Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 17 décembre 2018 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1900108 du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 avril 2019, M. A..., représenté par Me Cavelier, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur de droit dans la mesure où le préfet a examiné sa demande comme une demande de renouvellement d'un titre de séjour en tant que commerçant dès lors que précédemment il était titulaire d'un titre de séjour en tant que salarié ; le préfet ne pouvait pas vérifier le caractère effectif de l'activité commerciale dès lors qu'il s'agissait d'une première demande en tant que commerçant ; cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que les ressources issues de son activité commerciale lui permettaient de subvenir à ses besoins ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2019, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991et le décret du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Geffray.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien, né le 23 juin 1989, entré régulièrement en France le 15 septembre 2012 pour y poursuivre des études, a séjourné sur le territoire français sous couvert d'un certificat de résidence portant la mention " étudiant " qui a été régulièrement renouvelé jusqu'au 9 janvier 2016, puis en qualité de " salarié " valable du 5 janvier 2017 au 1er janvier 2018. Le 5 décembre 2017, il a sollicité auprès du préfet du Calvados le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 17 décembre 2018, le préfet a refusé de délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du 28 mars 2019, le tribunal a rejeté sa demande. M. A... relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens s'établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification, selon le cas, qu'ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis ". Aux termes du c) de l'article 7 du même accord : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ".
3. Il ressort des dispositions du c) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié que le démarrage de l'activité professionnelle en vue de laquelle un ressortissant algérien sollicite la délivrance d'un certificat de résidence portant la mention " commerçant " est subordonné à la délivrance préalable de ce certificat. Dès lors, s'il appartient à l'administration, dans le cadre de l'instruction d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour en qualité de commerçant, de vérifier le caractère effectif de l'activité commerciale dont se prévaut l'intéressé, elle ne peut en revanche procéder à une telle vérification dans le cas d'une première demande.
4. Il ressort des pièces du dossier que compte tenu de ce que M. A... a été titulaire d'un certificat de résidence en tant que salarié du 5 janvier 2017 au 1er janvier 2018, la demande présentée par l'intéressé le 5 décembre 2017 doit être regardée non comme un renouvellement d'un titre de séjour portant la mention " commerçant " mais comme une première demande même si le préfet du Calvados a précisé dans son arrêté que le certificat de résidence en tant que salarié a été délivré à l'intéressé par erreur. Dès lors, le préfet a commis une erreur de droit en refusant à M. A... la délivrance du titre de séjour sollicité au motif que la réalité de son activité commerciale n'était pas effectivement démontrée.
5. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
6. Eu égard au motif d'annulation prononcée, l'exécution du présent arrêt implique seulement que le préfet du Calvados réexamine la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de cet examen. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
7. Il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à Me Cavelier, conseil de M. A..., d'une somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
DÉCIDE :
Article 1er: Le jugement du tribunal administratif de Caen du 28 mars 2019 et l'arrêté du préfet du Calvados du 17 décembre 2018 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Calvados de procéder à un nouvel examen de la demande de M. A..., après l'avoir muni d'une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de cet examen, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Cavelier la somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 29 août 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 septembre 2019.
Le rapporteur,
J.-E. GeffrayLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT01590