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04/10/2019 | FRANCE | N°19NT01357

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 04 octobre 2019, 19NT01357


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Dacca rejetant la demande de visa de long séjour présentée par Mme D... et la jeune F... A....

Par un jugement n° 1808817 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 avril 2019 et le 15...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises à Dacca rejetant la demande de visa de long séjour présentée par Mme D... et la jeune F... A....

Par un jugement n° 1808817 du 7 février 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 5 avril 2019 et le 15 juillet 2019, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 février 2019 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen des demandes de visa, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est intervenu au terme d'une procédure méconnaissant le principe du contradictoire et le principe de loyauté des débats ;

- alors que le ministre n'a pas sollicité de substitution de motifs, le tribunal s'est fondé, pour rejeter sa demande, sur un motif différent de ceux ayant fondé la décision consulaire ;

- ce motif, tenant à l'absence d'intérêt justifiant un regroupement familial partiel, ne pouvait légalement justifier les refus de visa contestés dès lors que l'administration avait considéré que le lien de filiation avec ses deux premiers enfants, dont l'aîné est au surplus majeur, n'était pas établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2019, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de l'absence de communication de la décision implicite de rejet contestée est inopérant ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me E... représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... relève appel du jugement du 7 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant implicitement le recours formé contre la décision de refus de visa opposé par les autorités consulaires françaises à Dacca à Mme D... et à la jeune F... A... qu'il présente comme son épouse et leur fille.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En vertu de l'article L. 5 du code de justice administrative, l'instruction des affaires est contradictoire. Aux termes de l'article R. 613-3 de ce code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication, sauf réouverture de l'instruction. ". L'article R. 613-4 du même code dispose : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision (...) notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. / (...) ". Enfin, l'article R. 613-2 prévoit qu'en l'absence d'ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience.

3. D'une part, il ressort du dossier de la procédure que, par une ordonnance du 18 décembre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée, devant le tribunal, au 7 janvier 2019 à douze heures. Postérieurement à la clôture, un premier mémoire en défense présenté par le ministre de l'intérieur a été enregistré le lundi 7 janvier 2019 à dix-sept heures et dix minutes. Ce mémoire a été communiqué le lendemain au conseil du M. A... qui en a accusé réception le mercredi 9 janvier 2019. En ayant procédé à la communication de ce mémoire en défense, le tribunal doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction. Ainsi, en l'absence d'une nouvelle ordonnance fixant la clôture de l'instruction, celle-ci est intervenue, en vertu de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, trois jours francs avant l'audience qui s'est tenue le 17 janvier 2019, soit le dimanche 13 janvier à minuit.

4. D'autre part, alors que la décision consulaire portant refus de visas est exclusivement fondée sur le caractère frauduleux des documents et déclarations appuyant les demandes, le ministre a fait valoir, dans son mémoire en défense du 7 janvier 2019, sans d'ailleurs apporter le moindre élément de nature à démontrer qu'il s'agirait du motif sur lequel se serait fondée la commission de recours ni même solliciter une substitution de motifs, que M. A... avait deux autres enfants et que les refus de visa étaient légalement justifiés au regard de l'article L. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit que le regroupement familial partiel ne peut être accepté qu'à titre exceptionnel dans l'intérêt des enfants. Pour rejeter la demande de M. A..., le tribunal s'est fondé, après avoir relevé que celui-ci n'établissait pas que, en 2012, les demandes de visa présentées pour ses deux premiers enfants avaient été refusées par l'administration française au motif que le lien de filiation n'était pas avéré, sur l'absence d'intérêt pour les enfants justifiant le recours à une réunification familiale partielle.

5. En fondant sa décision sur ces éléments nouveaux, portés pour la première fois à la connaissance du conseil du requérant le 9 janvier 2019, lequel n'a pas disposé, quand bien même il a produit un mémoire le 10 janvier 2019, d'un délai lui permettant d'en discuter utilement la pertinence, le tribunal a méconnu le caractère contradictoire de la procédure et entaché son jugement d'irrégularité.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que le jugement attaqué doit être annulé. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer M. A... devant le tribunal administratif de Nantes pour qu'il soit à nouveau statué sur sa demande.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros.

D E C I D E:

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 février 2019 est annulé.

Article 2 : M. A... est renvoyé devant le tribunal administratif de Nantes pour qu'il soit statué sur sa demande.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pérez, président de chambre,

Mme Brisson, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 octobre 2019.

Le rapporteur,

K. C...

Le président,

A. PEREZLe greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT01357


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01357
Date de la décision : 04/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : CABINET TAITHE PANASSAC ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-10-04;19nt01357 ?
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