: " Les zones U, AU, A et N sont délimitées sur un ou plusieurs documents graphiques. Les documents graphiques du règlement font, en outre, apparaître s'il y a lieu : (...) c) Les secteurs protégés en raison de la richesse du sol ou du sous-sol, dans lesquels les constructions et installations nécessaires à la mise en valeur de ces ressources naturelles sont autorisées (...) ".

29. Les carrières d'extraction doivent être regardées comme des secteurs à protéger en raison de leur potentiel économique au sens des dispositions précitées de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme. Si de telles exploitations ne sont pas au nombre des occupations du sol autorisées en zone A par l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme, les dispositions générales de cet article ne font pas obstacle à l'application de celles de l'article R. 123-11 du code de l'urbanisme, qui permettent aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de délimiter, y compris à l'intérieur des zones A, des secteurs dans lesquels les constructions et les installations nécessaires à la mise en valeur des ressources du sol ou du sous-sol sont autorisées. En l'espèce, il est constant que le sous-sol des parcelles concernées par la modification du plan local d'urbanisme présentait une richesse de nature à justifier la protection du secteur et à y autoriser les constructions ou installations nécessaires à sa mise en valeur. La délibération contestée n'est, ainsi, entachée d'aucune erreur de droit au regard des dispositions combinées des articles R. 123-7 et R. 123-11 du code de l'urbanisme. Dès lors, le moyen, invoqué par la voie de l'exception, et tiré de l'illégalité de la délibération du conseil municipal de Missillac du 27 novembre 2013 et, par suite, de l'impossibilité d'autoriser le fonctionnement des industries extractives sur les parcelles situées dans le périmètre du projet au regard des dispositions applicables du plan local d'urbanisme de cette commune, doit être écarté.

30. En deuxième lieu, si l'orientation n°8 du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) est de " préserver les terres agricoles et les sites et sièges d'exploitation ", l'orientation n°6 de ce même document intitulée : " accompagner le développement de l'activité économique ", prévoit la mise en valeur du sol et du sous-sol. Dans ces conditions l'extension de la Métairie neuve pour l'exploitation de la carrière est compatible avec l'orientation n°8 du PADD.

31. En dernier lieu, compte-tenu de ce qui a été dit précédemment, le classement des parcelles litigieuses en zone Ac n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison, comme le soutiennent les requérants, de l'intérêt agricole particulier de ces parcelles.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article A2 du règlement du PLU :

32. Si l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Missillac pose comme condition générale que les constructions doivent être conçues pour s'intégrer au site dans lequel elles s'implantent et ne pas compromettre le caractère agricole de la zone, les prescriptions de l'arrêté attaqué relatives à la mise en place de merlons paysager et le rapport limité entre la surface d'exploitation autorisée et l'ensemble de la zone agricole sur le territoire de la commune permettent d'assurer le respect de ces dispositions par le projet litigieux.

33. Il résulte de ce qui précède que le GAEC de la Greyette et de M. E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, celui-ci a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

34. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement au GAEC de la Greyette et à M. E... de la somme que ceux-ci demandent à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ceux-ci le versement à la société GSM de la somme qu'elle sollicite au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du Gaec de la Greyette et de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société GSM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la GAEC de la Greyette, à M. E..., au ministre de la transition écologique et solidaire et à la Société GSM.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2019, où siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme Brisson, président-assesseur,

- M. C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2019.

Le rapporteur,

T. C...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18NT01963


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01963
Date de la décision : 05/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : HALGAND

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-11-05;18nt01963 ?
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