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21/06/2019 | FRANCE | N°19NT00384

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 21 juin 2019, 19NT00384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes de prescrire une expertise afin de déterminer l'étendue des préjudices résultant de l'aggravation des séquelles osseuses conservées à la suite d'un accident survenu en 1972 et de l'infection nosocomiale alors contractée à l'occasion de sa prise en charge par le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, et de condamner cet établissement, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative,

à lui verser une provision d'un montant de 8 000 euros.

Par une ordonnance ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes de prescrire une expertise afin de déterminer l'étendue des préjudices résultant de l'aggravation des séquelles osseuses conservées à la suite d'un accident survenu en 1972 et de l'infection nosocomiale alors contractée à l'occasion de sa prise en charge par le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, et de condamner cet établissement, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à lui verser une provision d'un montant de 8 000 euros.

Par une ordonnance n° 1809404 du 15 janvier 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a partiellement fait droit à sa demande en ordonnant l'expertise demandée et en condamnant le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte à lui verser une provision de 4 000 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 janvier 2019 le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, représenté par MeC..., demande à la cour d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle l'a condamné à verser à M. B...une provision de 4 000 euros.

Il soutient que :

- la demande de M. B...se heurte à une contestation sérieuse dès lors qu'il existe un débat, qu'il n'appartient pas au juge des référés de trancher, sur le point de savoir si la prescription décennale prévue par la loi du 4 mars 2002, qui a couru à compter de la consolidation de l'aggravation de l'état de l'intéressé, fixée au 19 mai 2003, était acquise lorsque celui-ci lui a adressé, le 19 juin 2018, une réclamation préalable ;

- il existe une incertitude sur l'origine de l'aggravation dont M. B...demande réparation qui, à la lecture de l'expertise du 5 août 2008, peut être attribuée à l'accident subi par l'intéressé et non à l'infection nosocomiale ; du fait de cette incertitude, qui a justifié qu'une nouvelle expertise soit ordonnée, la créance dont se prévaut M. B...est sérieusement contestable.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 février 2019 M. A...B..., représenté par MeE..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'élargir la mission confiée à l'expert afin de lui permettre de prendre en compte toute nouvelle aggravation de son état survenue depuis le dépôt du rapport d'expertise du 5 aout 2008 et de porter à 8 000 euros le montant de la provision que le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte a été condamné à lui verser ;

3°) de mettre les frais inhérents à la nouvelle expertise à la charge du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les moyens invoqués par le centre hospitalier ne sont pas fondés ;

- les souffrances et le déficit fonctionnel temporaire qu'il a subis du fait des deux interventions chirurgicales rendues nécessaires par l'aggravation de son état justifient le versement d'une provision de 8 000 euros ;

- pour pouvoir régler complètement le litige, il y a lieu d'élargir la mission confiée à l'expert en lui demandant de prendre en compte toute aggravation qui serait éventuellement survenue depuis la dernière expertise.

Par un courrier enregistré le 21 février 2019 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales informe la cour de ce que, n'étant pas mis en cause dans le litige, il n'interviendra pas à l'instance.

La requête a été communiquée à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants qui n'a pas produit de mémoire.

Par ordonnance du 5 février 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 10 avril 2019.

