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18/06/2019 | FRANCE | N°18NT01609

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 18 juin 2019, 18NT01609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...F...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le certificat d'urbanisme du 16 juillet 2015 par lequel le maire de Crac'h a estimé qu'il n'était pas possible de construire une maison d'habitation sur le terrain situé 2 hameau de Bodizac, cadastré section ZM n° 0043.

Par un jugement n° 1504514 du 23 février 2018 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 avril 2018 et 29 n

ovembre 2018, Mme D...F..., représentée par la SELARL Le Porzou, A..., Ergan, demande à la co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...F...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le certificat d'urbanisme du 16 juillet 2015 par lequel le maire de Crac'h a estimé qu'il n'était pas possible de construire une maison d'habitation sur le terrain situé 2 hameau de Bodizac, cadastré section ZM n° 0043.

Par un jugement n° 1504514 du 23 février 2018 le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 avril 2018 et 29 novembre 2018, Mme D...F..., représentée par la SELARL Le Porzou, A..., Ergan, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 février 2018 ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme du 16 juillet 2015 ainsi que le rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre à la commune de Crac'h de procéder au réexamen de sa demande et d'y faire droit ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Crac'h une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance est recevable ;

- le certificat d'urbanisme du 16 juillet 2015 n'est pas suffisamment motivé ;

- la commune a commis une erreur de droit, doublée d'une erreur manifeste d'appréciation, en refusant de lui délivrer un certificat d'urbanisme positif ;

- son terrain est desservi par les voies et réseaux nécessaires et est au sein d'un espace urbanisé et est donc conforme au I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 octobre 2018 et 3 décembre 2018, la commune de Crac'h, représentée par Me G...-B..., conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir qu'aucun des moyens d'annulation soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,

- et les observations de Me E...substituant Me A...et représentant Mme D...F...et de Me C...substituant Me B...et représentant la commune de Crac'h.

Considérant ce qui suit :

1. Le 7 juillet 2015, Mme F...a déposé en mairie de Crac'h une demande de certificat d'urbanisme afin de savoir s'il était possible de construire une maison d'habitation sur le terrain dont elle est propriétaire situé 2 lieu-dit " Bodizac ". Par un certificat daté du 16 juillet 2015, le maire a estimé que l'opération envisagée était irréalisable. Par un courrier du 28 juillet 2015, l'intéressée a demandé au maire notamment de lui indiquer quels sont les critères retenus par les élus municipaux pour classer un hameau en secteurs de taille et capacité d'accueil limitées (STECAL). Le maire lui a répondu par un courrier du 4 août 2015. Mme F...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler ce certificat d'urbanisme négatif. Par un jugement du 23 février 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Mme F...fait appel de ce jugement.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du certificat d'urbanisme litigieux doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du courrier du maire du 4 août 2015 par lequel ce dernier répondait aux questions posées par Mme F...et qui ne peut, ainsi, être qualifié de rejet d'un recours gracieux, doit être écarté comme étant inopérant.

3. En second lieu, comme l'ont indiqué les premiers juges, les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit en ayant indiqué que l'opération de construction envisagée n'était pas possible au motif que le plan local d'urbanisme était en cours d'élaboration et n'avait pas encore intégré les dispositions de l'article L. 123-1-5 6° du code de l'urbanisme telles qu'issues de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové ; ces dispositions permettent, à titre exceptionnel, de délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisées des constructions. En effet, ce motif ne pouvait justifier qu'une mention, dans le certificat d'urbanisme, de ce qu'un sursis à statuer pourrait être opposé et non pas de ce que l'opération n'était pas réalisable, alors qu'il est constant que le plan d'occupation des sols (POS) alors applicable classait le terrain en cause en zone UBa destinée à l'habitation.

4. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

5. Au vu des termes du certificat d'urbanisme en litige, la commune ne saurait soutenir que la méconnaissance de la loi littoral constituait le motif du caractère négatif du certificat d'urbanisme, alors même que cette loi était mentionnée à l'article 2 du certificat. Toutefois, c'est à bon droit que les premiers juges ont regardé la commune comme ayant demandé une substitution de motif en ce sens dans ses écritures de première instance.

6. Aux termes du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement (...) ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.

7. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet litigieux se situe dans une zone d'urbanisation diffuse dès lors qu'elle est limitée à une quinzaine de constructions, certes regroupées mais sans continuité avec la partie urbanisée de la commune. En outre, la commune fait valoir sans être ensuite contredite qu'il n'est pas établi que le plan d'occupation des sols (POS) en vigueur classait le terrain d'assiette du projet dans une zone destinée à l'accueil d'un hameau nouveau intégré à l'environnement. Ainsi, alors même que la parcelle en cause serait desservie par l'ensemble des réseaux, est classée en zone constructible par le POS et n'aurait aucun potentiel agronomique, biologique ou économique, aucune construction nouvelle ne pouvait être autorisée dans cette zone d'urbanisation diffuse, ce qui justifiait que soit opposé à Mme F...un certificat d'urbanisme négatif. Par conséquent, c'est à bon droit que les premiers juges ont procédé à la substitution de motif demandée.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme F...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Crac'h, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F...le versement à la commune d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés en appel.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme F...est rejetée.

Article 2 : Mme F...versera 1 500 euros à la commune de Crac'h en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...F...et à la commune de Crac'h.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Dussuet, président de chambre,

- M. Degommier, président assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 juin 2019.

Le rapporteur,

P. PICQUET

Le président,

J-P. DUSSUET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°18NT01609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01609
Date de la décision : 18/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DUSSUET
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. SACHER
Avocat(s) : CABINET LE PORZOU DAVID ERGAN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-06-18;18nt01609 ?
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