Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... A... épouse C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 28 février 2018 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1801928 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 mars 2018, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 4 décembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 28 février 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à défaut de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer dans l'intervalle une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration aurait dû être saisi ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait, la communauté de vie n'était pas rompue au moment de l'arrêté ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit, elle remplit les conditions du 3° de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision méconnaît l'accord franco-malien et l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination :
- ces décisions méconnaissent le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elles sont privées de base légale dès lors que le refus de titre de séjour est illégal ;
- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 juin 209, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête..
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 février 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes, signée à Bamako le 26 septembre 1994 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... épouse C..., ressortissante malienne née le 25 décembre 1973, est entrée en France le 16 juin 2010 munie d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Elle a bénéficié d'un titre de séjour à raison de son état de santé du 10 septembre 2012 au 9 septembre 2013 puis d'un titre de séjour en raison de son mariage avec un ressortissant français à partir du 29 octobre 2014 régulièrement renouvelé jusqu'au 28 octobre 2017. Faisant valoir son mariage en 2014 avec un ressortissant français, Mme A... épouse C... a présenté une demande de délivrance d'une carte de résident. Par l'arrêté contesté du 28 février 2018, le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Mme C... relève appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ".
3. En ce qui concerne les ressortissants maliens, l'article 15 de la convention du 26 septembre 1994 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Mali sur la circulation et le séjour des personnes visée ci-dessus stipule que : " Les points non traités par la convention en matière d'entrée et de séjour des étrangers sont régis par la législation de l'Etat d'accueil. ".
4. Aux termes des stipulations de l'article 11 de la convention franco-malienne du 26 septembre 1994 : " Après trois années de résidence régulière et non interrompue, les nationaux de chacune des Parties contractantes établis sur le territoire de l'autre Partie, peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans, dans les conditions prévues par la législation de l'Etat d'accueil (...) ".
5. Mme C..., de nationalité malienne, et dont les conditions de séjour en France sont régies par la convention franco-malienne et par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a sollicité une carte de résident auprès de la préfecture du Loiret. Il ressort de la lecture de la décision contestée que celle-ci ne mentionne ni dans ses visas, ni dans ses motifs, l'existence de cette norme dont les dispositions sont applicables à la situation de Mme C... alors, de plus, que si l'article 11 de la convention précitée ne prévoit pas la délivrance automatique d'un titre de séjour aux personnes résidant sur le territoire de l'autre partie depuis plus de trois ans mais renvoie à la législation de l'Etat d'accueil, la condition de durée mentionnée par cette stipulation est inférieure à celle prévue de cinq ans par l'article L. 314-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet du Loiret a entaché sa décision d'un défaut de motivation en droit.
6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait et de droit, que le préfet du Loiret réexamine la situation de Mme C..., en particulier au regard des stipulations de la convention franco-malienne. Il y a lieu d'adresser au préfet du Loiret une injonction en ce sens et de lui accorder, pour ce faire, un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
8. Mme C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 4 décembre 2018 et l'arrêté du préfet du Loiret du 28 février 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Loiret de statuer à nouveau sur la demande de carte de résident de dix ans de Mme C... dans le délai d'un mois à compter de la date de la notification du présent arrêt sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait et de droit.
Article 3 : L'Etat versera à Me D... la somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera adressée au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019, où siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 octobre 2019.
Le rapporteur,
T. B...Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19NT01004