Un mémoire présenté pour le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte a été enregistrée le 18 avril 2019, soit postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Bris,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., alors âgé de 19 ans, a été victime d'un accident de la route le 23 avril 1972 et a été pris en charge par le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, en particulier pour une fracture fermée de la diaphyse fémorale gauche. Il a contracté à cette occasion une infection nosocomiale et a dû subir de nombreuses interventions chirurgicales ainsi que plusieurs antibiothérapies. Au 31 décembre 1977 il a été considéré comme définitivement guéri de cette infection et sa fracture était consolidée, avec toutefois la persistance d'une déviation de l'axe du fémur qui a nécessité deux nouvelles interventions chirurgicales, réalisées en 2001 et 2002. Le 7 novembre 2007, M. B...a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nantes d'une demande d'expertise. Un chirurgien orthopédiste a été désigné et s'est adjoint un sapiteur infectiologue. Leur rapport, déposé le 5 août 2008, a conclu à l'absence de faute commise par le centre hospitalier, la survenance de l'infection relevant d'un " aléa thérapeutique sans faute " et ayant été traitée dans les règles de l'art. Par un courrier du 19 juin 2018, M. B... a demandé au centre hospitalier de Fontenay-le-Comte de l'indemniser du préjudice résultant des interventions chirurgicales qu'il avait subies en 2001 et 2002, qu'il impute à une aggravation de son état en lien avec l'infection nosocomiale contractée en 1972. En l'absence de réponse, il a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes d'ordonner une nouvelle expertise afin de déterminer l'étendue des préjudices dont il demande réparation et de condamner le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte à lui verser une provision de 8 000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices. Par une ordonnance du 15 janvier 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a partiellement fait droit à sa demande en ordonnant l'expertise demandée et en condamnant le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte à lui verser une provision de 4 000 euros. L'établissement hospitalier relève appel de l'ordonnance du 15 janvier 2009 en tant que le juge des référés du tribunal administratif de Nantes l'a condamné à verser à M. B... la somme provisionnelle de 4 000 euros. Par la voie de l'appel incident, M. B...demande la réformation de cette ordonnance en tant qu'elle n'a que partiellement fait droit à sa demande de provision et demande également que la mission confiée à l'expert soit étendue aux préjudices qui auraient pu survenir postérieurement au 5 août 2008.

Sur la provision :

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable (...) ".

3. Avant de statuer sur la demande de provision formulée par M.B..., le juge des référés a, par l'ordonnance attaquée, longuement examiné l'exception de prescription opposée par le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, pour en déduire que la prescription n'était acquise que pour une partie des préjudices subis par l'intéressé. Ce faisant, il a statué, au fond, sur une question qui révélait, par sa complexité même, qu'elle ne relevait pas de l'évidence et que l'obligation de l'établissement hospitalier n'était pas non sérieusement contestable.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que le centre hospitalier de Fontenay-le-Comte est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a estimé que la créance dont se prévalait M. B...n'était pas sérieusement contestable et a mis à sa charge le versement à ce dernier d'une provision de 4 000 euros à valoir sur l'indemnisation des préjudices qu'il invoquait. Il y a lieu, par suite, d'annuler l'article 8 de cette ordonnance du 15 janvier 2019 et de rejeter en totalité la demande de provision présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nantes et devant la cour.

Sur l'étendue de la mission d'expertise :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction ". Une mesure d'expertise ne peut être prescrite en vertu de ces dispositions qu'à la condition qu'elle soit utile.

6. M. B...demande que la mission confiée à l'expert par l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nantes du 15 janvier 2019 soit étendue aux préjudices qui auraient pu survenir après le dépôt du premier rapport d'expertise judiciaire le 5 août 2008. Toutefois, il n'établit pas, ni même n'allègue, la réalité de l'apparition de tels préjudices, alors que son état a été considéré comme définitivement consolidé au 19 mai 2003. Dans ces conditions, une telle extension de la mesure d'expertise n'est pas utile à la résolution de litige et il n'y a pas lieu, par suite, de faire droit à la demande de l'intéressé.

Sur les frais de l'instance :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, à la charge du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte les frais inhérents à la nouvelle expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Nantes.

8. Enfin les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L'article 8 de l'ordonnance n°1809404 du juge des référés du tribunal administratif de Nantes du 15 janvier 2019 est annulé.

Article 2 : La demande de provision présentée par M. B...devant le juge des référés du tribunal administratif de Nantes et les conclusions présentées par lui devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Fontenay-le-Comte, à M. A...B..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2019 à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique le 21 juin 2019.

Le rapporteur,

I. Le BrisLe président,

I. Perrot

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT00384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT00384
Date de la décision : 21/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Isabelle LE BRIS
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS AVICI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-21;19nt00384 ?
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