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04/10/2019 | FRANCE | N°18NT02888

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 04 octobre 2019, 18NT02888


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du jury du diplôme de mécatronique, délivré par l'université de Rennes 1 et l'Ecole normale supérieure de Rennes, du 11 juillet 2016, par laquelle celui-ci lui a refusé la validation de ce diplôme au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1603448 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27

juillet 2018 et 22 février 2019, Mme D... A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du jury du diplôme de mécatronique, délivré par l'université de Rennes 1 et l'Ecole normale supérieure de Rennes, du 11 juillet 2016, par laquelle celui-ci lui a refusé la validation de ce diplôme au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1603448 du 29 mai 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 juillet 2018 et 22 février 2019, Mme D... A..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 mai 2018 ;

2°) d'annuler la délibération du 11 juillet 2016 ;

3°) d'enjoindre à l'Ecole normale supérieure de Rennes de lui délivrer le diplôme de magistère mécatronique ;

4°) de mettre à la charge de l'Ecole normale supérieure de Rennes une somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il appartiendra à l'ENS Bretagne de justifier de la régularité de la nomination des membres du jury, et de la composition et de la tenue régulière du jury ;

- elle a obtenu un diplôme de master ;

- l'ENS avait initialement validé la formation qu'elle avait choisie ;

- un stage en laboratoire n'était pas obligatoire et en tout état de cause, elle a effectué un stage de cinq mois en 2015 dans un bureau d'études ;

- elle peut prétendre à l'obtention de ce diplôme au titre de la validation des acquis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2018, l'Ecole normale supérieure de Rennes, représentée par le cabinet Coudray, demande à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de l'illégalité externe de la délibération est irrecevable dès lors qu'aucun moyen relevant de la même cause juridique n'avait été soulevé en première instance ;

- aucun des autres moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- l'arrêté du 22 janvier 2014 fixant le cadre national des formations conduisant à la délivrance des diplômes nationaux de licence, de licence professionnelle et de master ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me F... substituant Me C..., représentant Mme A..., et de Me B..., pour l'Ecole normale supérieure de Rennes.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été inscrite en qualité d'étudiante au sein de l'Ecole normale supérieure (ENS) de Rennes à compter de la rentrée 2011 afin d'y suivre un magistère de mécatronique. Elle a effectué les deux premières années de ce magistère et validé l'ensemble des examens. Elle a mené la troisième et dernière année du magistère à l'Ecole nationale supérieure d'ingénieurs de constructions aéronautiques (ENSICA). A la suite du constat d'une divergence d'interprétation entre le service d'orientation de l'Ecole normale supérieure et elle-même, s'agissant des modalités d'accomplissement de la troisième année de magistère, Mme A... a sollicité, par courrier du 31 octobre 2015, la délivrance à titre dérogatoire du diplôme du magistère mécatronique, par validation des acquis personnels de la formation d'ingénieur suivie à l'ENSICA et du diplôme d'ingénieur obtenu le 28 novembre 2015, par équivalence avec le grade de master 2. Après étude du dossier, le jury du diplôme de magistère de mécatronique au titre de l'année 2015 a, le 11 juillet 2016, décidé de ne pas faire droit à la demande de Mme A... au motif que la formation d'ingénieur suivie ne pouvait être admise en équivalence des modalités de contrôle de connaissance exigées pour l'obtention du diplôme du magistère de mécatronique. Mme A... a demandé l'annulation de la délibération du 11 juillet 2016 du jury du diplôme de mécatronique de l'université de Rennes 1 et de l'Ecole normale supérieure de Rennes, par laquelle celui-ci lui a refusé la validation de ce diplôme au titre de l'année 2015. Le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande par un jugement du 29 mai 2018. Mme A... fait appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Rennes, Mme A... n'a soulevé que des moyens relatifs à la légalité interne de la délibération du 11 juillet 2016. Si, dans sa requête d'appel, elle invoque un nouveau moyen tiré de ce qu'il appartiendra à l'ENS Bretagne de justifier de la régularité de la nomination des membres du jury et de la composition et de la tenue régulière du jury, ce moyen, qui n'est pas d'ordre public et se rattache à une cause juridique distincte de celle dont relevaient les moyens soulevés en première instance, est par suite irrecevable, comme le fait valoir en défense l'Ecole normale supérieure de Rennes.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article D. 612-34 du code de l'éducation, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le grade de master est conféré de plein droit aux titulaires : 1° D'un diplôme de master ; (...) 3° D'un diplôme d'ingénieur délivré par un établissement habilité en application de l'article L. 642-1 ; (...) ". Aux termes de l'article 16 de l'arrêté du 22 janvier 2014 susvisé relatif aux dispositions spécifiques pour le diplôme national de master : " (...) La formation conduisant au diplôme national de master comprend des enseignements théoriques, méthodologiques et appliqués et une ou plusieurs expériences en milieu professionnel, notamment sous la forme de stages au sens de l'article L. 612-8 du code de l'éducation. Les modalités d'encadrement, de suivi et d'évaluation de chaque période d'expérience en milieu professionnel sont définies au regard des objectifs de la formation. La formation comprend obligatoirement une initiation à la recherche et, notamment, la rédaction d'un mémoire ou d'autres travaux d'études personnels. (...). ". Aux termes de l'article 47 du règlement intérieur de l'Ecole normale supérieure de Rennes : " La qualité d'étudiant de l'ENS Rennes est accordée aux élèves inscrits à une formation spécifique de l'Ecole donnant lieu à la délivrance d'un master, d'un magistère ou d'un doctorat. Ils conçoivent leur programme d'études en concertation avec le directeur du département d'enseignement concerné (...) " et aux termes de l'article 49 du même règlement : " Pour chaque département, le cursus type d'études fait l'objet d'une proposition établie par le directeur du département, après consultation du conseil du département. Cette proposition est examinée par le conseil scientifique. Le président arrête ensuite le programme d'études définitif du département (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le diplôme de magistère mécatronique est un diplôme propre à l'Ecole normale supérieure de Rennes, laquelle est associée à l'université de Rennes-1 pour sa mise en oeuvre. Dans ce cadre, le document de l'université de Rennes 1 pour l'année universitaire 2014-2015, intitulé " modalités de contrôle des connaissances ", mentionne que la troisième année de magistère mécatronique s'effectue par la validation d'un master de 2ème année, approuvé par le responsable de formation.

