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11/10/2019 | FRANCE | N°18NT00314

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 11 octobre 2019, 18NT00314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 22 mai 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Calvados lui a retiré son agrément en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 1701175 du 24 novembre 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2018, Mme D... C..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler

le jugement n° 1701175 du 24 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 22 mai 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Calvados lui a retiré son agrément en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 1701175 du 24 novembre 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 janvier 2018, Mme D... C..., représentée par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1701175 du 24 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 22 mai 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Calvados lui a retiré son agrément en qualité d'assistante maternelle ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental du Calvados de lui accorder un agrément en qualité d'assistante maternelle ;

4°) de mettre à la charge du département du Calvados la somme de mille cinq cents euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la décision de retrait de son agrément d'assistante maternelle est entachée d'une erreur d'appréciation, et qu'elle est fondée sur des faits erronés ainsi que sur des faits extérieurs à son activité d'assistante maternelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2018, le département du Calvados, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de deux mille euros soit mise à la charge de Mme C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le moyen soulevé par Mme C... n'est pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le décret n° 2012-364 du 15 mars 2012 relatif au référentiel fixant les critères d'agrément des assistants maternels ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F..., première conseillère,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C..., titulaire, en dernier lieu, d'un agrément en qualité d'assistante maternelle valable entre mai 2015 et mai 2020, pour l'accueil de trois enfants de 0 à 12 ans, dont au moins un enfant qui marche, relève appel du jugement du 24 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mai 2017 par laquelle le président du conseil départemental du Calvados lui a retiré son agrément en qualité d'assistante maternelle.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. L'article L. 421-1 du code de l'action sociale et des familles dispose que : " L'assistant maternel est la personne qui, moyennant rémunération, accueille habituellement et de façon non permanente des mineurs à son domicile. / L'assistant maternel accueille des mineurs confiés par leurs parents, directement ou par l'intermédiaire d'un service d'accueil mentionné à l'article L. 2324-1 du code de la santé publique. Il exerce sa profession comme salarié de particuliers employeurs ou de personnes morales de droit public ou de personnes morales de droit privé dans les conditions prévues au chapitre III du présent livre, après avoir été agréé à cet effet ". Aux termes de l'article L. 421-3 du même code : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside./ Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) ". L'article L. 421-6 du même code dispose que : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) ". Aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit : / 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. A cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être.

4. Par ailleurs, le référentiel fixant les critères de l'agrément des assistants maternels par le président du conseil départemental, annexé au décret du 15 mars 2012 visé ci-dessus, prévoit, dans sa section I relative aux capacités et compétences pour l'exercice de la profession d'assistant maternel, qu'il " convient de prendre en compte : / 1° La capacité à appliquer les règles relatives à la sécurité de l'enfant accueilli, notamment les règles de couchage permettant la prévention de la mort subite du nourrisson ; / (...) 3° La capacité à appliquer les règles relatives à l'hygiène, notamment alimentaire, et à respecter les interdictions alimentaires signalées par les parents ; (...) ". Ce même référentiel prévoit, dans la sous-section 5 de cette section 1, relative à la connaissance du métier, du rôle et des responsabilités de l'assistant maternel, qu'il " convient de prendre en compte : (...) 3° La connaissance ou la capacité de s'approprier, dans le cadre des réunions d'information obligatoires et de la formation obligatoire ultérieure, les principales règles légales, réglementaires ou conventionnelles régissant la profession ; / 4° La compréhension et l'acceptation du rôle d'accompagnement, de contrôle et de suivi des services départementaux de protection maternelle et infantile ".

5. La décision du 22 mai 2017 portant retrait de l'agrément de Mme C... en qualité d'assistante maternelle est fondée, en premier lieu, sur la circonstance que l'intéressée n'a pas protégé des enfants alors que son époux avait un comportement agressif envers un travailleur social du département, en deuxième lieu, sur le fait que Mme C... ne présentait pas toutes les capacités et les compétences attendues pour l'exercice de sa profession, notamment quant aux règles de la sécurité du couchage des jeunes enfants et à l'hygiène alimentaire, en troisième lieu, sur l'insuffisante aptitude de l'intéressée à écouter et dialoguer avec les professionnels chargés d'assurer le contrôle, la surveillance et l'accompagnement des assistants maternels et enfin, sur l'absence de production de tableaux permettant de connaître la présence effective des enfants gardés par Mme C....