5. De manière constante, il a été indiqué à Mme A... par l'ENS qu'elle devait faire un master 2 pour valider son diplôme de magistère mécatronique. Il est vrai qu'il lui a été indiqué qu'elle pouvait effectuer ce master 2 (M2) dans une école d'ingénieurs mais cela ne signifiait pas, contrairement à ce qu'elle en avait déduit, qu'une dernière année dans une école d'ingénieurs équivalait à un M2, dès lors qu'il est possible d'effectuer un M2 parallèlement à une dernière année d'école d'ingénieurs. Mme A... reconnaît elle-même avoir compris qu'un M2 était nécessaire, à la fin de l'année 2013-2014. Pour cette raison, elle s'est inscrite, parallèlement à sa dernière année d'école d'ingénieurs (ENSICA), en master recherche " mécanique des fluides " à l'université de Toulouse. Toutefois, il est constant qu'elle n'a pas obtenu ce master recherche, dès lors qu'elle n'a pas effectué de stage de fin d'études dans le milieu de la recherche, estimant que cela ne correspondait pas à ses souhaits professionnels. La circonstance qu'elle ait obtenu un diplôme d'une école d'ingénieurs conférant le grade de master ne saurait la faire regarder comme remplissant la condition, prévue dans les modalités de contrôle des connaissances, de validation d'un master de 2ème année. Comme le fait valoir l'ENS, le diplôme de master, diplôme national, n'est pas équivalent à un diplôme d'ingénieur, conférant le grade de master, diplôme d'établissement reconnu professionnellement. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la formation en école d'ingénieurs suivie par Mme A... comprenait une initiation à la recherche équivalente à celle d'une formation en master. Enfin, Mme A... n'établit ni même n'allègue qu'elle n'aurait pas eu la possibilité de suivre un master 2 professionnel dispensé par un établissement universitaire parallèlement à son école d'ingénieurs. Dès lors, elle ne remplissait pas les conditions fixées pour obtenir le diplôme de magistère mécatronique.

6. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 613-5 du code de l'éducation : " Les études, les expériences professionnelles, les acquis personnels peuvent être validés, dans des conditions définies par décret, en vue de l'accès aux différents niveaux de l'enseignement supérieur. Les établissements d'enseignement supérieur mettent en oeuvre un enseignement modulaire capitalisable. ".

7. Comme il a été dit au point 5, il ne ressort pas des pièces du dossier que la formation en école d'ingénieurs suivie par Mme A... comprenait une initiation à la recherche équivalente à celle d'une formation en master, alors même que sa formation aurait été plus intensive et qu'après avoir effectué un stage d'application de cinq mois en entreprise, elle a dû rédiger un rapport de stage qui a donné lieu à une soutenance. Dès lors, le jury du diplôme de magistère de mécatronique de l'Ecole normale supérieure de Rennes n'a pas fait une appréciation manifestement erronée de la situation de l'intéressée en refusant de lui délivrer le diplôme sollicité au titre de la validation des acquis.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. L'Ecole normale supérieure de Rennes n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à sa charge la somme demandée par Mme A... à ce titre. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée par l'Ecole normale supérieure de Rennes à ce titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Ecole normale supérieure de Rennes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., à l'Ecole normale supérieure de Rennes et à l'Université de Rennes 1.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- Mme Buffet, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 octobre 2019.

Le rapporteur,

P. E...

Le président,

T. CELERIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT02888


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT02888
Date de la décision : 04/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : CABINET COUDRAY CONSEIL et CONTENTIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-10-04;18nt02888 ?
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