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport établi en janvier 2017 par deux infirmières puéricultrices qui ont rencontré Mme C... à son domicile les 8 et 20 décembre 2016, que l'intéressée a montré une attitude très fermée à l'égard des professionnelles du département, rendant les échanges difficiles, et a refusé de prendre en compte les remarques adressées par ces dernières. Il ressort également de ce même rapport que Mme C... a indiqué ne pas connaître les raisons de la nécessité de coucher un très jeune enfant sur le dos, et accepter de coucher un enfant sur le ventre ou sur le côté si les parents le lui demandent, alors que le respect des règles de couchage des bébés sur le dos, pour prévenir la mort subite inexpliquée du nourrisson, s'impose en application du référentiel précité et est rappelé dans le guide mis à disposition des assistants maternels par le département du Calvados. Au cours de ce même entretien, l'intéressée n'a pas envisagé le risque d'étouffement d'un enfant dormant dans une couette, montrant une méconnaissance des règles de sécurité. Il ressort également des conclusions de ce rapport établi en janvier 2017 que Mme C... n'a aucunement accepté de remettre en cause ses pratiques professionnelles ou de coopérer avec les infirmières puéricultrices qui l'interrogeaient, notamment, sur sa pratique, de nature à favoriser le " grignotage ", de donner des gâteaux à plusieurs reprises dans la journée à un enfant.

7. En outre, il ressort des pièces du dossier, notamment du compte-rendu d'agression dressé par une assistante du service social du département le 2 novembre 2016, que le 13 septembre 2016, dans le cadre d'un entretien relatif au fils de Mme et M. C..., ce dernier s'est violemment emporté contre l'assistante sociale, lui adressant des insultes, l'impressionnant physiquement et, finalement, la mettant à la porte de leur domicile. Dans leur rapport de janvier 2017, les infirmières puéricultrices relèvent qu'un ou des enfants accueillis par Mme C... étaient présents. L'appelante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'existence des propos tenus par son époux ou son attitude. En outre, si elle conteste qu'un enfant ait pu être présent lors de l'incident dès lors qu'elle aurait été en congé, elle a indiqué aux infirmières puéricultrices qui l'ont rencontrée à son domicile les 8 et 20 décembre 2016 qu'elle avait l'habitude de garder des enfants pendant ses congés et elle a finalement reconnu qu'un ou des enfants étaient peut-être présents. L'erreur de fait invoquée n'apparaît donc pas établie. L'assistante sociale du service départemental en charge du fils de M. et Mme C... a confirmé l'incident du 13 septembre 2016 et la présence d'une petite fille, ainsi que l'absence de réaction de Mme C... pour préserver l'enfant. L'assistante sociale a également rapporté un incident similaire, intervenu le 22 juillet 2016, au cours duquel, en présence d'enfants gardés par son épouse, M. C... a rapporté des propos extrêmement grossiers de son fils sans que madame n'ait une réaction pour calmer son époux et préserver les enfants présents. La circonstance que l'un de ces enfants était gardé à titre gracieux par Mme C... n'est pas de nature à justifier l'abstention de cette dernière à préserver les enfants de l'attitude agressive ou grossière de son époux.

8. Dans ces conditions, et alors même que Mme C... justifie de la confiance de certains parents employeurs, le président du conseil départemental du Calvados a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, considérer que les conditions d'accueil en matière de sécurité, de santé et d'épanouissement des enfants n'étaient plus remplies.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais du litige :

10. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département du Calvados, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

11. En second lieu, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... la somme que le département du Calvados demande en application de ces mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département du Calvados tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au département du Calvados.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme F..., première conseillère.

Lu en audience publique le 11 octobre 2019.

La rapporteure,

M. F...Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°18NT00314 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT00314
Date de la décision : 11/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : SELARL JURIADIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-10-11;18nt00314 ?
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